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Les sept péchés de la gouvernance selon Karim Ben Kahla
Publié dans Business News le 21 - 12 - 2010

Karim Ben Kahla, directeur de l'Institut Supérieur de Comptabilité et d'Administration des Entreprises (ISCAE) pointe du doigt les travers de la gouvernance locale. Après la première attaque de Mohamed Ghannouchi qui a brossé un portrait sans concessions et sans complaisance de l'entreprise tunisienne, le jeune directeur de l'ISCAE porte l'estocade lors de cette inoubliable dernière édition des Journées de l'Entreprise.
A voir les mines hagardes des présents, une charge d'une telle « violence » était loin d'être attendue ou commune dans le sanctuaire de nos capitaines d'industries.
S'agit-il d'une réelle volonté de procéder à une autocritique de l'entreprise tunisienne ? Qu'importe, cette intervention sous forme de mercuriale nous gratifia d'un des meilleurs moments de ces Journées : les sept péchés capitaux de la gouvernance.
Quand Karim Ben Kahla se met devant son pupitre, on lui trouve, de prime abord, un petit air collet-monté. L'orateur est manifestement plus habitué aux amphithéâtres des universités qu'aux rencontres de professionnels. Mais il lui suffit de dépasser la première présentation sommaire et théorique de sa conception de la gouvernance et d'étaler ses premiers arguments, ses premières piques, pour accrocher l'attention (accompagnée d'un certain malaise) de la salle.
Premier constat, premier péché : des marchés grippés. L'interconnexion entre entreprises ou entre l'entreprise et son environnement est anecdotique. Marchés de l'information, des techniques d'audit ou des managers peinent à décoller. Résultat, des entreprises taillées à la hache, avec un mode de gouvernance rudimentaire.
Péché n°2: les actionnaires, surtout les plus petits, sont les laissés pour compte de la gouvernance made in Tunisia, puisque le contrôle et la propriété vont toujours de pair. Un problème sans doute anthropologique, des entreprises à l'image de la société patriarcale. Hantise suprême de nos entrepreneurs : « s'associer » et voir leur pouvoir se diluer et les capitaux s'émietter.
Trois : les conseils d'administration ressemblent plus à des fraternités maçonniques ou au select Rotary Club qu'à un QG avancé pour définir les orientations stratégiques d'une entreprise. Le statut de l'administrateur, actuellement, se rapporte plus à l'ectoplasme qu'à l'administrateur professionnel dont les prérogatives, mais également les charges, sont fixées d'avance.
Quatrième péché, et le plus gratiné : le dirigeant tunisien est un « tyran éclairé ». A l'image de Louis XIV, le roi Soleil, « il éclaire, irradie… et brûle ». Le patriarcat, encore et toujours, le système féodal a toujours de beaux jours devant lui. Omniscient, omnipotent, le dirigeant tunisien s'arroge un droit symbolique de vie et de mort sur son entreprise. Les contre-pouvoirs et les mécanismes de régulation, ce n'est pas pour aujourd'hui. Les conseillers ou plutôt les courtisans sont obsédés par la défense de leurs petits intérêts.
Cinquième travers : transparence et entreprise tunisienne, ça fait deux ! « Un brouillard ou un brouillage » entoure les activités de nos entreprises. M. Ben Kahla n'essaye même pas d'atténuer sa constatation, ou plutôt son accusation : une opacité manifeste et récurrente, terreau fertile des délits d'initié. La rumeur se mue en information. Pire que cela, aucune communication n'en émane. Pour résumer, une entreprise amputée, totalement coupée de son environnement : actionnaires, fournisseurs, clientèle, autorités…
Sixième péché : des œillères qui empêchent l'entreprise de se projeter sur le long terme. Les banques et le fisc sont les priorités quasi-exclusives, toutes les autres parties liées passent après, voire sont carrément négligées.
Le septième péché, et le plus fatal : la transmission. Ou plutôt la succession. Société patriarcale oblige, nous y revoilà. L'économie tunisienne regorge d'exemples de fondateurs de groupes qui sabordent leurs entreprises en négligeant la transmission. Ainsi, l'exemple d'Abdelwaheb Ben Ayed, qui a écarté ses enfants de la direction du holding Poulina Ben Ayed, est un cas unique dans le paysage local.
Constat implacable, diagnostic impitoyable, mais le professeur Ben Kahla ne se contente pas de critiquer sévèrement. Il propose. Trois défis devront être relevés, selon lui, pour inverser la situation et réussir le pari de la gouvernance efficace.
En premier lieu : se doter des pré-requis techniques de la gouvernance. L'époque où les dirigeants naviguaient à vue est bel et bien révolue. Des outils et des procédures rôdées existent, désormais, pour rationnaliser et optimiser les décisions des managers et valoriser les richesses matérielles et immatérielles de l'entreprise : systèmes de reporting, de contrôle, d'évaluation, comités d'entreprise, etc.…
Deuxième défi, ou peut-être deuxième gageure : rénover la culture de l'entreprise, mais également la culture de la stratégie et celle du contrôle. Et cela nécessitera de dépasser impérativement des comportements fortement ancrés dans l'homo-economicus local. Bannir le paternalisme, ne plus confondre les patrimoines et les cycles des valeurs de l'entreprise, dépasser le comportement rentier, le fatalisme, le mimétisme, oser agir sur l'environnement, favoriser la créativité et l'innovation pour créer de la valeur, défendre la méritocratie, sortir de l'hégémonie du collectif : un programme digne des travaux d'Hercule.
Troisième défi, défi vital et urgent : produire de la confiance. Et au conférencier de le crier haut et fort : la gouvernance n'est pas une fin en soi ! Le coût de la gouvernance ne devient rentable qu'avec un arrière-fond de confiance. Et de rajouter : trop de gouvernance tue la gouvernance. Méfiance et conformisme excessifs tuent l'entreprise. En résumé, une entreprise qui prospère est une entreprise qui prend en compte les interactions entre la forme et le fond, le formel et l'informel, et surtout la gouvernance et la confiance.
Vaste projet, vaste chantier. Peut être une révolution culturelle en perspective. Redéfinir les modes de gouvernance, instaurer la confiance : un projet de société, clame Karim Ben Kahla. La confiance est une construction sociale exigeant un processus de longue haleine. M. Ben Kahla résume sa pensée : promouvoir une éthique et un éthos de la bonne gouvernance pour remplacer la réplique sartrienne : « L'enfer c'est les autres » par : « Mon intérêt c'est les autres ».
Réponse cocasse d'un chef d'entreprise dans l'auditoire (celui d'El Khoutaf) : « un patron a besoin d'être un dictateur » !
Contrairement à beaucoup de ses pairs, Karim Ben Kahla a su accrocher l'attention, sensibiliser les managers et ne pas se mettre dans la peau classique du théoricien-donneur de leçons. Avec lui, on est dans le réel et l'applicable. On en redemande ! Radhouane Somai


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