Le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi a accordé, ce soir du mardi 1er août 2017, une interview exclusive à la chaîne Nessma Live au cours de laquelle il est revenu sur plusieurs questions, à l'instar de la crise des pays du Golfe, la loi de la réconciliation, la campagne de lutte contre la corruption, la situation économique et les élections municipales. Rached Ghannouchi a affirmé qu'il est toujours présent sur la scène politique malgré ses apparitions médiatiques restreintes. Interrogé sur la cravate qu'il a portée à l'occasion de l'interview, il a indiqué qu'il ne s'agit pas d'une première fois, d'autant plus que rien ne l'empêche de la mettre, notamment sur le plan religieux.
Revenant sur la crise des pays du Golfe, il a exprimé son regret de voir ce genre de conflits entre des pays ayant autant de liens religieux et culturels, soulignant que la Tunisie adopte une position neutre, comme à son habitude face ce genre de situations. « Nous ne faisons pas partie de l'Islam politique. Nous nous considérons comme des musulmans démocrates. Cependant, ce conflit ne peut qu'avoir un impact négatif sur la Tunisie. De ce fait nous appelons à la reprise des relations entre les pays du Golfe, il faut dépasser cette crise et rétablir les relations avec le Qatar »
D'autre part, il a affirmé que la place naturelle d'Ennahdha est dans le gouvernement, « Le contraire serait anormal. Les islamistes ne peuvent être exclus. L'exclusion est une des particularités de la Tunisie, celle qui a fait sa réussite dans le monde arabe ». M. Ghannouchi a assuré, également, que son parti a rompu avec l'Islam politique, précisant qu'il reconnait la Constitution tunisienne et l'Etat civil.
Concernant le projet de loi de la Réconciliation présenté, il a affirmé qu'il n'a pas été rejeté par le Conseil de la Choura mais qu'il a été amendé, estimant que ce sont les principes mêmes de la démocratie. « Les conflits au sein des partis ne créent pas une situation de blocage. Le passage de tous les projets de loi conflictuels, en est la preuve. Tout cela grâce à la politique consensuelle caractéristique de la Tunisie. Nous sommes en phase d'une transition démocratique, nous ne pouvons pas nous soumettre à la majorité des 51%»
Dans un deuxième temps, le chef d'Ennahdha, est revenu sur la campagne de lutte contre la corruption, il a indiqué qu'il est impératif de combattre ce fléau, tout en se conformant aux dispositions de la loi. « Toutefois, le gouvernement doit être le garant des droits des citoyens et de leurs biens. Et toute personne qui estime être victime d'une injustice doit se présenter devant la justice ».
Par ailleurs, il est revenu sur certaines accusations entre des membres de l'équipe gouvernementale, comme, le conflit entre Yassine Brahim et Mehdi Ben Gharbia « Nous sommes encore une démocratie naissante, ces agissements sont naturels, bien qu'ils soient contestés. Quant au remaniement ministériel, il est du ressort du chef du gouvernement. Et même s'il y a des conflits au sein de Nidaa Tounes, le bloc parlementaires vote en faveur de tous les projets de loi présentés par le gouvernement ».
M. Ghannouchi a indiqué, également, que Youssef Chahed doit s'engager à ne pas se présenter aux élections présidentielles de 2019, comme c'était le cas pour l'ancien chef du gouvernement, Mehdi Jomâa, soulignant dans le même contexte que le ministre des Finances par intérim, Fadhel Abdelkefi, n'aurait pas du brosser un tableau aussi sombre de la situation économique en Tunisie. Quant à la situation économique, il a affirmé la nécessité de mettre en place des réformes fondamentales, appelant à un retour au travail et à arrêter les recrutements au sein de la fonction publique. « Les établissements publics sont en faillite, et nous détenons la plus grande masse salariale par rapport au nombre d'habitants. Où allons-nous ainsi ? » s'est-il interrogé. Et d'ajouter, « il faut rétablir le rapport entre le salaire et la productivité, les promotions machinales ne mènent nulle part ».
Dans ce contexte, il a appelé à tenir un dialogue sociale entre les différentes organisations nationales, comme c'était le cas lors du dialogue national. « Le gouvernement doit superviser ce dialogue et s'engager à respecter ses termes ». Le chef d'Ennahdha s'est, également, penché sur le dossier des élections municipales, soulignant qu'il faut redonner l'autorité aux régions. « Il est temps de tenir le scrutin municipal, ça fait partie de la solution de la crise actuelle ». Et à M. Ghannouchi de conclure que la Tunisie brille à l'échelle internationale, malgré les conflits internes. « Nous avons un grand avenir devant nous. Nous devons travailler, encore travailler ».