Tout comme certains de mes collègues, j'ai été très critique quant à la manière dont a été présenté aux médias le projet final de la Constitution par le président de l'Assemblée nationale constituante. Deux raisons à cela : la présentation aux médias avant de remettre la copie aux députés et la définition exagérée du texte comme étant "la meilleure constitution du monde." La meilleure du monde, peut être pas, mais de la Tunisie assurément! Cela dépendra des choix des Tunisiens lors des prochaines élections et de la pratique des prochaines assemblées d'élus. Je ne peux également cacher mon désappointement vis-à-vis de la commission de coordination et de rédaction qui a outrepassé ses prérogatives et a procédé à des modifications touchant le sens du texte. Le plus choquant concerne la nature du régime qui est subitement devenu parlementaire avec un président élu au suffrage universel sans prérogatives importantes. Cette modification trahit le consensus obtenu il y a quelques mois, mais il n'est pas trop tard pour revenir à l'idée d'origine puisque ce sujet est discuté actuellement durant la table ronde à Carthage. Nous avons aujourd'hui une constitution qui: -équilibre notre identité avec un état civil (article 1 et 2) -garantit l'universalité des droits de l'Homme -défend l'égalité entre hommes et femmes -sépare les pouvoirs: une justice, des médias, une instance électorale, tous indépendants! Mes deux seuls regrets concernent l'absence d'égalité entre les Tunisiens de différentes confessions ainsi que la liberté de conscience. Nous veillerons cependant à continuellement rappeler que ce n'est pas la foi qui fait le citoyen et nous continuerons le débat en plénière lors du vote article par article. Aujourd'hui, après avoir obtenu le consensus sur des élections avant la fin de l'année, il reste un point pour atteindre le consensus total: les attributions du président! Prérogatives clairement définies sans lesquelles un blocage de tous les partis de l'Assemblée, à part Ennahdha, pourrait se profiler. Même si nous ne voulons plus d'un président trop puissant, avec par exemple le droit de dissoudre l'assemblée, nous craignons, a contrario, un parlement verrouillé par un parti incontournable, pour constituer un gouvernement, parce qu'étant le plus important, bien que n'étant pas majoritaire. C'est pour cette raison que nous voulons élargir les droits du président afin d'inclure à ses attributions la sécurité intérieure, au même titre qu'il dirige la défense et les affaires étrangères, ainsi que sa participation et sa validation aux nominations des hauts responsables de l'administration. Ce qui importe pour évaluer la qualité de la constitution, c'est de savoir si les articles protègent les droits des Tunisiens? Oui! Est-ce qu'elle garantit les valeurs de la Tunisie? Oui! * Député du Groupe Démocratique, au sein de l'Assemblée Nationale Constituante