IACE - Premier rapport national sur l'Entreprise: Pour un nouveau pacte productif    L'Arab Tunisian Bank annonce la réussite de son augmentation de capital    De l'invisibilité à l'hyper-visibilité: le voile dans l'imaginaire onusien    Boubou Traoré au sifflet : qui dirigera le match Tunisie-Nigéria à la CAN 2025 ?    CAN 2025 : Chaîne et horaire pour suivre Nigéria - Tunisie    L'ISGI de Sfax installe une borne de recharge des véhicules électriques dans l'établissement universitaire    Kasserine : 330 000 comprimés de drogue retirés des rues    PME tunisiennes : la clé oubliée de la relance économique    Entreprises publiques : un poids budgétaire sous-estimé    CES 2026 : LG dévoile l'avenir de la mobilité grâce à des solutions embarquées intelligentes    Les couleurs du vivant: Quand la biologie et l'art se rencontrent    Une équipe de l'hôpital Charles-Nicolle de Tunis réalise une prostatectomie robotisée avec succès : une première en Tunisie    Tunisie-Japon : SAITO Jun prend ses fonctions et promet un nouvel élan aux relations bilatérales    Festival Saliha de la musique tunisienne à la ville du Kef : ateliers, concerts et spectacles (programme)    Météo en Tunisie : mer agitée, températures en légère hausse    2025 : la monnaie qui a surclassé toutes les autres et marqué l'histoire financière !    Vendredi: les rendez-vous à ne pas manquer de la CAN 2025    Pluies et baisse des températures : une dépression touche la Tunisie    Kaïs Saïed : seule l'action sur le terrain fera office de réponse    À partir d'aujourd'hui : déviation de la circulation en direction d'El Mourouj et Hammamet    Université de Tunis El Manar : 9e au niveau arabe et 1re en Tunisie et au Maghreb en 2025    Mohammad Bakri , l'acteur et réalisateur palestinien décédé à l'âge de 72 ans    Séisme de 6,1 à Taïwan : sud-est secoué sans dégâts signalés    Météo en Tunisie : vent fort et temps nuageux    Ghannouch accueille les projections des films de JCC 2025 dans les régions du 25 au 27 décembre    Crash près d'Ankara : le chef d'état-major libyen tué    CAN 2025 - Tunisie-Ouganda : Un avant-goût de conquête    Yadh Ben Achour reçoit le prix Boutros Boutros-Ghali pour la Diplomatie, la Paix et le développement (Vidéo)    Tunisie Telecom lance sa campagne institutionnelle nationale «Le Don des Supporters»    Match Tunisie vs Ouganda : où regarder le match de la CAN Maroc 2025 du 23 décembre?    Choc syndical : Noureddine Taboubi démissionne de l'UGTT    Riadh Zghal: Le besoin de sciences sociales pour la gestion des institutions    Tunisie à l'honneur : LILY, film 100% IA, brille sur la scène mondiale à Dubaï    Nabeul accueille le festival international Neapolis de théâtre pour enfants    Cérémonie de clôture de la 36ème session des journées cinématographiques de Carthage (Album Photos)    Décès de Somaya El Alfy, icône du cinéma et du théâtre égyptiens    Le carcadé: Une agréable boisson apaisante et bienfaisante    CAN Maroc 2025 : programme des matchs de la Tunisie, préparatifs et analyse des chances    France : nouvel examen civique obligatoire pour tous les étrangers dès 2026    Elyes Ghariani - Le Style Trump: Quand l'unilatéralisme redéfinit le monde    Slaheddine Belaïd: Requiem pour la défunte UMA    Comment se présente la stratégie américaine de sécurité nationale 2025    Match Tunisie vs Qatar : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 07 décembre?    Des élections au Comité olympique tunisien    La Poste Tunisienne émet des timbres-poste dédiés aux plantes de Tunisie    Sonia Dahmani libre ! Le SNJT renouvèle sa demande de libération des journalistes Chadha Haj Mbarek, Mourad Zghidi et Bourhen Bssaies    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Tunisie : Qui a tué Lotfi Nakdh ?
Publié dans Tunisie Numérique le 21 - 10 - 2012

La victime a fait l'objet de tirs croisés, ennemis, et amis dans une certaine mesure. Feu Lotfi Nakdh est tombé au champ d'honneur, au front, avec pour seul arme sa foi en une Tunisie nouvelle et en un espace retrouvé de liberté et de partage. Les agresseurs sont multiples. Chacun de nous a une part de responsabilité, aussi infime soit-elle, dans cet abjecte et lâche assassinat. Qu'il soit décédé succombant à ses blessures ou suite à une attaque cardiaque, ça relève presque de l'anecdote car, dans les deux cas, la victime a fait l'objet de lynchage et de violence physique et verbale. Que le cœur ait cédé ou que le corps ait saigné à blanc, jusqu'au dernier soupir, ceci n'est que la cause ultime du décès, cause légiste par excellence. En effet, le meurtre, car il s'agit bien de meurtre, est également imputable à d'autres raisons , certes moins directes mais non moins agissantes, d'ordre politique, économique et social.
Le glissement croissant de la Tunisie dans les méandres de la violence, dans toutes ses expressions et manifestations, a en quelque sorte banalisé la brutalité, la rendant une constante de notre quotidien. Les cris d'alarme et les appels d'alerte que maints acteurs de la société civile, politique et médiatique, ont levés, depuis des lustres, dès les premiers signes de dérapage, n'ont pas trouvé d'écho. Même pire, ceux qui ont prévenu et anticipé l'escalade, ont été accusés d'agiter des épouvantails et de dramatiser, d'une manière outrancière et hors propos, la réalité de la situation. Taxées de catastrophisme de mauvais aloi et produits de quelques esprits chagrins, les craintes soulevées, pourtant basées sur des constats tangibles et des indices objectifs, ont été balayées d'un trait sur l'autel des compromis à contre nature de la Troïka. Malgré l'insistance et en dépit du bon sens, le trio au pouvoir, derrière son écran de fumée et son prisme déformant, a fait preuve d'une incroyable cécité, développant une approche à contre pied des pesanteurs sociales et des dérives politiques et partisanes. “Gouverner c'est prévoir” dit-on ! La Troïka n'a ni gouverné ni rien prévu, plutôt qu'elle a tellement focalisé son esprit sur l'idée de gouverner qu'elle a omis de prévoir.
La Troika, aujourd'hui au banc des accusés, pour avoir confisqué la transition démocratique, mis en otage l'Etat et la République, détourné le processus de justice transitionnelle et corrompu les objectifs de la révolution. L'échec sur toute la ligne de son gouvernement, pourrissant la situation socioéconomique et creusant les disparités régionales. Sa dissension interne, sa fuite en avant, sa défaillance de communication, son déficit de bilan n'ont fait qu'apporter une couche de tension à un contexte social déjà en effervescence et au bord de l'implosion. De part son positionnement et aussi sa démission sur certains volets, la Troika a prouvé que son plan d'action ambitionne en premier lieu la main mise sur le pouvoir et non l'accompagnement à bon port de la transition démocratique. En ligne de mire, le parti Ennahdha, qui se démène à placer ses hommes de main et même de paille dans les articulations de l'Etat, à dominer et faire marcher au pas la Troika, et par là à soumettre l'ANC, à souffler sur le feu identitaire, à bipolariser la société tunisienne entre “musulman” et “mécréant”, et entre deux modèles de société, un modèle moderne, ouvert, modéré et séculier, inscrit et enraciné dans la culture même de la Tunisie et un modèle fondamentaliste, antinomique du patrimoine commun, basé sur un projet d'islamisation (plutôt ré-islamisation) de la société et de rejet des acquis culturels et sociaux de la Tunisie. Sous ce faux duel entre les deux modèles antagonistes et inconciliables, monté en épingle au mépris de la séculaire cohésion culturelle et identitaire de la Tunisie, couvent les conditions à la fermentation de la violence.
Feu Lotfi Nakdh a été abattu car il a le “tort” de représenter un parti politique que le gourou Rached Ghannouchi a stigmatisé et jugé plus nuisible que la mouvance salafiste, affirmation accordant, en filigrane, un blanc seing à viser et casser du “Nida Tounes”, puisque de ce parti qu'il s'agit, vouant celui-ci à la vindicte salafiste et désignant, aux extrémistes jihadistes, leur adversaire de premier rang. Une manœuvre pour déplacer le noyau de la rivalité et opposer les deux protagonistes. Est-ce fortuit que le meurtre soit commis après la fameuse et non moins houleuse vidéo ? Pourrait-on parler de cause à effet. Il n'est pas question là de pointer le coupable, en l'occurrence la mouvance salafiste, mais de montrer comment, par de simples phrases, plutôt assassines, on fait le lit de la violence et on fait l'apologie de la négation de l'Autre. Quand on pointe la cible, c'est pour qu'on tire dessus, plein dans le mille. C'est élémentaire.
L'opposition, hétéroclite et fractionnée, n'a pas brillé par sa force de proposition et sa critique objective et constructive mais notamment par sa posture de descendre systématiquement la majorité. On dirait qu'elle n'existe pas d'elle-même mais par rapport à la majorité et au trio au pouvoir, donnant l'impression de ne respirer que dans le soufre des rafales. A certain niveau d'abstraction, on a plutôt des opposants et non une opposition, des francs tireurs beaucoup plus qu'une armée. La pléthore des courants idéologiques et politiques n'a pas agi, pour l'opposition, comme une source de richesse mais comme un facteur de fragmentation et de faiblesse. Incapable de constituer un front uni, une alternative robuste et crédible, l'opposition tunisienne souffle sur le feu de la division et alimente , à sa façon, les bûchers de la violence.
Pour sa part, l'ANC a apporté sa complicité, quelque part, et sans s'en rendre compte, à cet assassinat politique. Son inféodation au gouvernement, son processus de travail heurté, son flagrant retard dans la mise en œuvre de son mandat, son confinement à une fonction de bureau d'enregistrement, son image et son crédit de plus en plus entamés et dégradés auprès de l'opinion publique tunisienne, sa navigation à vue, l'opacité de son échéancier, sont tout autant de facteurs ayant exacerbé la tension sociale et favorisé la déliquescence de l'héritage commun qui a toujours joué un rôle de ciment social naturel dans notre pays.
Nous aussi, citoyens anonymes, nous avons péché par manque de mobilisation sur le terrain pour dénoncer, haut et fort, le dérapage sécuritaire et la montée de la violence. Nous n'avons pas saisi la juste mesure du tendancieux virage ni pris les choses à bras le corps mais par le bout des lèvres. Nous nous sommes certes épuisés dans d'autres batailles, et non des moindres, mais celle-ci a pesé nettement plus en termes de stabilité sociale et de vie humaine. La société civile, pilier d'équilibre et voix du peuple, est plutôt noyautée et phagocytée par de véritables ONGs (Organisations nettement Gouvernementales), composées d'officines partisanes, de relais religieux et d'échoppes de recyclage et d'instrumentalisation des milices RCDéistes et des repris de justice. La porte est ainsi ouverte à tous les abus et a toutes les menaces. La société civile a peu ou prou joué son véritable rôle d'amortisseur des crises sociales, offrant à la violence des brèches et des pistes de manifestation.
En conclusion, chaque tunisien a le sang de Feu Lotfi Nakdh sur les mains et sur la conscience. Du pays de Jasmin, on en a fait un territoire de cactus.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.