Les immolations par le feu se sont multipliées depuis le début de l'année 2025. Plusieurs voix se sont élevées pour attirer l'attention du pouvoir en place sur la colère grandissante d'une large frange de la société, tandis que d'autres, notamment parmi les soutiens présidentiels, estiment que ces actes sont loin d'être innocents. En effet, aujourd'hui, un homme âgé de 48 ans s'est immolé par le feu en face de l'un des hôpitaux de la colline de Bab Saadoun. Vingt-quatre heures plus tôt, un jeune homme s'était immolé à Sousse. Un groupe de jeunes a alors protesté, provoquant des troubles devant le poste de police de la cité Riadh, lançant des pierres, des fumigènes et des cocktails Molotov, avant d'être dispersé par les forces de l'ordre. Le 3 février 2025, un citoyen s'est immolé par le feu au deuxième étage du tribunal de Sfax 1. Selon la version officielle des autorités, l'individu souffrait de troubles psychologiques. Toujours au cours de la même semaine, une élève de treize ans s'était immolée le 1er février 2024 dans son collège, situé dans la ville de Sbeitla, dans le gouvernorat de Kasserine. Un autre grave incident s'est produit dans la soirée du vendredi 24 janvier 2025, devant la Grande Synagogue de Tunis, située dans le quartier de Lafayette. Un homme s'est en effet immolé par le feu devant l'édifice religieux. Là encore, la version officielle affirme que l'individu souffrait de troubles psychologiques. La récurrence des ces incidents graves a créé une vive polémique sur la scène nationale. Si plusieurs personnes expriment leurs inquiétudes quant à la montée de la grogne populaire, d'autres parmi les soutiens du président de la République, crient au scandale et préfèrent avancer la théorie du complot. Ils considèrent que ces actes font suite aux condamnations des figures ayant gouverné durant la dernière décennie, soulignant que l'objectif est de semer la zizanie et le trouble et d'attiser les tensions sociales. Une rhétorique reprise par la députée Syrine Mrabet qui affirme que ces immolations font partie d'une conspiration. En réaction à ces multiples sorties complotistes, plusieurs personnalités publiques ont choisi d'ironiser. Le célèbre journaliste Haythem El Mekki a partagé le statut d'une personne qui a analysé, très sérieusement, le phénomène à la manière hollywoodienne. Sarcastique, le journaliste a lancé :« Le complot a été dévoilé… L'opération est compromise… Attention, plus personne ne doit s'immoler sans autorisation préalable du QG à Washington… Cette lettre s'autodétruira dans 25 secondes… ». L'ancien ministre, Mohamed El Hamdi s'est exclamé : « ça dit que l'immolation par le feu d'un citoyen fait partie d'un plan de conspiration… On a tellement de complots qu'on pourrait en recouvrir le globe terrestre… Trouvez-nous où nous réfugier en dehors de la Voie Lactée … ». L'ancien député Mejdi Ben Ghezala a, lui aussi, opté pour l'ironie : « L'incident qui s'est déroulé à la cité Riadh se trouve près de ma maison… Je peux affirmer que les Etats-Unis n'ont rien à voir avec cette affaire … ». Le journaliste Samir Jarray s'est pour sa part indigné qu'on puisse imputer cet acte extrême à un complot : « Cela signifie qu'une personne est allée jusqu'à s'immoler par le feu… Un acte de protestation ultime où l'on sacrifie sa propre vie… Et pourtant, ils tournent cela en dérision, le ridiculisent et le dénigrent, alors même qu'il est mort, brûlé. Leur déchéance morale n'a pas de limites », s'est-il indigné.