Le constitutionnaliste Kamel Ben Messaoud est revenu, jeudi 28 janvier 2021, sur le rejet du président de la République, Kaïs Saïed, de la prestation de serment des nouveaux ministres désignés dans le cadre du remaniement ministériel décidé par le chef du gouvernement Hichem Mechichi et approuvé par le Parlement lors de la plénière du mardi 26 janvier. Invité de la Matinale de Hamza Belloumi sur Shems FM, l'expert a affirmé, sans équivoque, que le locataire de Carthage était en cas de compétence liée et n'avait d'autre choix que de se plier à son devoir et recevoir les nouveaux ministres pour la cérémonie de prestation de serment, une étape nécessaire avant la prise de fonction. Lundi, lors d'une réunion du Conseil de sécurité nationale, le président de la République avait jugé « inconstitutionnel » le remaniement opéré par Hichem Mechichi après tout juste quatre mois d'exercice et a signifié qu'il rejetterait la prestation de serment à Carthage de par les suspicions de corruption qui planent sur certains des ministres désignés. La déclaration de Kaïs Saïed a relancé le débat sur les prérogatives du président de la République. En l'absence d'une Cour constitutionnelle, les avis ont divergé. Certains spécialistes du droit constitutionnel ont estimé que le locataire de Carthage était dans son tort alors que d'autres lui ont donné raison affirmant qu'il avait tout à fait le droit de rejeter la prestation de serment des nouveaux ministres. Kamel Ben Messaoud a, lui, rappelé, dans ce sens, que le vide laissé par la Constitution de 2014 au sujet du remaniement ministériel, a été partiellement rattrapé par les articles 142 à 144 du règlement intérieur du Parlement et que, depuis, une tradition s'était instaurée impliquant le vote de confiance à l'Assemblée des représentants du peuple puis la prestation de serment à Carthage afin que les ministres puissent s'acquitter de la mission pour laquelle ils ont été désignés. A lire également Kaïs Saïed peut-il opposer un véto devant les nouveaux ministres ?
« Si Kaïs Saïed disposait d'un pouvoir discrétionnaire, il aurait été face à trois alternatives : rejeter la totalité de la composition, approuver quelques-uns et rejeter certains ou encore approuver l'ensemble des ministres désignés », a expliqué l'expert notant qu'à son sens, le président de la République est plutôt dans un cas de compétence liée et ne dispose d'aucun pouvoir discrétionnaire. « Dans ce cas de figure, il n'a d'autre choix que de fixer un rendez-vous et recevoir les ministres pour la prestation de serment », a-t-il indiqué soulignant qu'au cas où Kaïs Saïed camperait sur sa position, le pays serait confronté à une véritable crise.
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