La foire d'empoigne continue de plus belle à Nida Tounes (NT). Le parti n'a de cesse de se donner en spectacle et d'amuser la galerie. Le théâtre donne une énième représentation de la pièce « descente aux enfers », les acteurs et les comparses rivalisent de facéties, de farces et de grimaces. Les retournements de veste, les coups bas et les voltefaces ne se comptent plus. NT n'est plus une formation politique mais un ramassis de fragments, de clans et de factions, épuisant leur temps et leur force à se flinguer et à se poignarder au dos. Au point de ne plus savoir qui est contre qui, qui a raison, qui a tort ! Le flou artistique règne à tous les étages et à chaque recoin. Un vrai foutoir ! Ceux-ci crient au putsch, ceux-là menacent de démissionner, d'autres s'abiment dans des pétitions, d'autres appellent à la fronde. Les voix montent, hautes et fortes, aussi dissonantes qu'assourdissantes. Un brouhaha de tous les diables. Depuis le premier craquement de NT, deux hommes ont investi la scène partisane et politique par leur capacité de revirement et de nuisance, à savoir Hafedh Caid Essebsi (HCE) et Ridha Belhadj (RB). Ils sont dans tous les coups tordus dont NT est victime. Tantôt complices à mort, tantôt ennemis jurés, HBE et RB poursuivent, sans coup férir, leur œuvre de destruction et leurs manœuvres de s'approprier NT, un parti qui a implosé dans sa structure interne avec les dissidences et les scissions. Le bloc parlementaire de NT est parti en vrille ainsi que son unité, son crédit et son électorat. Un Harakiri en règle que les deux chevaux de Troie, HCE et RB ont précipité. Tout compte fait, le triomphe électoral n'a été qu'une victoire à la Pyrrhus. Par réflexe opportuniste ou par lecture lucide, l'un des timoniers, Mohsen Marzouk, a sauté, avec ses matelots, de la barque qui coule. Un nouveau parti et un nouveau bloc parlementaire ont vu le jour sur les ruines de NT. Pendant que le bateau s'enfonce, HCE et RB, ramant à contre-courant, continuent d'en arracher les voiles et d'en scier le mât. Dans leur foulée, les autres mentors et autres pontes de NT se contentent de jouer la montre, canot de sauvetage sous les bras. Ils gesticulent, braillent, persuadés que plus ils hurlent mieux ils sont écoutés. Les alliés d'hier devenus adversaires aujourd'hui, l'inverse est tout aussi vrai. Les velléités d'exclusion n'ont d'égales que les tentatives de mise en otage. Un bloc avance la théorie de complot, l'autre accuse d'abus de pouvoir. Dans son coin, chaque groupe, mu par son propre agenda, joue sa carte et aiguise son sabre. Les déclarations et les contre-déclarations, bien signées et médiatisées, sont légion. Les congrès se multiplient avec un ordre du jour, un objectif, une enceinte et un auditoire différents sinon opposés. Les intérêts et les enjeux changent d'une réunion à l'autre, d'une partie au conflit à l'autre. Un fracassant magma bien disparate et tout autant volubile. Division dans la division ! Le Comité Politique de NT, réuni à Tabarka le 21 Mai 2016, sous la présidence de son Directeur Exécutif, en l'occurrence HCE, a vite fait de valider et d'officialiser le retrait de RB de son poste de président du Comité Politique. Une autre réunion, du clan opposé, initiée par RB, tenue le 19 Septembre 2016, dont l'objectif a consisté à évincer HCE. Une guerre de tranchées dans toute sa difformité. Manifestement, il n'y a ni sages ni voix de raison au sein de NT ou ce qui en reste. La guerre fratricide continue de battre son plein et d'enfoncer les derniers clous dans le cercueil de le parti en dérive. Et NT dans tout ça ?! De toute évidence, personne n'en a cure ! Le sombre et non moins fantasque HCE, fils à papa autant manipulateur que teigneux, a eu l'insigne force d'écarter ses principaux rivaux et de faire main basse sur la principale œuvre de son paternel, à savoir le parti NT, un héritage confisqué aux forceps et non légué. En quelque sorte, une succession à l'envers que le fiston a imposée sans que le géniteur ne remue un seul sourcil. Un travail de sape en règle, fourbe et méthodique, mené dans les coulisses, à l'antichambre, dans la discrétion et la mauvaise foi. Un parfait exemple d'autodestruction. Voilà un homme, avançant toujours masqué, agissant toujours à l'ombre, pour qui la scène médiatique est un échafaud et l'espace public un champ de tir, qui tire toutes les ficelles sans qu'il ose sortir au grand jour et écumer les plateaux Radio et TV comme tout homme politique tunisien, friand de montrer sa tronche partout. Loin s'en faut, HCE ne brille ni par sa présence ni par son envergure, toujours terré dans sa cachette, tapi dans son silence, la main sur la gâchette et le regard farouchement rivé vers un trône qu'à défaut d'hériter, il manœuvre, dans le noir, pour empoigner. Par moments, il a failli obtenir gain de cause et s'emparer de toute la citadelle ou ce qui en reste. Auquel cas, HCE, dont la volonté d'hégémonie alterne avec la force de nocuité, sera-t-il vraiment ravi de commander sur des ruines et sur une armée d'hommes de paille! Implosion de NT ? Et alors ! Pour peu que HCE en soit sur le toit. Il se moque comme d'une guigne que le parti parte en lambeaux, que la maison s'effondre sur ses occupants. Il s'en fiche. Rien à foutre ! Les autres grandes figures n'en sont pas en reste. A Carthage, le père fondateur et le guide spirituel de NT s'en lave les mains, laissant à son rejeton l'illustre et et non moins obscur soin d'achever l'œuvre de casse que les choix politiques post-électoraux de BCE et de sa clique d'illuminés ont commencée. Est-il fortuit que dès que BCE ait joué avec le feu, en trahissant son électorat, aussitôt NT a commencé sa descente aux enfers ?! Il est vrai que, comme à la guerre, tous les coups sont permis en politique. D'ailleurs, la trajectoire de NT est une histoire de coups, débutant par un coup de foudre pour finir par un coup d'Etat, entretemps les coups n'ont cessé de pleuvoir: Coups de théâtre, coups de poignard, coups de gueule, coups de pied, coups de balai, coups de boutoir, coups de poing, coups d'éclat, coups d'épée, coups de Poker, coups bas, coups tordus. Des coups en pagaille, à n'en plus finir. Le coup dans toutes ses déclinaisons. Une interminable variation sur un sulfureux thème.