Selon un rapport publié par la Banque mondiale et présenté récemment à Dubaï (Emirats arabes unis), la région MENA peut parvenir à élever le niveau de vie dans ses zones les moins développées économiquement grâce à des choix politiques informés et pertinents. «Les décideurs politiques de la région peuvent surmonter les inégalités, parfois intolérables, dues aux désavantages géographiques, sans compromettre l'efficacité économique», a déclaré Alex Kremer, auteur principal du rapport et économiste en chef à la Banque mondiale. Le rapport remet en cause l'idée selon laquelle cette zone du monde doit dépenser des sommes colossales dans des mégaprojets et des subventions en faveur des zones les plus pauvres. Les solutions les plus pertinentes pour ces zones géographiquement désavantagées ne sont pas toujours celles qui semblent les plus évidentes de prime abord, note M. Kremer. Pour Shamshad Akhtar, vice-présidente pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) à la Banque mondiale, «l'objectif de ce rapport est d'offrir aux décideurs politiques de la région un cadre qui leur permette d'aider les populations des zones périphériques à partager les bénéfices du développement, explique-t-elle. Pour des raisons d'efficacité, l'activité économique se concentre dans les grandes villes et leurs agglomérations, mais cela ne devrait pas priver ceux qui vivent ailleurs des bénéfices du développement». Avant tout, les disparités spatiales (le fossé entre les zones désavantagées et les régions plus développées) peuvent être moins importantes qu'en apparence, suggère le rapport. Les décideurs politiques doivent avoir une compréhension objective de la mesure dans laquelle le bien-être d'un ménage est affecté par son emplacement géographique : les implications du lieu géographique en termes d'inégalités varient en fonction des pays. Par contre, dans aucun des pays de la région, l'inégalité zones rurales/zones urbaines ne dépasse le cinquième du total des inégalités pesant sur les dépenses des ménages, ce qui met la région MENA au même positionnement que celui des autres régions en développement dans le monde. Si l'ensemble des zones géographiquement défavorisées partagent des indicateurs de développement communs, leurs caractéristiques géographiques sont spécifiques et impliquent des réponses politiques différenciées. De ce fait, il faut commencer par investir dans le capital humain et à suivre des politiques plus équitables vis-à-vis des régions. Des bureaucraties centrales puissantes En premier lieu, toute réponse politique doit assurer des conditions égales pour tous et investir dans le capital humain. L'histoire politique et coloniale de la région MENA, qui se caractérise par des bureaucraties centrales puissantes, des politiques économiques et fiscales centralisées et un faible degré de responsabilisation mutuelle, a conduit à un abandon général de certaines zones. Pour assurer des conditions d'accès au développement équitable, le défi consiste à surmonter les désavantages historiques des populations situées dans les zones périphériques. Il s'agit également d'améliorer les liaisons entre les régions les plus riches et les zones économiquement défavorisées. Les zones les plus pauvres de la région MENA possèdent l'avantage de la proximité, puisque 61% de leur population vivent à trois heures de route ou moins d'un grand centre urbain. Il est donc possible de connecter ces zones défavorisées aux centres en investissant dans des secteurs clés tels que les transports, la facilitation des échanges ou encore les technologies de l'information et de la communication. Selon le rapport de la Banque mondiale, les gouvernements peuvent faciliter un développement groupé dans des zones en soutenant les acteurs locaux et en les aidant à coordonner leurs initiatives. Il s'agit ici de privilégier les partenariats public-privé, d'investir dans le capital humain et dans des infrastructures appropriées plutôt que d'imposer certains investissements avec force subventions et allègements fiscaux. Pour soutenir les initiatives gouvernementales MENA en matière de désenclavement, plusieurs projets ont été menés par la Banque mondiale dans nombre de pays de la zone MENA. En Tunisie, un projet pour le développement des zones montagneuses et forestières du Nord-ouest de la Tunisie, destiné à développer les moyens de subsistance des populations vivant dans l'une des régions rurales les plus pauvres du pays, a permis de rehausser entre 2003 et 2009, le revenu réel de la zone concernée de 85%. La part des communautés ayant un accès à une source d'approvisionnement en eau potable est passée de 69 à 81%.