Le président de la République, Béji Caïd Essebssi, a accordé dans la soirée du mercredi 3 février 2016, une entrevue exclusive à Elyès Gharbi, diffusée sur Al Wataniya 1. Il est revenu à cette occasion sur certains points épineux qui ont récemment fait couler beaucoup d'encre et qui ont alimenté les critiques envers sa personne et le gouvernement. Le premier point qui a été abordé lors de cette interview, concerne l'alliance au pouvoir, tant contestée, entre le parti majoritaire Nidaa Tounes et le second parti islamiste Ennahdha. A ce propos, le président a souligné qu'il n'est pas et n'a jamais été proche de ce parti et que ce sont les urnes qui ont tranché. Il a précisé que le peuple tunisien a choisi de ne pas attribuer la majorité écrasante à Nidaa Tounes et que pour respecter le choix du peuple il a fallu engager cette coalition. Quant à l'impact que cela aurait eu sur le parti qu'il a lui-même fondé, Béji Caïd Essebsi a affirmé que la coalition avec Ennahdha n'a rien à avoir avec les conflits et la crise que connait Nidaa Tounes et qu'elle est uniquement due à la course au pouvoir que se livrent ses cadres. Le président est revenu sur les accusations à son encontre et qui affirment qu'il souhaiterait faire hériter la présidence de Nidaa Tounes à son fils Hafedh Caïd Essebsi, il a déclaré que ceux qui propagent ce type d'allégations sont soit des « ignorants » soit « de mauvaise foi » et qu'il ne se mêlerait plus jamais dans les affaires du parti, pour ne pas « reproduire la même erreur deux fois ». Quant à la démission du chef du cabinet de la présidence, Ridha Belhaj, le président a précisé qu'il s'agit d'une démission et non d'un limogeage et que cela s'est fait d'une manière civilisée afin de ne pas donner l'apparence d'un amalgame et pour éloigner la présidence de toute considération partisane. Revenant sur les récentes manifestations qui ont secoué certaines régions du pays, et ses déclarations aux médias étrangers, accusant la gauche dans les affrontements qui en ont découlé, le président a souligné que les protestations pour le droit à l'emploi sont légitimes et que ses affirmations sur l'existence et la nocivité de l'extrême gauche et des partis intégristes, sont une généralité universelle et ne concernent pas que la Tunisie. A ce propos, il a indiqué qu'un bon nombre de ceux qui ont participé aux affrontements appartiennent a certains partis mais ce n'est pas dans ses prérogatives de donner les noms car c'est au tribunal de démêler le vrai du faux quant à leur implication. Béji Caïd Essebsi a tenu à expliquer que ses interventions dans les médias étrangers sont une occasion pour lui de redorer l'image du pays et qu'il se trouve parfois obligé de répondre à certaines questions qui concernent la Tunisie d'abord parce que souvent ces mêmes médias sont déjà au courant de ce qui s'y passe et ensuite pour rassurer les investisseurs. Interpellé par le journaliste sur son opinion du rendement du gouvernement d'Habib Essid, le président de la République a nié toute rumeur concernant son changement. Il a précisé que le gouvernement fait ce qu'il peut au vu de la situation générale du pays et que ses récentes rencontres avec des figures politiques à l'instar de l'ancien chef du gouvernement Mehdi Jomâa, de Néjib Chebbi ou encore Mohamed Nouri Jouini, ne présagent aucunement d'un changement à la tête du gouvernement. Béji Caïd Essebsi a indiqué que ces entrevues ont été l'occasion de faire le point sur sa stratégie et qu'il a pu consulter pour un avis des personnalités politiques afin d'être conforté sur ses choix ou au contraire de relever les lacunes. Le président de la République est ensuite revenu sur la politique étrangère de la Tunisie, précisant qu'il adopte une politique Bourguibienne basée sur la neutralité positive et la non ingérence dans les affaires qui concernent d'autres pays. Il a souligné que si la Tunisie est proche de l'Europe, ses liens avec le monde arabe et donc ses racines, ont souffert ces derniers temps et qu'il œuvre à rétablir les relations notamment avec l'Algérie, l'Egypte, les Emirats et le Qatar où il se rendra prochainement. Pour finir, Béji Caïd Essebsi a affirmé que sa promesse de lever le voile sur la vérité concernant les assassinats de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi a été tenue, dans la mesure où le ministère de l'Intérieur n'a pas lésiné sur les efforts pour arrêter les coupables mais que le dossier coince au niveau de la justice et cela dépasse ses prérogatives. Il a enfin souligné que contrairement à ce qui se dit, il n'a nommé aucun de ses proches à aucun poste dans le gouvernement et qu'il présentera incessamment une initiative pour résoudre le problème du chômage. « J'espère que les autres leaders ne vont pas encore se soulever contre mon initiative » a déclaré le président ajoutant qu'il a dit au « chef de l'opposition Hamma Hammami », lors d'une entrevue, de « saluer ses camarades et de leur dire qu'ils ont de la chance que je sois le président », dans la mesure où il reste ouvert à la critique et où il respecte les protestations légitimes. « La situation n'est pas dramatique, et je ne veux pas aller dans les régions marginalisées les mains vides » a affirmé le président. « Il faut que le peuple se remette au travail, et il faut être réaliste, nous pouvons faire beaucoup de choses et donner de l'espoir au peuple et leur assurer que nous avons des solutions. En mars, des responsables de fonds des pays du Golf visiteront la Tunisie et financeront des projets » a-t-il conclu.