Les délibérations de l'ANC, le boycott de certains élus pour ses travaux, les projets de lois à adopter, les accusations de corruption, en voilà des sujets qui intéressent l'opinion publique ces derniers jours et qui concernent les travaux de la Constituante. Sauf que la présidence de l'ANC, contre toute attente, a choisi ce moment précis pour nous sortir en date du 18 novembre 2013 un communiqué, présenté par Mofdi Mseddi chargé de la communication au bureau de l'ANC, pour préciser les montants des indemnités attribuées aux membres de l'ANC, à son président, à ses vice-présidents. Ces précisions auraient été utiles si elles étaient exactes, mais quand il s'avère qu'elles manquent d'exactitude, plus d'une question se pose. Pourquoi induire en erreur l'opinion publique, alors qu'on sait que ces salaires sont publiés noir sur blanc dans le journal officiel (JORT)? Pourquoi essaie-t-on de minimiser ces rémunérations? Et quelle mouche a piqué la présidence de la Constituante pour évoquer le dossier des rémunérations en ce timing? Tout d'abord, les montants cités par l'ANC ont été présentés selon leur valeur nette, or quand on parle d'indemnités, il est comptablement plus adéquat de mentionner les montants à leur valeur brute. Et puis, selon les déclarations de Mofdi Mseddi, les indemnités du président de l'ANC, Mustapha Ben Jaâfar, s'élèvent à un montant net de 4.881 dinars. Or, si l'on calculait la somme des indemnités perçues par le président, selon l'Arrêté de l'ANC du 15 août 2012 publié au JORT n°72 du 11 septembre 2012 (page 2084), elle s'élèverait à 5.316 dinars, déduction faite des impôts et taxes dus. Par ailleurs, ce dernier a mentionné que les deux vice-présidents de la Constituante, à savoir Meherzia Laâbidi et Arbi Abid, touchent 2.725 dinars par mois, chacun, tout en précisant que les honoraires de Mme Laâbidi, ainsi que les autres élus sur les circonscriptions électorales à l'étranger sont attribués en monnaie locale soit le dinar. Cette information, après vérification et comparaison avec les textes légaux, s'avère triplement fausse. D'abord, les deux vice-présidents ne perçoivent pas le même salaire puisque celui issu des listes électorale à l'étranger, en l'occurrence, Mme Laâbidi, touche des indemnités différentes de celles du vice-président résident sur le territoire. En effet, si on calcule ses indemnités conformément à "l'Arrêté de l'ANC du 21 juillet 2012, portant attribution des indemnités au vice-président de l'ANC représentant les circonscriptions électorales à l'étranger", lequel arrêté est publié dans le JORT n°61 du 3 août 2012 (page 1773), Mme Laâbidi toucherait 7.528 dinars par mois net d'impôts, dont une partie payée en devises. Ensuite, "le vice-président élu représentant les circonscriptions électorales à l'étranger" perçoit son indemnité spécifique, qui représente la majeure partie de son salaire, "convertie en devises étrangères suivant la réglementation en vigueur", selon la même publication au JORT. Enfin, le montant de 2.725 dinars cité par la présidence de l'ANC est erroné, puisque si l'on calculait la somme des indemnités mensuelles, minorée des impositions, pour le vice-président de l'ANC résidant sur le territoire de la République, elle serait de 3.875 dinars, et ce conformément à l'Arrêté de l'ANC du 21 juillet 2012, publié dans le JORT n°61 du 3 août 2012 (page 1773). En ce qui concerne le reste des élus, il y a eu également inexactitude dans l'information, puisque les rémunérations mensuelles des membres de l'ANC, diffèrent et sont réparties en deux catégories, ceux représentant les circonscriptions électorales sur le territoire de la République et ceux représentant les circonscriptions électorales à l'étranger. Ainsi, la rémunération de ces derniers, calculée sur la base de l'Arrêté de l'ANC du 21 juillet 2012, publié dans le JORT n°61 du 3 août 2012 (page 1774), s'élève à 6.793 dinars par mois, dont sa majeure partie soit "l'indemnité spécifique est convertie en devises étrangères suivant la réglementation en vigueur". Enfin, les autres élus, issus des circonscriptions locales, touchent selon le calcul fait à partir des données du JORT, un montant mensuel net de 3.495 dinars. Ce montant a d'ailleurs été confirmé par la publication de l'élu Mehdi Ben Gharbia de son bulletin de paie du mois de septembre 2012, en le mettant en ligne en octobre de la même année : Il s'avère donc que le montant de 2.340 dinars présenté par M. Mseddi est également bien en dessous de la rémunération de cette catégorie d'élu à l'ANC. Il est à signaler, par ailleurs que le chargé de la communication à l'ANC a également précisé que "l'Assemblée nationale constituante continuera ses activités après rédaction de la Constitution et ce, afin d'exercer son pouvoir législatif, de finaliser les lois fondamentales, dont notamment, la loi électorale et celle de la justice transitionnelle, mais aussi de superviser le travail du gouvernement jusqu'à ce qu'un nouveau parlement soit élu". On s'attend alors à ce que les rémunérations des élus, continuent à être attribuées, et ce jusqu'à ce que la passation ait lieu, donc jusqu'à une date non encore connue et qui ne semble pas proche, vu les différents blocages et ralentissements des travaux de l'ANC. Dorra Megdiche Meziou Cliquer ici pour télécharger les textes cités du JORT