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Les mercenaires vont devenir ministres
Publié dans Business News le 11 - 11 - 2019

La semaine qui vient, peut-être aussi la suivante, va enregistrer le plus grand nombre d'intox de l'année. C'est cette semaine que l'on va « caster » (verbe proposé à l'Académie française, tiré du mot casting) nos futurs ministres. Et c'est donc cette semaine qu'on lira des noms de ministrables à n'en plus finir et que l'on verra tirer à boulets rouges sur tous les candidats sérieux avec des intox réelles et de véritables casseroles.
Pour mettre le public dans l'ambiance, on a commencé par cette énième tentative de discréditer les médias, notamment les « mainstream » (les plus dominants et les plus influents). Ainsi, Sami El Fehri, patron d'El Hiwar Ettounsi, deuxième chaîne la plus regardée du pays, a été mis au cachot dans des conditions effroyables, il dort à même le sol depuis des jours, pour bien l'humilier. C'est le parquet qui a pris la décision de le mettre en garde à vue, sans consulter de juge d'instruction et sans même qu'il y ait d'instruction en bonne et due forme. De quoi inquiéter observateurs et acteurs de la vie médiatique tunisienne. Sami El Fehri vient après Nabil Karoui, patron de la première plus grande chaine du pays, qui a passé un mois et demi en prison, suite à une décision qualifiée, plus tard, de « déni de justice ». Dans cette affaire aussi, aucun juge d'instruction n'a pris la décision d'emprisonner cet homme de média. Et tout comme Sami El Fehri, Nabil Karoui a subi, lui aussi, des affaires montées de toutes pièces, juste pour atteindre certains objectifs. Qui parle aujourd'hui, par exemple, de cette affaire d'agent de lobbying, ex agent du Mossad, venu « égayer », la dernière semaine de notre campagne électorale ?

Toujours dans le feuilleton de discrédit des médias, une information erronée et odieuse a été diffusée vendredi soir annonçant le décès de Mohamed Ennaceur. Plusieurs grands médias ont relayé l'information, dont l'agence officielle Tap. Cette publication tardive leur a valu, le lendemain, les moqueries, les remontrances du public et les leçons de morale des confrères qui roupillaient tranquillement chez eux en cette soirée du vendredi 8 novembre. Le Syndicat des journalistes a même publié un communiqué lapidaire d'auto-flagellation appelant à ce que des excuses soient présentées. Du coup, le grand public a pensé, et pense encore, que les médias sont de véritables propagateurs d'intox, y compris les meilleurs d'entre eux.
Qui a relayé en premier l'information ? Au cas où vous ne le savez pas, c'est la vice-présidente de l'Assemblée. Techniquement parlant, elle est une source officielle. Qui a confirmé l'information ? Le chef du parti islamiste Ennahdha. Un parti au pouvoir ayant la majorité aussi bien à l'assemblée sortante que la nouvelle. Techniquement parlant, il est une source officielle ou, au moins, digne de foi. Si on ajoute à ces deux sources, l'agence officielle Tap, via son canal SMS, les journalistes de permanence vendredi soir n'ont commis aucune erreur, techniquement parlant. Comme si tout cela n'était pas suffisant pour égayer le week-end, une vidéo postée par un haut gradé des forces de l'ordre (et ex de la brigade anti-terroriste) pour nous annoncer l'apocalypse à Ouardanine.

Pourquoi donc tout cet acharnement de la part des hommes politiques et des réseaux sociaux contre les médias tunisiens ? A qui profite le crime ? Qui est derrière ça ?

A qui profite le crime ?
Quand on analyse de plus près, les vagues d'intox surviennent généralement en période électorale ou en période délicate de tension ou d'enjeux politiques. Celle que nous vivons en ce moment en est une. On est en pleins préparatifs de casting ministériel et les noms qui circulent sont tout sauf bons. D'après nous en tout cas. Le « nous » représente les médias défendant les valeurs de la République, de la justice, de la démocratie, du progressisme et de la laïcité. On a des candidats qui trainent beaucoup de casseroles ou qui représentent un véritable danger, par leur radicalisme ou leur populisme. Parmi les noms qui circulent, il y a des personnes qui ont une réputation sulfureuse. On leur prête des accointances avec des services secrets libyens et iraniens, d'autres qui ont la réputation d'avoir été des délateurs, voire des espions et d'autres encore qui ont eu, par le passé, des liens de proximité avec des dictateurs, allant de Mouammar Gueddafi à Hafez El Assad (ou son fils Bachar) en passant par Saddam Husseïn. Il y en a qui ont des liens historiques d'amitié et d'affaires avec des personnes mises en examen pour terrorisme et complot contre la sûreté de l'Etat. Parfois, un seul candidat peut réunir plusieurs parmi ces casseroles à la fois.
Les seuls capables d'exposer ces casseroles au public, et de faire pression sur les politiques, pour qu'ils ne nomment pas ces « mercenaires » sont les médias et les médias mainstream en premier. Ce n'est pas par hasard que l'on nous nomme « quatrième pouvoir ». Dans les pays démocratiques, les médias font et défont des ministres, voire des présidents. En 2017, « Le Canard enchaîné » a sabordé la campagne de François Fillon l'éjectant, du coup, de la présidentielle. A son actif, des dizaines de limogeages et de démissions de ministres. En 1974, les journalistes du Washington Post ont réussi à faire éjecter Richard Nixon de la Maison Blanche, dans la célèbre affaire Watergate, bien que celle-ci ait été révélée en 1972 et que Nixon ait été réélu après. Quand on a des journalistes qui sont obstinés, derrière qui se trouvent des juges intègres et impartiaux et une opinion publique sensée, consciente et mâture, le quatrième pouvoir devient un pilier fondamental de la démocratie.

En Tunisie, on va vers cela d'une manière certaine, Moncef Marzouki et la troïka en savent quelque chose, mais on est encore loin d'être un pouvoir à part entière. Nous avons beaucoup d'ennemis et d'embûches à abattre auparavant, à la tête desquels se trouvent les politiques.
En 2012, les médias non inféodés à la troïka ont été surnommés « médias de la honte ». On se rappelle tous le long sit-in mené devant la Télévision publique nationale, puis devant le bâtiment de la Radio nationale.
Dans les élections de 2019, islamistes et « révolutionnaires » se sont donné le mot : abattre les « médias de la honte » pour pouvoir travailler et ne pas avoir à dos l'opinion publique. Savent-ils que le fait de casser les médias qui ne partagent pas leur opinion ne fera qu'accélérer le retour de la dictature ? Connaissent-ils l'Histoire des peuples et le rôle des médias, l'intérêt suprême du contre-pouvoir qu'ils représentent pour la pérennité de la démocratie ? Le doute est permis.
Une chose est sûre, Ennahdha n'a aucun intérêt à ce qu'il y ait des médias puissants dans le pays. Des personnes comme Safi Saïd, Maher Zid ou Seïf Eddine Makhlouf non plus. Et c'est pour cela qu'on les retrouve, souvent, à la tête de ceux qui injurient et dénigrent les médias qui ne leur sont pas inféodés. Quid du nouveau président de la République Kaïs Saïed ? Comme tout homme politique, lui non plus n'a pas intérêt à avoir des médias qui lui cherchent la petite bête. Mais comme la majorité des hommes politiques, il a un discours rassurant envers nous, en nous exprimant toute sa solidarité. « Il se désolidarise totalement de tous ceux qui s'attaquent aux journalistes », a-t-il tenu à dire aux représentants des médias qu'il a reçus mardi dernier.

Ce discours est cependant contraire à la réalité. Kaïs Saïed est soit un fin politicien hypocrite, soit entouré de quelques mauvais conseillers. Comment expliquer, sinon, le fait qu'il n'ait toujours pas reçu les membres de la Haica, gendarme officiel de l'Etat pour l'audiovisuel, alors qu'il aurait dû commencer par cette instance constitutionnelle ? Comment expliquer son boycott des médias locaux lors de la campagne électorale ? Comment expliquer la violence de la campagne haineuse menée par ses sympathisants à l'encontre des médias tunisiens et particulièrement El Hiwar Ettounsi qui a osé le critiquer ? Comment expliquer que certains de son proche entourage, ou qui affirment l'être du moins, continuent à s'attaquer aux médias et aux journalistes qui ont des positions à peine critiques contre Kaïs Saïed ? Mardi dernier, au moment même où le président de la République recevait nos représentants syndicaux officiels, un des proches du premier cercle de Kaïs Saïed (portant les initiales K.K.) s'en est pris à Business News et à moi-même à cause de ma chronique de la semaine dernière, avec de la diffamation, intox et accusations salissantes et outrageuses au menu.
Avant Kaïs Saïed, et bien avant le démarrage de la campagne électorale, un proche de Nabil Karoui (devenu candidat aux législatives, heureusement sans succès) a publié une liste de noms de grands journalistes ayant soi-disant reçu des centaines de millions (on ignore en quelle devise) d'argent britannique. Trois membres du bureau directeur du SNJT et deux membres du bureau de la FTDJ (dont moi-même) sont cités dans la liste. Une plainte en bonne et due forme a été déposée, on attend encore son issue. Moi-même j'ai déposé plainte contre l'ancien président Moncef Marzouki pour injures et diffamation, j'attends encore l'issue. Car, bien avant Ennahdha et Kaïs Saïed, Moncef Marzouki s'était fait une spécialité de s'attaquer aux médias. Bien avant lui, Zine El Abidine Ben Ali a réussi à nous intimider et bâillonner, voire nous emprisonner comme le cas de Taoufik Ben Brik, Fahem Boukaddous et autres, pendant que les islamistes et Marzouki étaient à l'étranger, Kaïs Saïed était concentré dans son université et son « K.K. » caché sous le lit ou derrière un proxy.

En cette semaine de désignation de ministres, les médias préparent leurs « dossiers » contre les candidats pour attirer l'attention des décideurs et l'opinion publique. C'est notre rôle, c'est notre devoir. Tout homme d'Etat respecterait ce devoir et ferait tout pour nous protéger et nous aider à l'accomplir. Tout homme politique ferait tout pour nous casser et nous empêcher d'accomplir ce devoir, sous divers prétextes. Parce que nous défendons une certaine idéologie (qu'elle soit populiste, islamiste, progressiste ou autres), nous sommes des empêcheurs de tourner en rond et représentons une menace et un danger pour le camp politique adverse. Pour nous abattre, tout est bon. Ça varie des véritables procès ou procès montés de toutes pièces aux intimidations et agressions verbales et physiques. Ça peut aussi monter jusqu'aux éliminations physiques. Près de 50 journalistes sont morts cette année, selon RSF, en raison de leurs activités professionnelles. En 2018, 84 journalistes ont été tués. Voilà à qui profite le crime, à la dictature ! Voilà ce que font tous les politiciens ou sympathisants d'hommes politiques en s'attaquant et en salissant les médias qui ne partagent pas leurs opinions.
Si vous voulez un gouvernement de mercenaires et de délateurs, si la dictature vous manque, une seule consigne : encensez Ennahdha (ou Kaïs Saïed) et continuez à salir les journalistes en les taxant de tous les adjectifs possibles.


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