La dernière sortie médiatique de Moncef Marzouki, après une période de silence que d'aucuns ont cru consacrée à l'autocritique et au bilan, montre, si besoin est, la nature schizophrène et versatile de l'ex résident de Carthage. Se découvrant des affinités avec l'islamisme radical et féodal, il sort de son hibernation pour apporter de l'eau (trouble ?!) aux moulins (moyenâgeux) de « Hezb Ettahrir » , et n'éprouve aucune gêne à s'opposer à sa dissolution et à la décision du parquet de transférer au tribunal militaire l'affaire, dont ce parti est au centre.Il pousse l'agitation cérébrale jusqu'à appeler, entre les mots, son dernier carré de partisans à barrer la route au gouvernement de Youssef Chahed. Et ce au nom de la Constitution et de la démocratie, deux termes dont il a usé et abusé alors qu'en fait il bafoue et foule du pied tant il est coincé dans ses contradictions et ses égarements. Commençons par la Constitution dont l'article 35 est limpide comme l'eau de roches dès lors que son texte stipule : » Les partis politiques, les syndicats et les associations s'engagent dans leurs statuts et leurs activités au respect des dispositions de la Constitution, de la loi et de la transparence financière et au rejet de la violence« . En vertu de ces dispositions, « Hezb Ettahrir » s'exclut lui-même de la scène politique dans la mesure où ce parti rejette la Constitution, la république et la démocratie, sans compter qu'il ne se reconnait pas dans les signes distinctifs et symbolique de la Tunisie, notamment le Drapeau et l'Hymne. En plus, « Hezb Ettahrir » n'est pas un parti, selon l'acception classique, mais une confrérie, une secte religieuse, dont le projet est confessionnel et non civil ou politique. Il n'est pas dans une logique citoyenne en phase et en symbiose avec l'ordre constitutionnel ambiant mais dans une perspective théocratique et absolutiste, dont la finalité est le rétablissement du Califat, système de gouvernance, antédiluvien et historiquement dépassé, que « Hezb Ettahrir » appelle de ses vœux et place au centre de son programme. C'est un projet, en dehors de l'histoire et même de la géographie, à contrepied de la Constitution, de la république et de la démocratie. Il n'est nullement ici question de contester à quiconque le droit de revendiquer un tel modèle, aussi archaïque et anachronique qu'il soit, mais quand il s'agit de formation politique, le dispositif constitutionnel est tout autre. Il y a une nette ligne de démarcation entre les convictions d'un individu et les fondements d'un parti politique. En un mot, comment défendre un parti dont l'allégeance n'est pas à la Tunisie mais à un sombre et non moins anonyme prince palestinien, Ata Abou Rachta, un parti qui prône la guerre sainte et menace de couper les mains et les têtes, un parti qui, dans son projet, sa littérature et son discours, méprise la Constitution. Il n'est pas question là de liberté d'expression ou de conscience, garantie par la Constitution, mais justement de conformité avec la Constitution. Aucun droit n'est acquis en dehors de ce cadre. Transgresser le dispositif constitutionnel n'est guère un droit, c'est un déni de droit. Venons-en à la démocratie, « Hezb Ettahrir » en rejette le système et le bien-fondé et n'en a cure des principes de principes fondateurs et fédérateurs comme le caractère civil de l'Etat, l'alternance au pouvoir, le respect des libertés, la nature républicaine démocratique et participative du régime, la séparation et l'équilibre des pouvoirs, la primauté du droit et l'éminence de la citoyenneté. Tout autant de principes, de règles et de concepts que « Hezb Ettahrir » rejette et combat car considérés comme facteurs d'aliénation et d'hérésie, contre l'Islam, son identité, son code juridictionnel et son projet de société. Au nom de quelle démocratie braille Moncef Marzouki quand une formation politique appelle, en Juillet 2014, « les forces politiques, militaires et sécuritaires à entreprendre des actions pour ériger le Califat« , autrement dit, un coup d'Etat, quand il enjoint l'électorat tunisien à boycotter les élections législatives et présidentielles de 2014. Des faits d'arme qui en disent long, si besoin est, sur les premières motivations et les ultimes intentions de ce soi-disant parti. Etant signalé qu'en Juillet 2014, Moncef Marzouki était président (heureusement provisoire) de la république. On ne l'a pas entendu s'élever contre un tel discours alors qu'aujourd'hui il monte au créneau pour en défendre l'auteur. Saisi officiellement par écrit, rappelé à l'ordre et mis en garde par le chef du gouvernement Mehdi Jomâa, à la même période, « Hezb Ettahrir » n'a pas obtempéré, continuant, sur sa lancée, de piétiner tous les attributs de la démocratie.En plus, dans sa littérature, la pieuvre « Hezb Ettahrir » table sur le coup d'Etat pour prendre le pouvoir et appelle ses disciples àinfiltrer l'institution militaire et sécuritaire ainsi que les arcanes de l'Etat. Rien dans sa doctrine ne privilégie la voie démocratique pour conquérir le pouvoir. Tout est question de rapport de force et de timing. Pire encore, son leader, le tristement célèbre Ridha Belhadj, se consacrant au prosélytisme international, a fait l'apologie du terrorisme. N'a-t-il pas déclaré, en Mai 2012, suite à la mort d'Oussama Ben Laden, que celui-ci est le symbole de la lutte des Musulmans contre les Occidentaux et que dixit « L'homme part, mais son projet reste....L'Histoire retiendra que Ben Laden a lutté contre le projet impérialiste« . Toujours chef d'Etat à l'époque, Moncef Marzouki n'a pas sourcillé, préférant plancher sur son livre noir de triste mémoire. En conclusion, en termes de constitution et de démocratie, double étendard que Moncef Marzouki brandit pour défendre « Hezb Ettahrir », ce dernier est un parti hors-la-loi d'un point de vue constitutionnel et, à ce titre, sa dissolution n'est pas un choix politique mais un impératif constitutionnel, conforme à l'esprit et à la lettre de la Constitution et dans la droite lignée de l'œuvre de démocratisation que la Tunisie s'efforce de mener à bon port. Bonté divine ! Moncef Marzouki, taisez-vous !!