Les docteurs et les docteurs-chercheurs chômeurs ont annoncé qu'ils observeront une journée de colère nationale, mercredi prochain 8 septembre, pour appeler au lancement d'un concours annuel permettant de résorber leur chômage. Depuis au moins trois ans, les contestations et les protestations des docteurs et des docteurs-chercheurs continuent, des groupes parmi eux ont été en sit-in sans fin et en grèves de faim au ministère de l'enseignement supérieur et la recherche scientifique exprimant ainsi leur désespoir face au blocage de leur situation pour revendiquer du travail. Au fait, les docteurs sans emploi souhaitent après des d'années d'effort et de sacrifices, sortir de leurs conditions de vie marquées par la précarité et des difficultés financières insoutenables. Rouvrir le concours national pour le recrutement des enseignants universitaires, supprimer les contrats précaires pour les remplacer par des contrats dignes, telles sont les principales demandes des docteurs au chômage. Tout le problème réside, officiellement du moins, au fait que la situation des comptes publics ne permet pas de les recruter. Toutefois, ces mêmes comptes permettent, bizarrement, la régularisation de la situation de milliers de travailleurs de chantiers ainsi que des augmentations salariales importantes pour certains hauts fonctionnaires allant jusqu'à 1400 dinars par mois.... Le comble est que le bulletin des résultats d'exécution du budgetde l'Etat publié aujourd'hui par le ministère des finances montre que les quelques 900 mille fonctionnaires dans l'administration ont bénéficié au premier semestre 2021 d'augmentations de salaires de 6% pour que ceux-ci atteignent 10 milliards de dinars... Officiellement, le budget du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique s'élève pour 2021 à 1864,5 millions de dinars (568 millions d'euros), en hausse de 2,57% seulement par rapport à l'année dernière. Toujours selon le document du budget, les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 3,54% à 1315 millions de dinars. Les dépenses de gestion, quant à elles, sont en très légère hausse de 1,868 millions de dinars pour atteindre 129,6 millions de dinars alors que les dépenses d'investissement ont connu une stabilité à hauteur de 170 millions de dinars. Ces chiffres dérisoires pour un domaine clé pour la société montrent à quel point les autorités négligent le savoir en Tunisie. Le problème du chômage des docteurs et des docteurs chercheurs remonte à environ deux décennies. Il concerne selon la coordination des docteurs et doctorants de l'université de Tunis 5 000 docteurs contre 3300 en 2017 ce qui représente 69% des docteurs au pays. L'erreur qui a mené à ce problème consiste, au fait que la majorité des doctorants ne travaillent qu'auprès de l'Etat, en l'occurrence en tant qu'enseignants, or un docteur est supposé avoir été sélectionné pour son sens de l'innovation afin de pouvoir trouver des ébauches, notamment dans l'entreprenariat bien que ce chemin n'est pas facile. En Tunisie, s'inscrire en thèse n'est autre qu'une alternative au chômage, surtout pour certaines spécialités. Par ailleurs, si tout projet de thèse était lié à un objectif économique, l'effectif actuel des docteurs serait un atout. Plusieurs autres problèmes se posent et concernent essentiellement l'absence de synergie entre le monde de la recherche et celui de l'entreprise, la redondance des sujets des thèses et la faible valeur ajoutée de la recherche scientifique au pays. Tout de même, il faut bien reconnaître que la situation des docteurs chômeurs est dramatique et leurs perspectives sont très inquiétantes. La plupart d'entre eux sont arrivés à un âge relativement avancé, n'ont pas de situation professionnelle stable et vivent dans la précarité.
Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!