Entrepreneuse dans l'âme, amoureuse des belles choses et fervente défenseuse de l'artisanat, c'est ce qu'on peut retenir du parcours de Cyrine Hamza Cherif. Cette femme débordante d'énergie, gère un réseau de boutiques de déco et d'artisanat. Elle vient d'ouvrir un nouveau concept store « Elyssa Artisanat », qui regroupe les créations d'une quarantaine de créateurs et d'artisans, et où elle nous a reçus samedi 11 mars 2017, pour un entretien au cours duquel elle nous raconte son parcours, ses passions et ses ambitions. Cyrine est né à Tunis. Elle a commencé ses études primaires à l'école Chevreul, puis à l'école publique de Mutuelleville. Ses études secondaires débutent au Lycée El Omrane et finissent au Lycée des Pères blancs (actuel Imam Moslem), où elle obtient son Bac Lettres. Timide et réservée mais très dynamique, dès son jeune âge, elle avait un côté artiste : elle adorait dessiner. Cyrine Hamza part en France (Paris) étudier l'architecture d'Intérieur à l'Académie Charpentier. Faisant ce qu'elle aimait, elle obtient brillamment son diplôme en 1990. Elle enchaine avec une année d'études en création textile et peaufine ses connaissances avec deux stages, l'un à l'aéroport de Paris en architecture d'intérieur et l'autre en style dans le textile au cabinet NellyRodi.
En 1992, la jeune femme revient en Tunisie avec l'idée de lancer son bureau d'architecte d'intérieur. Mais, entre temps, elle s'est mariée, et pour réussir dans ce métier, il fallait remporter les grands projets dans l'hôtellerie, et partir souvent de chez soi. Ainsi, pour composer entre sa vie de famille et sa vie professionnelle, elle opte pour l'ouverture d'une boutique de décoration, où elle pourra dessiner ses propres meubles d'intérieur. C'est ce qu'elle fait en 1997, lorsqu'elle ouvre sa première boutique de décoration à Manar Centre, "Fenêtre sur Cour" qui regroupait des meubles d'artisans et des objets d'importation. Peu à peu, elle y introduit quelques objets de déco tunisiens, notamment du verre soufflé, du cuir, du bois, du linge de table, etc. Le projet a tellement bien marché qu'elle se lance dans une deuxième boutique, avec la même enseigne, à l'ouverture de l'hypermarché Carrefour.
Après ces deux réussites, la jeune femme ne comptait pas s'arrêter et décide d'aller de l'avant. Elle avait un projet qui lui tenait à cœur. Amoureuse de l'artisanat, elle voulait ouvrir une boutique qui vend ces produits uniques. Elle ouvre donc, en 2002, une boutique dans un hôtel à Tabarka, dont les activités ont été suspendues à la fermeture de l'hôtel après la révolution et qu'elle s'apprête à rouvrir prochainement. Après la révolution, Cyrine Hamza Cherif ouvre une autre boutique de déco et d'artisanat à Mahdia. Elle récidive avec une seconde, une année plus tard, et également à Mahdia.
Il y a quatre ans, une nouvelle opportunité s'offre à elle, à travers son mari, un homme d'affaires connu, Tarek Cherif, qui lui propose la reprise d'une imprimerie numérique en difficulté. Bien que loin de son domaine de prédilection, et après une brève hésitation, elle se lance dans ce projet. «C'est un challenge, je vais sauver cette entreprise», s'est-elle dit et elle a réussi son pari. Aujourd'hui, la société marche bien. D'ailleurs, elle a fait les badges de l'ISIE lors des dernières élections, après avoir remporté l'appel d'offre.
Toutes ces réussites n'ont pas comblé Cyrine Hamza Cherif, car elle rêvait toujours de créer quelque chose autour de l'artisanat à Tunis, mais elle n'avait pas une idée précise sur la forme de ce nouveau projet qu'elle voulait entreprendre. C'est pendant un voyage au Maroc, que l'idée prend forme. En se promenant au souk de Tanger, en novembre 2015, elle découvre un concept store tenu par deux Marocaines où elles exposaient surtout des produits de l'artisanat marocain. «Enchantée par ce qu'elle a vu», dès son retour en Tunisie, elle commence à chercher une maison avec cachet à Mutuelleville, tout le monde lui ayant déconseillé la Médina où elle désirait s'installer, en premier lieu. En juillet 2016, elle trouve son bonheur. Et en décembre 2016, elle ouvre son concept store, Elyssa Artisanat. «J'ai réalisé mon rêve, je suis très contente. Je suis fière d'avoir ouvert un concept qui n'existe pas en Tunisie», s'est-elle réjouit. Aujourd'hui, elle collabore avec une quarantaine de créateurs et d'artisans. «J'ai connu des gens formidables. Je suis très contente et très épanouie, même si parfois c'est difficile», a-t-elle affirmé, en ajoutant : «Il faut encourager l'artisanat, car ce secteur vit des difficultés. Les artisans ont une richesse dans les mains extraordinaires, c'est un trésor qu'on doit préserver».
Cyrine Hamza Cherif estime que sans le soutien inconditionnel de sa famille et notamment son mari, « un grand bosseur pour qui le travail c'est la santé », elle n'aurait pas réussi. D'ailleurs, c'est lui qui l'a aidée à acheter sa première boutique, avant qu'elle ne puisse compter sur ses propres moyens et sur les crédits bancaires pour financer le reste de ses projets. En contrepartie, elle, aussi, a épaulé son mari dans ses projets, notamment ceux liés à la décoration d'hôtel. L'entrepreneuse évoque une autre personne, qui sans elle rien n'aurait été possible, sa mère. Cette dernière s'est investie avec elle dès l'ouverture de sa première boutique. Elle était présente pour elle et l'a aidée quant-il fallait. «C'est aussi grâce à elle que j'ai réussi», nous confie-t-elle.
La prochaine étape, pour elle, s'est de s'internationaliser, soit en exportant, soit en ouvrant sa propre boutique. Pour l'instant, elle savoure l'instant. Cyrine Hamza Cherif a non seulement réalisé son rêve, mais elle est actuellement en négociation avec une Tunisienne installée au Mexique, qui est intéressée par ses produits. Un nouveau challenge qui s'offre à elle et qu'elle saura relever.