Soufflant sur toutes les braises de la division, le président sortant, candidat à sa propre succession, remet une couche et agite d'ores et déjà l'épouvantail de la fraude. Un aveu d'échec ou une alerte avérée de manipulation ?! En tout état de cause, Moncef Marzouki est droit dans sa logique de campagne, qui nourrit l'effroi, cultive la sédition et brandit des menaces, qui, au fait, n'existent que sous son crane. Après ses envolées sur les risques d'hégémonie et de retour de la dictature, le fait de pointer la falsification coule de source. Il n'aurait pas été conséquent avec sa ligne électorale et de son plan de communication s'il ne sortait pas ce genre de slogan. Jusqu'au jour du scrutin, il faut s'attendre de sa part à d'autres leitmotivs aussi démoniaques. Sans conteste, Moncef Marzouki a tout misé sur la peur, l'artifice et l'imposture. Imperméable à toute idée de défaite, dont il se garde de tenir en ligne de compte, il fait de Carthage une obsession, tant il est incapable de se voir drapé autre que de la tunique présidentielle. Pour lui, le scénario de passer la main à un autre candidat n'est plus une hypothèse, pilier au cœur même de l'architecture démocratique, à savoir l'alternance au pouvoir, mais un naufrage, une forme d'infirmité. Comment se fait-il qu'un candidat invoque la fraude à deux semaines du scrutin ?! La fraude est un fait et non une vue de l'esprit, c'est un acte tangible vérifiable et non une supputation. Lever, avant terme, ce type de bouclier est avant tout un procès d'intentions. Le cas échéant, quels en seraient les fraudeurs ?! Dès lors que la Constitution a chargé l'ISIE de toute l'opération électorale, toute arnaque, observable et établie, lui sera immanquablement imputée. N'est-ce pas là une volonté d'accuser l'ISIE, bien avant le scrutin, de vouloir truquer les élections et de lui prêter, d'une manière infondée et gratuite, des velléités de corrompre le processus électoral. Discréditer, à l'avance, l'ISIE alors que celle-ci a globalement réussi à organiser et gérer deux importantes échéances électorales en moins d'un mois, c'est faire preuve de mauvaise foi et d'esprit tordu. Dans le même obscur ordre d'idées, deux questions s'imposent : 1- Pourquoi Moncef Marzouki n'a-t-il pas pipé un orphelin mot sur le risque de fraude, au premier tour ? Il a certes bien déposé des recours, mais a posteriori, recours que le Tribunal Administratif a rejetés en première instance comme en appel. 2- Pourquoi la fraude n'a pas eu lieu au premier tour ?! Si le couperet du trucage était présent, un bourrage d'urnes ou toute autre tricherie aurait scellé la victoire de BCE au premier tour et l'électorat en aurait fini plus tôt. Sur un autre plan, il n'est pas exclu qu'en se focalisant sur l'idée de fraude, Moncef Marzouki prépare son échec et en épingle d'ores et déjà les coupables, à savoir les présumés faussaires, l'ISIE en ligne de mire, de par son statut d'unique instance chargée des élections. Par conséquent, dire que le camp adverse est en mesure de violer les règles du jeu et de fausser le scrutin, est un non sens à tout point de vue, c'est ramer à contre courant. Tout simplement parce que, hormis l'ISIE, aucune autre partie, quelle qu'en soit la nature ou la portée, n'est capable, pratiquement et techniquement, de traficoter le scrutin, à moins de vouloir, faute de mieux, et par esprit bassement revanchard et aigri, soupçonner le Ministère de l'Intérieur ou le Ministère de la Défense, départements impliqués dans le transport des urnes, auquel cas on est en plein paranoïa. A l'entendre décliner ses craintes, si Moncef Marzouki se cassait les dents, il n'en serait pour rien, les fraudeurs se seraient légués contre lui pour lui barrer la route. Ce n'est guère son sombre bilan, ce n'est point sa lamentable prestation, ce n'est pas non plus sa défaillante gestion ou sa notoire incompétence qui en seraient en cause, « l'enfer c'est les autres » comme dirait JP. Sartre. Ce qui laisse penser que Moncef Marzouki est un mauvais perdant dans l'âme et qu'en cas de raclée, il ne compte pas moins pourrir la passation de pouvoir. Un scénario vraiment à craindre tant le bonhomme reste coincé dans sa bulle et figé dans sa théorie de la conspiration. Encore pire : Que dirait-il Moncef Marzouki si, au deuxième tour, pour une raison ou une autre, certes plus invraisemblables les unes que les autres, l'électorat d'Ennahdha lui ferait fausse route et voterait blanc par exemple ?! Certainement qu'il éructerait un discours de haine, au vitriol, plus sulfureux que celui empestant déjà sa campagne électorale et se présenterait, sans doute, dans la peau de victime expiatoire d'un complot ourdi à l'échelle nationale. Pauvre Moncef Marzouki ! Tout le pays serait contre lui, exempté un dernier carré de disciples et un noyau dur de CPRistes.