Episode 1 - Mezzouna, la République des ruines et des fantômes Trois adolescents morts, ensevelis sous un mur. Et dans la Tunisie de 2025, on commence par arrêter… le directeur du lycée. Logique. Ce pauvre homme, qui avait alerté, signalé, supplié qu'on intervienne, s'est retrouvé en garde à vue comme un vulgaire dealer. Il a passé 48 heures en détention, avant d'être libéré sous la pression de l'opinion publique. Parce qu'évidemment, même la douleur collective a ses limites. On accepte les ruines, pas qu'on y ajoute l'humiliation. Mais la suite est encore plus croustillante. Le président Kaïs Saïed, dans son style toujours très… lunaire, décide de se rendre à Mezzouna. Pas lundi, jour du drame. Pas mardi, ni mercredi. Non, jeudi à l'aube. Quand la ville est vide, les regards endormis et les caméras absentes. Pourquoi la nuit ? Peur de croiser des slogans hostiles ? Peur de la lumière, peut-être ? Il a rencontré des habitants, parlé d'hôpital et de voiture de secours comme on distribue des bonbons pour calmer un enfant qui pleure. Il a même lancé, l'œil larmoyant : « Je souffre avec vous… » Merci président, mais c'est de murs solides qu'ils ont besoin, pas de poésie. Et puis, rien sur la page de la présidence. Silence radio. Peut-être pour ne pas réveiller ceux qui dormaient encore à Tunis pendant que Mezzouna pleurait. Dans cette République, on ne gouverne plus. On improvise, on détourne, on fuit le jour. Et parfois, on revient de nuit — comme les fantômes.
Episode 2 - Boeing, TikTok et le grand retournement chinois Les Chinois ont dit « non merci » à Boeing cette semaine. Pas une panne, pas un crash. Juste un petit bras d'honneur diplomatique bien emballé dans une note technique : "Ne réceptionnez plus les 737 MAX". Officiellement, c'est une précaution. Officieusement, c'est une claque. Une de plus dans la série "Guerre commerciale Sino-Américaine — saison 12". Pendant que Washington multiplie les sanctions, Pékin sort les armes douces : influence, boycott, et... TikTok. Ah, TikTok. Ce réseau que les Américains veulent interdire est devenu la vitrine de la vengeance chinoise. Cette semaine, des centaines de vidéos ont fleuri : des ouvriers montrant des sacs de luxe à vingt dollars revendus deux mille en Europe ; des chaussures en plastique repeintes vendues comme du cuir italien. Louis Vuitton, Hermès, Gucci... tous passés à la moulinette numérique. Le message est clair : "Regardez comment vous vous faites avoir". Et pendant que les sacs à quinze euros envahissent les écrans, les Boeing restent cloués au sol. On croyait que la Chine faisait dans la contrebande. Elle fait maintenant dans le contre-discours. Fini le temps des copies, bienvenue dans l'ère du contenu viral géopolitique. Soft-power version Shanghai. Et pendant ce temps-là, les Occidentaux s'offusquent, publient des communiqués, et… continuent d'acheter chinois. À ce rythme, le monde ne sera pas bipolaire. Il sera schizophrène.
Episode 3 - À Shenzhen, les taxis volent. À Tunis, les idées s'écrasent. Cette semaine, la ville de Shenzhen, en Chine, est devenue la première au monde à lancer officiellement un service commercial de taxis volants sans pilote. Le projet est opéré par la société chinoise EHang, pionnière mondiale dans le domaine des véhicules aériens autonomes. Le modèle utilisé, l'EHang 216-S, est un drone électrique biplace, totalement autonome, sans conducteur humain à bord, et supervisé à distance depuis un centre de contrôle. Le vol inaugural, autorisé par les autorités de l'aviation civile chinoise, a transporté deux passagers à travers la ville en toute sécurité. Il ne s'agit plus de tests, ni de démonstrations lors de salons internationaux, mais bien d'un service public opérationnel, intégré à la stratégie urbaine de Shenzhen pour désengorger la circulation au sol et faire entrer la ville dans l'ère de la mobilité verticale. Pendant que la Chine fait voler ses citoyens, la Tunisie, elle, fait voler… des PV. Car pendant que Shenzhen décollait, Tunis continuait de traquer les chauffeurs de Bolt, cette application jugée manifestement trop moderne pour notre écosystème institutionnel. Oui, Bolt, cette application qui permet à un citoyen de commander une voiture sans supplier un taxi de daigner travailler le soir. Jugée subversive, perturbatrice, voire révolutionnaire (au mauvais sens du terme), elle a été bannie par l'Etat tunisien, au nom de l'ordre public et de la paix des taxis. Là où Shenzhen voit un ciel à conquérir, nous voyons une menace à neutraliser. Là-bas, on parle de transport intelligent. Ici, on brandit des circulaires datées et on protège les monopoles à coups de matraques réglementaires. À Shenzhen, on parle de mobilité urbaine aérienne. À Tunis, on parle de répression numérique. À Shenzhen, le ciel s'ouvre. À Tunis, les clôtures tombent sur les élèves, les trottoirs sont défoncés, les routes saturées et les taxis introuvables. La Chine se projette dans 2050. Nous, on ressasse les années 80. À ce rythme, dans cinquante ans, on découvrira peut-être l'hoverboard. À condition que le syndicat des taxis y consente.