Quand on suit le discours de la gauche française ou encore certains journaux, l'impression qui se dégage de la France est celle d'un pays qui ferme totalement ses frontières, qui expulse pêle-mêle ses immigrés, sans respect aucun des droits de ces hommes. Dans le concret (et documents à l'appui), la politique de Sarkozy est basée sur une gestion concertée des migrations avec les pays concernés pour que ces émigrés trouvent une terre d'accueil en toute dignité lorsqu'ils seront en France. L'accord signé la semaine dernière, entre MM. Abdelwaheb Abdallah et Brice Hortefeux, lors de la visite d'Etat du Président Sarkozy le prouve : désormais la France accordera pas moins de 9.000 visas aux travailleurs tunisiens et énormément de facilités à nos étudiants, à nos compétences et talents et personnes désireuses d'émigrer en France. L'ensemble de ces nouvelles dispositions ont été expliquées hier, mercredi 7 mai 2008 par M. Serge Degallaix, ambassadeur de France à Tunis. Le 28 avril dernier, en présence des Présidents Zine El Abidine Ben Ali et Nicolas Sarkozy, le ministre des Affaires étrangères, M. Abdelwaheb Abdallah, et le ministre français de l'Immigration, M. Brice Hortefeux, ont signé un accord-cadre sur la gestion concertée de la migration et du développement solidaire entre la Tunisie et la France et des deux protocoles additionnels à cet accord-cadre. L'accord énonce les principes de base de la coopération tuniso-française dans ce domaine social, en concrétisation de l'approche globale adoptée par la Tunisie pour régler la question de l'émigration et réaliser un équilibre entre la libre circulation des personnes et la lutte contre la migration illégale d'une part, et le co-développement, d'autre part. Cet accord, dans ses détails et son impact concret sur la population, a été expliqué hier dans une atelier de presse organisée à la chancellerie par l'ambassadeur de France à Tunis, M. Serge Degallaix. Désormais, 9.000 Tunisiens, âgés entre 18 et 35 ans pourront partir travailler en France, en toute légalité. La France ouvre ainsi les portes de son marché de l'emploi, sous des formes administratives multiples, aux Tunisiens. « Les jeunes Tunisiens seront considérés comme des travailleurs français, dès lors qu'il y a un contrat de travail avec une entreprise française, en bonne et due forme », expliquera l'ambassadeur. L'annonce est de taille et ne manquera pas de faire le bonheur de milliers de jeunes désireux de partir travailler en France. Néanmoins, la France ne serait en aucun cas, un eldorado, pour tous les demandeurs qui n'ont pas su trouver d'emploi, loin s'en faut. C'est une migration organisée, certes, mais elle est aussi concertée entre les deux pays. En d'autres termes, on prend en considération les intérêts des deux pays et des conditions particulières préétablies à l'avance, en commun accord entre les deux parties, sont exigées pour l'acceptation des dossiers. Après des négociations « bien menées » par la Tunisie, au regard de l'ambassadeur, la Tunisie bénéficiera d'un statut unique, qui ne bénéficie qu'aux seuls pays membres de l'Union Européenne. « La nouveauté de l'accord de gestion concertée et de développement solidaire, est de nature à favoriser davantage la circulation des personnes. Concrètement, cela se traduit par l'octroi de plus de visas d'une durée limitée et à entrées multiples (le 1/3 des visas de circulation délivrées en Tunisie), ainsi que par la mise en place de nouvelles dispositions d'octroi de visa de court séjour, qui seraient systématiques, devait indiquer M. Degallaix. Aussi, l'opposabilité de la situation du marché de l'emploi français n'est-elle plus d'actualité pour les Tunisiens. Avant la signature de cet accord, les Tunisiens qui ont obtenu leur diplôme en France et qui réussissaient à trouver un emploi dans une entreprise française risquaient d'être confrontés à une restriction : l'opposabilité de la situation du marché de l'emploi français. Le candidat tunisien ne pouvait décrocher l'emploi que s'il n'y a pas de Français pouvant occuper ce poste. Ce ne sera plus désormais le cas. Ceux qui sont diplômés en France bénéficieront, en plus, d'un délai de 12 mois, au lieu de six, auparavant, pour trouver un emploi. Pour les Tunisiens résidents en Tunisie et qui désirent partir travailler en France, l'Héxagone leur ouvre désormais les portes dès lors qu'ils répondent à certains critères, largement simplifiées en parfaite concertation avec les autorités tunisiennes. Les formules juridiques de ce départ sont multiples pour permettre aux diplômés du supérieur et aux jeunes professionnels (18/35 ans), de partir travailler en France et vice versa, aux Français de venir travailler en Tunisie. « L'accord est venu améliorer ce qui existait déjà sur deux points essentiels, expliquera M. Degallaix : d'abord, porter le contingent des jeunes professionnels qui souhaitent partir et qui remplissent les conditions de 100 à 1500 personnes an. Ensuite, allonger la durée autorisée pour le séjour de travail en France, de 18 à 24 mois ». Il y a d'abord, « la Carte Compétences & Talents », opérationnelle déjà, depuis l'année dernière, entre la France et la Tunisie, un des premier pays à en bénéficier. Celle-ci est accordée à des jeunes Tunisiens dont la compétence professionnelle est reconnue, soit parce qu'ils ont un contrat de travail en France ou parce que leur compétence leur garantit de fortes chances d'en trouver, dans des secteurs définis par les deux parties. La carte est délivrée pour une période de trois ans renouvelables une fois, soit six ans en tout, mais avec un esprit bien précis. En effet, la France offre la possibilité de travail au candidat avec obligation de concourir au développement de la Tunisie, à travers son retour dans le pays et le développement d'un projet professionnel. Quant aux conditions d'éligibilité, l'instruction du dossier et autres formalités, ils relèvent de la compétence de l'Agence Française de l'accueil des étrangers et des migrations (ANEAM), qui aura à délivrer 1500 cartes Compétences & Talents, par an. Outre cette formule, il y a également les « cartes salariés en mission ». Ceux-ci passeront une durée déterminée en France, suite à une demande d'entreprise française, qui les fait venir de Tunisie. Là, aussi, il y a certaines conditions. « La carte de séjour « salariés en mission », répondra aux attentes du monde économique qui souhaite que l'introduction de salariés étrangers au sein d'un même groupe soit traitée de façon adaptée », explique M.Yves BRUNNER, directeur de l'ANEAM, en Tunisie. La carte est d'une durée de trois ans renouvelables pour des employés d'une même entreprise, ou entre entreprises d'un même groupe et dans des métiers bien définis par les deux parties. La liste comprend 80 métiers normalisés, avec éventualité de révision, et que les intéressés peuvent trouver sur le site Web de l'Ambassade de France en Tunisie. L'indicateur fixé par les deux pays, pour cette catégorie « salarié en mission », est de 3.500 personnes, en 2008, contre 240, en 2007. Enfin, la dernière catégorie concernée par les nouvelles mesures est celle des saisonniers. Ceux-ci sont concernés par deux nouveautés : ils bénéficient dorénavant d'une carte de travail pluriannuelle renouvelable. Le chiffre annoncé pour cette catégorie est de 2.500 Tunisiens pour 2008, contre 658 en 2007. En tout, la France ouvre les portes de son marché de l'emploi pour environ 9.000 Tunisiens qui pourront désormais partir travailler en France en toute légalité et dans des secteurs et des métiers que le marché tunisien ne peut pas, ou a du mal à absorber. Ce chiffre fixé (9000) n'est donné qu'à titre indicatif, souligne l'ambassadeur, et témoigne plutôt de l'esprit d'ouverture de la France sur la Tunisie et sa volonté d'embaucher les Tunisiens, a-t-il conclu.