Quand on défend l'immoral, quand on ne convainc pas l'opinion, quand on n'a plus rien à dire mais qu'on veut quand même le faire savoir, on s'en prend aux journalistes. C'est ce qui est arrivé hier à la Kasbah pendant la marche des avocats et pendant la conférence de presse du bâtonnier, après la marche. Des journalistes ont été insultés pendant la marche par des avocaillons sans scrupules. Comble du courage, ils ont préféré agresser les journalistes femmes en les insultant et en les accusant de donner une mauvaise image d'eux à l'opinion publique. Il ne leur est pas venu à l'esprit, une seule seconde, qu'ils sont mauvais. Donc leur image ne peut pas être bien glorieuse…
Bref, après, une conférence de presse a eu lieu. Animée par le bâtonnier, la conférence s'est transformée en meeting pour un Ameur Mehrezi en manque de reconnaissance. C'est ainsi que ce monsieur a déclaré que le gouvernement contrôlait une grande partie des médias et les dirige comme il veut. L'ancien bâtonnier, Abderrazak Kilani, s'est aussi joint à la « fête » et s'en est pris à notre consœur, Amira Mohamed de Mosaïque FM.
Pauvres avocats, pris pour cible par le gouvernement, insultés et dénigrés par les médias. On pourrait y croire si ce n'est que tout le monde sait que c'est faux. Les robes noires tunisiennes pleurnichent pour garder leurs avantages, pour ne pas payer leurs impôts comme tout le monde. Les avocats, ou du moins leurs représentants, signent des accords pour les renier plus tard comme l'a montré le ministère des Finances en publiant l'accord signé avec eux. Ensuite, les avocats alternent entre victimisation et intimidation. Comble de la bêtise, et dans leur délire corporatiste collectif, certains d'entre eux s'en prennent aux journalistes venus couvrir leurs protestations ! Les avocats et leur bâtonnier ont montré qu'ils avaient la mémoire courte. Rappelons-leur que Moncef Marzouki et son CPR avaient tenté, eux aussi, d'intimider les journalistes et de faire pression sur eux. En vain !
Ils semblent avoir oublié que ce sont ces journalistes qui font parvenir leurs voix à l'opinion publique. Ils ont oublié que c'est sur les plateaux de ces mêmes journalistes qu'ils viennent fanfaronner et donner leurs avis sur des sujets divers et variés. Ils oublient que c'est grâce aux journalistes qu'on les reconnait dans la rue et qu'ils peuvent nous inonder de leurs diatribes sur la noblesse de leur métier. Mais les journalistes et l'opinion publique savent ce qu'il y a à savoir sur la vérité des avocats.
L'UGTT, elle aussi en conflit avec le gouvernement, ne s'est jamais permise d'insulter ou d'intimider des journalistes venus faire simplement leur travail. L'historique de la centrale syndicale a toujours été respectueux envers ceux qui portent sa voix au public. Certains avocats et leur ordre, heureusement détenteur d'un prix Nobel, devraient prendre exemple sur l'UGTT et éviter d'insulter et d'intimider. Beaucoup ont essayé avant eux et n'y sont pas arrivés.
L'ordre des avocats se débat dans un chaos total, un chaos qui ne leur permet même pas d'organiser une conférence de presse respectable. Ils prennent une posture défensive et immature disant, en gros, « on est ciblés de toutes parts et tout le monde veut notre perte », ce qui est évidemment faux. Comme les nahdhaouis ou les enfants du CPR, les avocats veulent faire payer à la communauté le dividende d'un militantisme supposé. Ils semblent dire : « nous nous sommes battus pour ce pays, alors nous avons le droit de ne pas payer d'impôts ». Aujourd'hui, aux alentours de midi, l'ordre des avocats a rendu public un communiqué. On s'attendait à ce qu'il comporte des excuses envers les journalistes agressés pendant leur marche et leur conférence. Il n'en était rien.
Dans son infinie sagesse, le bâtonnier dit à ses collègues qu'il a obtenu des responsables des médias qu'ils refusent d'adhérer à une quelconque campagne de dénigrement des avocats et un engagement pour être neutres et objectifs dans la couverture des « combats » des avocats. Par conséquent, il demande à ses estimés collègues d'éviter tout problème avec les journalistes particulièrement sur les réseaux sociaux. Donc, non seulement les avocats agressent les journalistes mais ils leur apprennent leur boulot aussi ! Heureusement que le bâtonnier des avocats est là pour rappeler aux journalistes les règes régissant leur travail. Et puis, sommes-nous censés être neutres quand une corporation refuse sciemment de s'acquitter de son devoir fiscal ?
C'est en fait une grande déception. Les avocats et les journalistes ont toujours été côte à côte dans les grands combats que la Tunisie a connus. Aujourd'hui, pour préserver leurs privilèges et pour ne pas payer, certains parmi les avocats semblent être prêts à tout, même à s'abaisser à l'insulte et à l'intimidation comme le feraient les LPR par exemple. C'est dommage car il est vrai que leur métier est noble, c'est dommage aussi car il ne faut pas généraliser et beaucoup d'avocats refusent ce genre de comportements, c'est dommage surtout parce que c'est une sorte d'aveu, un aveu que ce qu'ils défendent est indéfendable.