«ExpoLugha», est le 1er salon dédié en Tunisie à la promotion des langues et de l'interculturel qui a eu lieu les 18 et 19 octobre dernier. L'évènement est passé presque inaperçu puisque c'est l'actualité politique qui continue à être privilégiée par les medias. Or, il s'agit là d'un évènement culturel et scientifique qui appelle, au moins, trois observations. D'abord, l'ambition à la fois linguistique et culturelle et de cette première édition d' «ExpoLughaa». Selon, les parties organisatrices d' «ExpoLugha» (ministère de l'éducation, ministère de la formation professionnelle, société civile, ambassades…) l'objectif est de «réunir organismes culturels et grand public afin de promouvoir les langues et de favoriser le dialogue interculturel en Tunisie». Ce qui est une façon intelligente et pratique pour dire aux chantres du repli sur soi que la Tunisie a été, est et sera le pays de la richesse linguistique, de la diversité culturelle et de l'ouverture sur l'universel. En d'autres termes, l'acquisition, l'appropriation des langues étrangères est la seule voie qui s'offre aux Tunisiens pour assurer d'une manière interactive l'inscription du Tunisien (homme ou femme) dans le champ des connaissances, dans la dynamique de l'universel. Et par conséquent, cette voie constitue une école d'apprentissage de la diversité et de lutte contre le chauvinisme linguistique, le fanatisme religieux et toutes les perversités racistes. La connaissance des langues étrangères permet, objectivement, la confrontation avec d'autres espaces, d'autres langues, d'autres cultures, d'autres peuples et d'autres sociétés. Elle cultive le recul et la distanciation critique. Ensuite, l'idée-force qui s'est dégagée des conférences, des tables rondes et des ateliers qui ont eu lie au cours de cette première édition d' «ExpoLugua », est que les cultures et les langues ne s'opposent pas sur le fond, et qu'elles sont plutôt les diverses manifestations de l'universel humain. Toutes les cultures s'articulent les unes sur les autres. Pas d'universel et pas d'humanisme, sans lutte contre toutes les hégémonies: d'une langue sur l'autre, d'une société sur d'autres. D'un sexe sur l'autre. D'une religion sur l'autre. De ce fait, la vocation de l'enseignement des langues étrangères est d'être, d'une manière ou d'autre, de l'ordre de l' enjeu interculturel lui-même, fin et moyen tout à la fois, participant à la constitution d'une culture authentique parce que ouverte et s'attaquant sans merci aux vérités les plus exclusives. La vocation de l'enseignement des langues, avec que qu'il implique comme ouverture sur les visions du monde, est de cultiver la formation de consciences agissantes de sujets véritables, de citoyens engagés, clairvoyants sans dogmatisme, responsables sans démission devant le cours de l'histoire et sa complexité. Enfin, le consensus qui s'est dégagé des différents débats qui ont lieu sur la «langue spécifique », le «langage savant», la «langue et la littérature», la «langue du sacré», les «langues Anciennes» et les «langages vernaculaires», c'est la connexion forte entre la créativité linguistique et le mouvement de la pensée. Et surtout, que l'apprentissage d'une langue étrangère offre toujours l'occasion pour l'individu de frotter et limer sa cervelle à celle d'autrui, de juger de la précarité de ses opinions qui ne sont parfois rien d'autre que des idées reçues, des préjugés. L'appropriation et la pratiques des langues sont, par conséquent, autant d'occasions pour prendre conscience de la pluralité des possibles, de la diversité des imaginaires qui constituent le substrat culturel de toute démarche de création, de la pluralité des réponses que le geste créateur apporte, quelle que soit l'appartenance nationale du créateur, aux questions fondamentales de l'homme et de la femme.