Comment comprendre le vent de tumulte qui secoue actuellement Nida Tounes, parti qui jusqu'ici a pu conserver une certaine unité et évoluer d'une manière plutôt homogène et qui, paradoxalement, part en vrille à la veille des élections ?! Diverses raisons expliquent le craquement, voire le risque d'éclatement, que court cette formation politique. Sur le plan interne, un déficit de cohésion est tangible à vue d'œil. En effet, la guerre des ailes, la rivalité idéologique, le système d'organisation, le manque de démocratie, la course au leadership ont fait surface pour handicaper la marche de Nida Tounes. Lequel n'a pas terminé sur sa lancée, cessant de brasser plus large, d'être une locomotive pour se confiner dans une logique strictement partisane et non moins contreproductive à terme. Sur le plan externe, Nida Tounes n'a pas brillé ni par sa lucidité ni par sa maturité. Sa décision de faire cavalier seul, lors des prochaines élections présidentielles et législatives, a été perçue comme un acte solitaire, sans discernement et à courte vue. Des voix se sont levées, au sein même de Nida Tounes comme à l'UPT, pour vilipender la décision en question, qui a fissuré le front démocratique et exacerbé la tension entre les partenaires qui jusqu'ici faisaient bloc derrière le même projet. De toute évidence, un choix purement partisan qui a posé beaucoup plus de problèmes qu'il n'en a résolu. Même au sein de l'électorat démocratique, la grogne et le désaccord battent leur plein. Voilà bien un gisement de voix qui risque la dispersion et la déroute, auquel cas le front démocratique, au-delà de ses courants, laissera des plumes au prochain scrutin. Devant de tels risques pesant sur le modèle de société et le mode de gouvernance, Nida Tounes semble ne pas trop s'en soucier, préférant la fuite en avant à l'analyse objective de la situation politique. D'aucuns estiment que le parti est dans son bon droit et qu'il la capacité de gagner l'enjeu électoral et de gouverner. Peut-être que les disciples d'une telle idée voient loin, bien et juste. Mais d'un autre côté, si les démocrates modernistes tunisiens essuient un revers lors des élections, Nida Tounes en serait le premier responsable, comme le PDP l'était en Octobre 2011, qui lui aussi s'était vu trop beau en faisant cavalier seul, avec la débâcle qu'on connait, non seulement pour ce parti mais surtout pour tout le front démocratique tunisien. Si on n'apprend pas des erreurs, on n'apprendra jamais rien et on continuera de prendre les mauvaises décisions et de collectionner les terribles fiascos.