Le Conseil national des barreaux français, les avocats du Barreau de Paris et la Conférence des bâtonniers ont annoncé avoir saisi le rapporteur spécial des Nations unies sur l'indépendance des juges et des avocats au sujet de l'arrestation du bâtonnier Abderrazek Kilani sur décision du tribunal militaire. Un mandat de dépôt a été émis par le juge d'instruction près le Tribunal militaire a émis, le 2 mars 2022, contre le bâtonnier et ancien ministre Abderrazek Kilani, à la suite de son audition. M. Kilani est accusé de « participer à un groupe qui trouble l'ordre public dans l'intention de s'opposer à l'application de la loi ou pour porter atteinte à un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, en proférant des menaces verbales et en usant de menaces et de bobards pour empêcher un individu ou un groupe de travailler ».
Dans un communiqué émis le 5 mars 2022, les instances représentatives de la profession d'avocat affirment « suivre avec une attention particulière la situation des avocats menacés dans le cadre de leurs fonctions ». « Aussi, l'ensemble du Barreau français exprime aujourd'hui sa vive indignation et inquiétude alors que cette procédure, devant une juridiction militaire, ne respecte pas les garanties devant être assurées aux avocats dans l'exercice légitime de leurs fonctions, et telles qu'elles sont protégées par les normes internationales », peut-on lire dans ce communiqué.
Tout en renouvelant leur soutien à leurs « confrères tunisiens en difficulté », les instances représentatives de la profession d'avocat rappellent qu'en vertu des principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau : * « les pouvoirs publics veillent à ce que les avocats a) puissent s'acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue ; b) puissent voyager et consulter leurs clients librement, dans le pays comme à l'étranger; et c) ne fassent pas l'objet, ni ne soient menacés de poursuites ou de sanctions économiques ou autres pour toutes mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie.» (Principe n°16) * « les avocats ne doivent pas être assimilés à leurs clients ou à la cause de leurs clients du fait de l'exercice de leurs fonctions. » (Principe n°18) * « Les avocats, comme tous les autres citoyens, doivent jouir de la liberté d'expression, de croyance, d'association et de réunion. En particulier, ils ont le droit de prendre part à des discussions publiques portant sur le droit, l'administration de la justice et la promotion et la protection des droits de l'homme et d'adhérer à des organisations locales, nationales ou internationales, ou d'en constituer, et d'assister à leurs réunions sans subir de restrictions professionnelles du fait de leurs actes légitimes ou de leur adhésion à une organisation légitime. Dans l'exercice de ces droits, des avocats doivent avoir une conduite conforme à la loi et aux normes reconnues et à la déontologie de la profession d'avocat. » (Principe n°23) * « Les procédures disciplinaires engagées contre des avocats sont portées devant une instance disciplinaire impartiale constituée par l'ordre des avocats, devant une autorité statutaire indépendante ou devant un tribunal et elles doivent être susceptibles de recours devant un organe judiciaire indépendant. » (Principe n°28)