« Pas d'immunité pour quiconque » : le président hausse le ton face à l'UGTT    Cyberarnaque : des escrocs promettent de faux cadeaux pour piéger les internautes    Les pertes cumulées de Sanimed dépassent les 47 MD à fin 2024    Trump et Poutine se donnent rendez-vous en Alaska, ce que l'on sait du sommet    L'ex-djihadiste tunisien Nizar Trabelsi rapatrié en Belgique après 12 ans de détention aux USA    Météo - Tunisie : ciel peu nuageux et chaleur modérée    Les contraintes incontournables du « Plan/Modèle » de Développement (2026-2030)    Etats-Unis: plusieurs personnes blessées dans une fusillade à Times Square    Décès de Me Yadh Ammar, une illustre figure du barreau, de l'université et de la société civile    Bizerte-Utique : 3 morts et 4 blessés dans le tragique renversement d'un camion poid lourd    Kais Saïed : « Aucun fauteur ne bénéficiera de l'impunité »    Présidence de la République : des événements se succèdent de manière inhabituelle ces jours-ci dans le but d'attiser les tensions    Bizerte : saisie de 60 tonnes de pommes de terre et 8 tonnes de fruits de saison    Génocide contre Gaza : L'Union des avocats arabes appelle ses membres à la mobilisation    Espagne : la mosquée-cathédrale de Cordoue sauvée des flammes    Marché des télécoms : 1,915 milliard de dinars de chiffre d'affaires au 1er semestre 2025    Bibliothèque nationale de Tunisie : La bibliothèque numérique «Cairn.info» désormais accessible    Viandes blanches : un guide pratique pour les détaillants est en cours de préparation    80% des plages ont fait l'objet d'une campagne de propreté    Cheb Mami enflamme la 59e édition du Festival International de Hammamet    La France condamne fermement la nouvelle extension militaire israélienne à Gaza    Deux poèmes de Hédi Bouraoui    À Sousse, l'agression brutale d'un chien suscite l'indignation, le suspect arrêté    Le PDL alerte l'Unicef et ONU Femmes sur la détention arbitraire d'Abir Moussi    La VAR bientôt de retour : la FTF dévoile ses réformes majeures    Zied El Heni appelle à un front national pour sauver la Tunisie    Ahmed Jaouadi : Un accueil présidentiel qui propulse vers l'excellence    Décès du comédien égyptien Sayed Sadek    Noureddine Taboubi reçoit Zied Dabbar après l'attaque contre l'UGTT    L'inscription en ligne est ouverte pour les élèves, collégiens et lycéens tunisiens au titre de l'année scolaire 2025-2026    Météo en Tunisie : températures entre 30 et 34 au niveau des côtes et des hauteurs    Lente reprise, inflation tenace : les prévisions du Fonds monétaire arabe pour la Tunisie en 2025 et 2026    CSS : Ali Maâloul et 7 nouvelles recrues débarquent !    Tunisie Telecom rend hommage au champion du monde Ahmed Jaouadi    Le ministre de la Jeunesse et des Sports reçoit Ahmed Jaouadi    « Arboune » d'Imed Jemâa à la 59e édition du Festival International de Hammamet    JCC 2025-courts-métrages : l'appel aux candidatures est lancé !    Ahmed Jaouadi décoré du premier grade de l'Ordre national du mérite dans le domaine du sport    Tensions franco-algériennes : Macron annule l'accord sur les visas diplomatiques    Faux Infos et Manipulations : Le Ministère de l'Intérieur Riposte Fortement !    Sous les Voûtes Sacrées de Faouzi Mahfoudh    Ahmed Jaouadi décoré de l'Ordre du Mérite sportif après son doublé mondial    La Galerie Alain Nadaud abrite l'exposition "Tunisie Vietnam"    Alerte en Tunisie : Gafsa en tête des coupures d'eau    La mosquée Zitouna inscrite au registre Alecso du patrimoine architectural arabe    Orchestre du Bal de l'Opéra de Vienne au Festival d'El Jem 2025 : hommage magique pour les 200 ans de Strauss    Le Théâtre National Tunisien ouvre un appel à candidatures pour la 12e promotion de l'Ecole de l'Acteur    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Faites la guerre, pas l'amour
Publié dans Business News le 28 - 09 - 2018

Estomaquée ! L'information m'est parvenue, mais je n'y ai vraiment pas cru. Ça semblait trop gros pour être vrai. Cela ne pouvait l'être, ou alors nous avions été happés par un trou de ver et atterri à une époque qui se rapproche plus du Moyen-âge que du XXIe siècle. Il ne pouvait s'agir que d'une intox de mauvais goût, mais ce n'en était pas une ! Deux ados, deux jeunes lycéens, ont commis un crime immonde qui a nécessité de mobiliser l'appareil judiciaire afin de prononcer une sanction. Il le fallait, une telle atrocité ne devait pas rester impunie. Il fallait qu'ils paient pour leur délit, qu'ils assument leur responsabilité, qu'ils rendent des comptes à la société.

En Tunisie de l'an 2018, c'est un crime que des jeunes s'aiment et le montrent. C'est une atteinte à la sacrosainte morale et aux bonnes mœurs que de se donner des bisous. Oui. Des ados ont été surpris par le gardien du lycée en train de s'embrasser. Un scandale rapidement rapporté à la direction de l'établissement qui s'est empressée de rédiger un rapport et de le soumettre à la direction régionale. Au final, le Tribunal de première instance de Tunis a prononcé un verdict exemplaire, 6 mois d'emprisonnement et une amende de mille dinars. Les lycéens ont porté atteinte à la pudeur, ils ont commis un acte de débauche. Ils devaient être châtiés. Il fallait que leur année scolaire soit chamboulée, que leur avenir soit détruit, que leurs rêves et premiers émois soient entachés par le sceau de la honte.

Qu'est ce qui fait qu'une direction d'un établissement scolaire défère une affaire, si tant est on pouvait la qualifier comme telle, devant la justice ? Un bisou échangé dans l'enceinte d'un lycée requière-t-il une réaction aussi extrême des responsables de l'établissement ? Ne pouvaient-ils réunir un conseil de discipline pour traiter « le scandale » en interne ! Mais non, ils devaient se poser en gardiens de la morale, en protecteurs des jeunes gens contre la débauche et les tentations. Ils se devaient d'endosser le rôle d'une police des mœurs à cheval sur une éducation marquée par la pudibonderie. Il fallait aussi donner l'exemple ; saper toute velléité à exprimer une marque d'amour aux autres ados. Une marque d'amour la plus naturelle au monde, celle d'étreindre son amoureux ou son amoureuse à un âge où l'on se cherche et où l'on découvre les premiers émois.

Les deux lycéens ont été jugés sur la base des articles 226 et 226bis du code pénal tunisien. Un code bourré de dispositions arbitraires, liberticides, contraires à la nouvelle Constitution et aux libertés individuelles qu'elle est censée protéger et garantir. Ce fameux article qui évoque les sanctions prévues en cas d'atteintes aux bonnes mœurs, n'interdit pourtant pas explicitement les baisers. Un texte assez vague qui ouvre une brèche à toutes les interprétations possibles. « Est puni de six mois d'emprisonnement quiconque se sera, sciemment, rendu coupable d'outrage public à la pudeur, ou porte publiquement atteinte aux bonnes mœurs ou à la morale publique ». Qui définit donc la notion de bonnes mœurs ? Sachant que tout est relatif, la loi laisse dans ce sens une marge de manœuvre et d'interprétation assez large à toute une ribambelle de personnes, allant du policier qui arrête les « coupables », au procureur et en passant par le juge.

L'administration du lycée a jeté en pâture deux ados à une société qui se gargarise des détails coquins d'autrui, qui se nourrit des potins d'ordre personnel. Ce ne sont pas des délinquants, ils n'ont rien volé, ils n'ont agressé personne et pourtant ils se retrouvent sur le banc des accusés pour un simple bisou. En même temps, on tolère toutes sortes d'incivilités dans l'espace public. Bagarres, agressions, harcèlements, insultes, racket, désordre, corruption – la liste est bien longue- sont monnaie courante. Mais un baiser échangé entre deux jeunes, le fait de manifester son amour, c'est l'horreur absolue, ça ne peut que menacer l'ordre public et la sérénité des citoyens.

Le malheur de ces ados nous renvoie face aux tabous qui gangrènent notre société. Une société plongée dans les méandres d'une culture sclérosée où les traditions s'entremêlent à une religiosité qui exclut toute expression du corps ou de la sexualité, où s'embrasser en public s'apparente à un sacrilège et où la frustration et la répression des désirs les plus naturels sont la norme. Alors faites la guerre, pas l'amour !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.