L'assemblée générale de la Société frigorifique et brasserie de Tunis (SFBT) s'est tenue jeudi 4 juin 2009 à l'Institut arabe des chefs d'entreprises sous la présidence du PDG du groupe Mohamed Bousbia. En dépit des chiffres, l'assemblée s'est déroulée dans une ambiance bon enfant, grâce au sens humoristique du PDG et au flux d'informations qui s'y sont dégagées. Lorsqu'il a quitté, voilà quelques années, la Banque Centrale de Tunisie pour la société frigorifique et brasserie de Tunisie, plusieurs ont déclaré que Mohamed Bousbia avait été mis au frigo. Des années après, celui qu'on dit avoir mis au frigo se dresse solennellement devant ses actionnaires pour leur dire : «Ce qu'il me reste à passer à la tête de la SFBT est inférieur à celui que j'ai déjà passé. Et je peux vous dire que je suis fier de mon bilan. Je souhaite que toute personne mise au frigo soit frigorifiée comme je le suis. » Mohamed Bousbia(ou Hammadi comme on aime l'appeler en Tunisie), a des raisons pour exprimer ainsi et solennellement sa fierté. Depuis longtemps, on essayait de lui faire admettre que sa position confortable est obtenue grâce au monopole et la position dominante qu'il détient sur le secteur de la bière et des boissons gazeuses. Maintenant que la concurrence est là, la SFBT est confrontée au vrai jeu du marché et ses exigences en termes de qualité et de prix. « Avant, on était déjà optimistes. Maintenant avec la concurrence, nous le sommes encore davantage. Même les clients qui sont partis ailleurs sont revenus nous voir », continue le PDG de la SFBT avant de poursuivre dans son élan d'optimisme et d'autosatisfaction en soulignant que le bateau de la SFBT est insubmersible et que le seul point noir du groupe réside dans sa filière lait. Les chiffres de la SFBT, les voici : Les ventes de bière ont augmenté en 2008 (en dépit de la concurrence) de 6,82% par rapport à 2007 en passant à 117 millions de litres. Un chiffre appelé à augmenter avec le lancement de la marque allemande Beck's, depuis novembre dernier. Les ventes de boissons gazeuses et jus ont pour leur part augmenté de 4,05%, alors que celui des eaux (Safia, Garci, Marwa, Jektiss et Cristaline) a connu une progression de 27,1%. Seul le marché du lait (Beldi) a connu une diminution dans le groupe avec un écart négatif de 23,5%. Le marché du lait a été caractérisé par une abondance de l'offre, mais celle-ci n'a profité qu'aux marques leaders. Ces réalisations ont permis au groupe de dégager un résultat net de près de 49 millions de dinars en hausse de 10,17% pour un chiffre d'affaires de 159,358 millions de dinars. Le dividende par action sera de 600 millimes. Les résultats ne semblent cependant pas satisfaire les actionnaires, convaincus que leur société aurait pu faire nettement mieux. M. Bousbia ne va pas par quatre chemins et met en exergue les fortes taxes payées sur les boissons gazeuses : 47,5% ! Selon lui, l'activité est en train de péricliter et bien que la consommation de boissons gazeuses soit des plus populaires en Tunisie, on continue encore à payer de lourdes taxes. Le PDG de la SFBT a déjà alerté les pouvoirs publics, mais il semble qu'il n'y ait pas de réponse : « Notre matériel est en train de vieillir et nous ne sommes pas du tout encouragés à investir, bien que cet investissement soit important pour les régions et les emplois. Dans la situation actuelle, l'Etat et nous sommes tous les deux perdants ». Plus tard, en fin de séance, il ira même jusqu'à faire remarquer que l'on paie moins de taxe sur son téléphone que sur sa boisson gazeuse. « La concurrence du dinar light du GSM n'a plus laissé de place aux boissons gazeuses ! Eux, ils ne paient pas beaucoup de taxes, mais nous on nous saigne ! ». Autre argument brandi par Hammadi Bousbia, l'aspect social. Il indique que la SFBT ne doit pas être considérée uniquement pour ses bénéfices et dividendes, rappelant que le groupe vient d'être honoré par le Président de la République pour sa politique sociale. « Je vous rappelle que la SFBT était le groupe où les grèves commençaient en Tunisie. L'UGTT, par le passé, entamait ses grèves à Bab Saâdoun », indique le PDG mettant en exergue l'excellent climat social qui prévaut actuellement dans son entreprise. Mieux encore, il indique que certains cadres ont des rendements de 120%, alors que si l'on avait seulement 80%, on serait satisfait. Interrogé sur le marché de la bière et sur les raisons de l'absence des bouteilles consignables dans les hypermarchés et certaines grandes surfaces, considérés comme les plus grands revendeurs, le PDG corrige : « notre plus grand client, ce ne sont pas les supermarchés, mais les clandestins ! Que Dieu nous préserve les clandestins ! ». Pour ce qui est des ventes de bière, M. Bousbia affirme qu'il est lui-même surpris par leur augmentation. Mieux encore, il précise qu'il a l'impression que le Tunisien ne regarde pas dans les dépenses et s'oriente plutôt vers les canettes. Le PDG indique dans la foulée qu'il envisage d'investir en Italie pour y vendre de la bière, mais aussi en Libye ! En Lybie, on adore la Celtia et c'est pour cela que la SFBT a créé la Celtia sans alcool qui s'y vend très, très bien. La Libye désire, par ailleurs, devenir une sorte de Dubaï et il y a espoir que le commerce d'alcool y soit autorisé. Si c'est le cas, la SFBT prévoit d'y faire d'excellentes affaires. 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