Du côté de nos agriculteurs tout comme de leurs instances de représentation, c'est plutôt la déception totale. C'est que la loi de finances complémentaire 2015 a ignoré totalement ou presque leur domaine d'activité, alors qu'il se trouve en pleine difficulté. Cela est d'autant plus vrai que ce secteur souffre sensiblement de la conjonction de multiples facteurs totalement défavorables : conditions climatiques difficiles, activités à basses qualifications, investissements timides et niveau de mécanisation encore très faible. Autant d'éléments qui ont affecté sérieusement la production nationale et surtout ses exportations, exception faite pour quelques branches, l'huile d'olive biologique notamment avec une hausse de 265% et une valeur de 190MD. Nos agriculteurs espéraient en effet un alignement aux autres secteurs, le tourisme surtout. Justement, la LFC 2015 a retenu plusieurs dispositions financières largement avantageuses au secteur touristique. Elles concernent en particulier l'annulation des pénalités de retard de remboursement, l'allègement de quelques dettes ou encore le rééchelonnement de certaines autres. Certes, le secteur touristique a été largement pénalisé par les attentats du Bardo et de Sousse, mais il n'est malheureusement pas le seul. Sans parler du fait que depuis les deux attentats terroristes, ce secteur n'a cessé de bénéficier d'un soutien inconditionnel de l'Etat et de ses institutions financières. On rappelle, à ce propos, la circulaire de la Banque centrale de Tunisie, en date du 22 juillet, qui autorise les établissements financiers à accorder de nouveaux crédits à caractère exceptionnel, remboursables sur sept ans, avec un délai de grâce de deux ans. Il est donc nécessaire que le gouvernement repense cette question de soutien financier, surtout que l'agriculture demeure un secteur stratégique avec un poids économique aussi important que celui du tourisme. L'agriculture assure justement à elle seule 11% du PIB, emploie 18% de la main-d'œuvre active, contribue à fixer près de 40% de la population rurale et participe à raison de 12% au volume global de nos exportations. Et on dira même que plus d'un soutien financier, l'agriculture tunisienne a besoin de toute une réforme en profondeur, car tout laisse croire que les années à venir seraient beaucoup plus difficiles pour ce secteur. Toutes les études affirment en effet qu'en raison des changements climatiques, et de la limitation des ressources en eau et en sols, il est attendu, d'ici l'an 2020, un recul des cultures pluviales d'environ 50% et une baisse du rendement de 10 à 20%. Des perspectives peu reluisantes qui donnent toute son importance à l'élargissement du niveau d'innovation technologique agricole et de mécanisation des procédures de production.