L'Union générale tunisienne du travail (UGTT) célèbre lundi 1er mai 2023 la fête du Travail. Les festivités ont démarré tôt dans la matinée avec un concert au palais des Congrès de Tunis en présence des membres du Bureau exécutif de l'organisation, de ses cadres et de ses adhérents ; drapeaux, pancartes et baguettes à la main. L'hymne national chanté et celui de l'organisation scandé, le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi, a pris la parole. « Nous n'avons rien à vendre, nous n'avons rien à vendre, nous n'avons rien à vendre ! », a martelé le chef de la Centrale au début de son discours appelant les travailleurs à reprendre la lutte après le petit répit durant le mois de ramadan. Rappelant l'histoire du militantisme syndical à Chicago aux Etats-Unis et le rôle qu'avait joué le mouvement syndical dans l'indépendance de la Tunisie, Noureddine Taboubi a réaffirmé que la répression ne ferait qu'aiguiser davantage la volonté des travailleurs de lutter pour leurs droits. Evoquant l'expulsion de syndicalistes internationaux arrivés en Tunisie pour signifier leur soutien à l'organisation syndicale, Noureddine Taboubi a signalé que l'incident portait atteinte à l'image du pays et à celle des relations sociales qui ont toujours distingué la Tunisie et en ont fait un exemple en termes de droit syndical. « Mes sœurs et frères, militantes et militants de l'UGTT, expulser certains responsables syndicaux internationaux est un incident exceptionnel, une traduction de l'ingratitude et de l'ignorance de l'Histoire, une manifestation de la crise politique que vit le pays ; une crise qui s'est aggravée davantage à cause du déséquilibre entre les pouvoirs, de l'autoritarisme et de (la politique) du fait accompli, et de la négligence des institutions qui se disloquent », a indiqué le chef de la centrale syndicale soulignant le rejet par le pouvoir en place de toute forme de dialogue avec les forces nationales et sociales et les acteurs économiques du pays. « L'absence de dialogue ne fera qu'exacerber la scission dont souffre notre société et élargir le fossé entre la société et l'Etat. Cela ne fera qu'aggraver la crise économique et sociale, accentuer la pauvreté et effriter le pouvoir d'achat des citoyens (…) S'obstiner à ignorer les causes de la crise n'est qu'une forme de fuite en avant qui ne fera qu'affaiblir notre capacité à y faire face et fragiliser notre positon face à nos partenaires économiques et les institutions internationales avec qui nous traitons », a-t-il ajouté saluant, dans ce sens, la position du président de la République refusant les conditions du Fonds monétaire international en contrepartie de son aide financière. Assurant que la position du chef de l'Etat s'aligne totalement avec celle de la centrale syndicale en ce qui concerne les réformes souhaitées par le FMI, Noureddine Taboubi a signalé que les conditions de l'institution financière ne feraient qu'augmenter davantage le taux d'inflation, la flambée des prix, l'exclusion sociale et la pression internationale que subit le pays. Le chef de la centrale syndicale a, dans ce sens, noté la confusion de l'organisation face à la divergence entre la position officielle de la présidence de la République et celle du gouvernement qui négocie depuis un an avec le FMI. « La crise avec le FMI et en dépit de ses répercussions sur notre pays nous apprend beaucoup : l'époque des prophètes infaillibles capables de miracles est révolue (…) Le vrai seul miracle qui peut sauver notre pays et nous sortir de la crise est celui de compter sur nous-mêmes et fédérer nos forces autour d'un projet national capable de répondre aux ambitions de notre peuple », a affirmé Noureddine Taboubi estimant que la souveraineté du pays et l'indépendance de sa décision sont tributaires de la cohésion du front national et de l'unité de son peuple. Rappelant que le peuple tunisien ignore toujours les engagements du gouvernement de Najla Bouden envers le FMI et les répercussions de l'accord négocié dans le secret, le secrétaire général de l'UGTT a ajouté que la gestion de ce dossier était une manifestation de la crise, des erreurs commises par le pouvoir en place et de son incapacité à trouver des solutions. Revenant sur l'initiative de la Centrale syndicale et de ses partenaires – l'Ordre national des avocats, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux –, Noureddine Taboubi a soutenu que l'objectif de cette initiative n'était qu'une tentative de l'organisation de faire valoir son rôle pour sortir le pays de l'ornière et « rassembler les forces nationales autour d'un ensemble de principes en vue d'aboutir à un projet national susceptible de consolider et développer les acquis de la Tunisie en termes de libertés et de démocratie ». Le responsable syndical a, dans ce contexte, cité l'ensemble des réformes et des revendications nécessaires pour répondre aux aspirations du peuple tunisien assurant que la centrale syndicale ne baissera pas les bras et continuera à militer. « Nous espérions que le 25-Juillet soit le point de départ pour concrétiser toutes les réformes (…) mais nous avons été choqués de voir que le pouvoir en place n'a fait que reproduire le même modèle économique avec la même logique d'improvisation pour aboutir aux mêmes résultats. Nous nous sommes encore une fois retrouvés à quémander auprès des bailleurs de fonds et certains pays pour obtenir des prêts qui ne feront qu'aggraver l'endettement et mettre en péril l'indépendance de la décision nationale », a-t-il poursuivi. « Lancer un dialogue est devenu vital pour notre pays et notre peuple. Cela nécessite d'ailleurs la création d'un climat propice à la participation ; une participation qui ne peut se faire que dans le respect des libertés, de la garantie de la liberté de l'expression et de la presse et de l'indépendance de la justice et dans le respect du travail syndical (…) La Tunisie n'a d'autre choix que le dialogue (…) Un dialogue qui préserve la démocratie et garantit le droit de tous à s'exprimer », a scandé Noureddine Taboubi soulignant que la répression des syndicalistes par le pouvoir en place ne réussira pas à dissuader l'organisation de défendre son indépendance et les droits de ses adhérents. « Nous voulons le bien de la Tunisie et de son peuple, nous œuvrons à serrer les rangs, nous avançons des propositions et des visions pour sauver le pays, alors qu'en contrepartie, eux, ne font que nous préparer subrepticement et ostensiblement des procès, fabriquer des dossiers et nous adresser des accusations (…) dans une tentative désespérée de nous museler face aux conditions misérables dans lesquelles vivent les travailleurs et face aux menaces et catastrophes qui guettent le pays (…) Nous ne nous tairons pas ! », a-t-il martelé exigeant la libération des syndicalistes placés en détention.