L'ODC appelle les citoyens à faire preuve de plus de conscience et à rationaliser leur consommation «La consommation des Tunisiens au cours du mois de Ramadan augmente, jusqu'à afficher une hausse de 80%, notamment pour certains produits très prisés en ce mois saint, tels que les différentes variétés de viandes, les œufs et le lait, leur vente enregistrant un pic, selon l'Organisation de défense du consommateur (ODC). A cet effet, l'Institut national de la statistique (INS) a décidé de réserver un indice des prix à ces produits qui sera calculé tous les trois jours et ce, tout au long du mois de Ramadan. Très fidèles à leurs habitudes de consommation, les Tunisiens s'apprêtent, comme chaque année, à accueillir le mois du jeûne qui débutera aujourd'hui ou demain, après l'observation du croissant lunaire (hilal). A la veille de Ramadan, 9e mois du calendrier hégirien, les magasins et marchés grouillent de consommateurs, formant de longues files d'attente devant les caisses, parfois non sans tension. A ce titre, les grandes surfaces se préparent à faire face à cette forte demande d'achats. Ainsi, Béchir Zaafouri, responsable d'une grande enseigne de distribution, précise que le groupe prend ses dispositions, à l'avance, comme chaque année, en prévision du mois de Ramadan qu'il a qualifié de «mois de la consommation». «On s'approvisionne davantage en produits alimentaires et on intensifie la présentation de ces produits... des rayons dédiés à la présentation d'autres articles sont éliminés pour favoriser l'exposition des produits alimentaires». «Nous établissons nos prévisions et passons des bons de commande afin d'assurer le stock nécessaire et d'éviter toute pénurie». «Par ailleurs, des promotions sont effectuées au mois de Ramadan. Cette année, on programme une remise de 10% appliquée, chaque jour, sur un rayon différent de produits et des jeux sur le réseau social «Facebook» permettant aux clients de gagner des points sur leur carte de fidélité», a-t-il précisé. Des dépenses qui vont crescendo Les dernières statistiques de l'Institut national de la consommation (INC), révèlent que la consommation des œufs et des pâtes alimentaires augmente de 100% au cours de ce mois, suivie de la consommation des viandes rouges (ovines et bovines) qui grimpent respectivement de 55% et de 50%, outre celle du lait et dérivés qui augmente de 70%. L'évolution de la consommation des viandes blanches vient au dernier rang, n'enregistrant qu'une hausse de 40%. Selon la même source, la courbe de variation de la consommation, au cours du mois de Ramadan, montre une hausse de 35% des dépenses ménagères au cours de la 1ère semaine du mois, puis une baisse pendant les 20 derniers jours. Cependant, un retour à la hausse est relevé pendant la dernière semaine, annonçant les préparatifs pour fêter l'Aïd marquant la fin du mois du jeûne. Cette frénésie d'achat, qui intervient dans une conjoncture économique et sociale difficile, caractérisée par un taux de chômage élevé (15% au cours du premier trismestre 2015) et une inflation galopante de plus de 5%, s'explique par une volonté du Tunisien de compenser son sentiment de privation de manger et de boire pendant la journée, en augmentant sa consommation pour rassasier sa faim dans la soirée, a affirmé le sociologue Taieb Touil. D'où l'approvisionnement, à cet effet, en fruits secs, feuilles de bricks, bsissa, sorgho, soupe d'orge et autres produits..., a fait remarquer Touil. D'après le sociologue, on ne peut dire que le jeûneur n'accorde pas, aujourd'hui, d'intérêt à l'aspect religieux mais cette préoccupation a progressivement perdu de son intensité au profit de nouvelles habitudes de consommation. En effet, a-t-il dit, de nouvelles habitudes, liées notamment au stockage de la nourriture et aux soirées ramadanesques, sont venues s'ancrer progressivement dans le comportement du consommateur tunisien. Touil a regretté, cependant, l'absence d'études sur le comportement du Tunisien pendant le mois de Ramadan. L'ODC s'attelle à rationaliser la consommation Pour Mme Thoraya Tabbassi, vice-présidente chargée des affaires sociales au sein de l'Organisation de défense du consommateur (ODC), le Tunisien doit faire preuve d'un certain niveau de conscience, en rationalisant sa consommation, surtout avec l'avènement du mois de Ramadan afin d'éviter le recours aux crédits de consommation, qui connaissent une forte hausse au cours de ce mois. «Malheureusement, de nos jours, le comportement du consommateur tunisien n'est pas objectif, surtout lorsqu'on voit cette frénésie d'achats se propager en dépit de l'appauvrissement de la classe moyenne tunisienne et des dépassements que l'on relève sur le marché tunisien (contrebande, commerce parallèle, monopole et tricherie ...) ». «Le Tunisien se montrerait rationnel et objectif s'il n'achète pas les produits de consommation exposés dans la rue de manière anarchique et boycotte, s'il le faut, les produits vendus à des prix exagérés», a-t-elle expliqué. D'après la responsable, le boycott est un outil très efficace qui ne manquera pas de réduire les prix. «L'inflation, qui est le souci majeur du Tunisien, pourrait être contrecarrée, si le consommateur devient plus conscient en évitant la frénésie et en tenant compte de son pouvoir d'achat, affaibli à hauteur de 30%, principalement en raison des infractions enregistrées sur les marchés tunisiens, du fléau de la contrebande et du commerce parallèle», a fait remarquer la responsable. Le gouvernement, a-t-elle ajouté, est appelé également à jouer pleinement son rôle de régulateur, à activer le mécanisme de contrôle et à restructurer le marché parallèle. Il s'agit, en outre, de criminaliser les infractions commises à l'encontre du consommateur, lors de l'amendement de la loi sur la concurrence et les prix, a-t-elle conclu.