L'économiste Moez Joudi a estimé ce lundi que la décision de limoger Habib Mekki, président du conseil d'administration de Tunisair, ne répond pas aux véritables enjeux de la crise que traverse la compagnie nationale. Selon lui, les problèmes structurels de Tunisair sont liés à sa gestion quotidienne, et non à la fonction exercée par le président du conseil. « Habib Mekki n'était pas président-directeur général, mais président du conseil d'administration. Il ne relève pas de ses attributions de gérer les opérations au jour le jour », a précisé Joudi dans une déclaration accordée à Express Fm. Il a ajouté que les retards de vols et les dysfonctionnements observés sont le résultat d'une accumulation de mauvaises décisions et d'un manque de vision stratégique. Qualifiant la situation actuelle de « tragédie », Moez Joudi a dénoncé une gouvernance défaillante et une confusion persistante sur le rôle de l'Etat dans les entreprises publiques. « L'Etat ne peut plus gérer des entreprises économiques opérant dans des secteurs concurrentiels comme il le fait actuellement. Ce n'est pas son rôle », a-t-il affirmé. Il a également mis en garde contre la nomination de profils purement administratifs à la tête d'entreprises techniques comme Tunisair. « Un administrateur ne peut réussir dans un environnement aussi complexe. Ces entreprises exigent des compétences spécifiques et une réelle expérience du secteur », a-t-il souligné. Selon lui, Tunisair n'a pas actualisé ses états financiers depuis 2020, ce qui constitue une grave entorse aux règles de transparence. Il a aussi rappelé que la compagnie a subi d'importantes pertes durant la crise sanitaire, et qu'elle se trouve aujourd'hui dans une situation financière « catastrophique ». Face à cette impasse, Moez Joudi propose deux pistes : faire entrer un partenaire stratégique pour apporter capital et expertise, ou déclarer la faillite et créer une nouvelle compagnie sur les cendres de l'actuelle, comme cela a été fait dans des pays comme l'Italie, la Suisse, la Belgique ou Malte. « Ce type de restructuration est courant et peut représenter une voie de sortie à condition d'être soutenu par une stratégie claire et du courage politique », a-t-il conclu.