Radio Tunis Chaîne internationale (RTCI) a bercé l'enfance et l'adolescence d'une bonne partie des jeunes adultes tunisiens. Nationalisée en 1960, RTCI fait partie des chaînes tunisiennes historiques. Toutefois, l'avènement des radios privées et de la concurrence a acculé RTCI à faire certains choix, même s'ils sont tardifs. Tributaire d'un budget étatique, RTCI ne pouvait se contenter d'une audience quasi nulle… C'est sous la houlette de la nouvelle présidente de la chaîne, Monia Dhouib, que le changement arrive. Ce renouvellement s'articule autour de deux principaux axes : l'assainissement de la situation financière de la radio et le rajeunissement de l'équipe de présentation. En prenant les commandes de la radio, Mme Dhouib a trouvé que la station consommait près du double du budget qui lui était alloué par les autorités, étant ainsi en situation déficitaire chronique. Ainsi, un audit interne a été commandé pour comprendre les raisons d'un tel décalage budgétaire. L'un des principaux résultats de cet audit est que les grilles salariales appliquées jusqu'alors n'étaient pas conformes aux dispositions légales en vigueur. C'est pour cela que les salaires, ou plutôt les rémunérations des collaborateurs externes –qui sont légion dans la radio- ont été recalculées selon les décrets pratiqués par le premier ministère. Cette nouvelle grille a vu certains salaires réduits pour juguler le déficit, conformément à la loi. Evidemment, ce n'est pas le type de mesures populaires au sein des équipes que de procéder à des réductions des salaires. Un certain malaise a traversé la station et il s'est traduit par une vague d'attaques médiatiques contre la présidente, franchement nommée, de RTCI. Le deuxième axe du renouvellement de la chaîne est son rajeunissement. En grande majorité, ce sont des cinquantenaires et des sexagénaires qui sont aux commandes de la chaîne depuis des décennies. Ils ont contribué à construire la chaîne à ses débuts et certaines de leurs voix nous restent familières jusqu'à aujourd'hui. Toutefois, la concurrence des radios privées a montré leurs limites et RTCI est passée de la chaîne la plus écoutée à une chaîne qui n'existe même pas dans les classements Sigma ou Mediascan. Sans pour autant tenter d'évincer les monuments de RTCI, la présidente a entamé un chantier visant à introduire plus de jeunes dans la radio et leur permettre de côtoyer leurs ainés dans le métier pour, à terme, prendre le flambeau. Ceci s'est traduit par la venue sur les ondes de RTCI d'animateurs comme Kerim Bouzouita. Cette seconde mesure phare a également rencontré la résistance des caciques de la chaîne. En effet, certains d'entre eux ont montré une certaine réticence à la concurrence, ou plutôt l'émulation, que peuvent apporter ces jeunes. Certains de ces derniers ont même été reçus de manière pour le moins glaciale. Dans un pays qui a vécu une révolution des jeunes, il est étonnant de voir que certains de ceux qui occupent des postes depuis des décennies refusent de leur donner une chance. De l'avis de certains observateurs, la survie même de RTCI risque d'être menacée par l'attitude d'exclusion de certains animateurs vedettes de la chaîne. Il est à rappeler que plusieurs ont tenté leur chance auparavant chez RTCI et en sont sortis avec un goût amer comme Mehdi Kettou qui mène une carrière brillante aujourd'hui ou encore Sami Fehri. Depuis près de six mois maintenant, RTCI est en train d'opérer une mue dans la programmation et dans la présentation. Ce changement commence déjà à donner ses fruits puisque RTCI a fait sa réapparition dans les classements d'audience des radios du pays. Il est à noter que RTCI n'y était plus classée depuis plusieurs mois. Par rapport à ses concurrentes, la chaîne pâtit d'une double difficulté. La première est relative à son caractère de média public qui l'astreint à une certaine austérité. RTCI ne pourra probablement jamais s'offrir une star établie de la radio. La deuxième découle, dans un sens, de la première difficulté puisque RTCI possède des moyens limités en comparaison avec les radios privées qui tiennent le haut du pavé. Malgré ses difficultés, RTCI garde une marge de progression assez importante, encore faut-il que tous les efforts se conjuguent dans ce sens. Malheureusement, certaines vieilles habitudes ont la vie dure et le souffle de renouvellement de la chaîne se heurte encore à certains obstacles. Toutefois, la marche est entamée et la chaîne francophone nationale n'a d'autre choix que de se renouveler pour livrer à ses auditeurs un produit de qualité. Il ne faut pas oublier que c'est le contribuable qui la finance ce qui la rend redevable devant lui. La nouvelle présidente de la chaîne ainsi que les jeunes recrues qui commencent à trouver leur chemin auront la responsabilité d'effectuer ce virage stratégique de la chaîne RTCI. Etant dépositaires des deniers publics, l'ensemble des médias étatiques devraient entreprendre la même mue qu'entame RTCI aujourd'hui.