L'organe fédéral ne laisse que des miettes à tous ceux avec lesquels il a eu, dernièrement, maille à partir: CNOT, ministère, CA.... Ce n'est pas une victoire à la Pyrrhus comme on pouvait s'y attendre qu'ont obtenue Wadii Al Jari et son bureau, mais plutôt un franc succès conforté par une écrasante majorité de clubs présents à la dernière Assemblée générale extraordinaire: 207 clubs présents sur les 265 affiliés à la FTF. Mais c'est surtout le blanc-seing donné par les clubs, leur renonciation à la moindre opposition, critique ou réserve et l'unanimisme qu'ils ont exprimés qui intriguent le plus. Les assises ont été bouclées en moins d'une heure (dont la moitié en palabres suite à l'intervention du représentant de Grombalia Sport, Mahoud Baroudi), les amendements votés le 29 juillet dernier sont passés comme une lettre à la poste. Bref, cela a été une copie conforme des travaux du 29 juillet dernier en termes de renforcement du pouvoir fédéral, ce qui fait dire à certains que le BF a, de nouveau, roulé les clubs dans la farine, exerçant sur eux des dons insondables et insoupçonnables d'hypnose. L'annulation de l'appel en dernier recours au Comité national d'arbitrage sportif a été votée, la mise en place d'une structure indépendante des élections, aussi...Bref, le staff d'Al Jari a désormais les coudées franches. Le président actuel peut même avancer ses pions dans la perspective de l'obtention d'un nouveau mandat, aux élections du mois de mai 2016, puisqu'il peut compter sur les clubs amateurs, majoritaires et au poids crucial au moment du décompte. Il tient actuellement de main ferme le collège du football amateur qui a pu pourtant exprimer un début de rébellion à l'été 2014 à l'occasion de la réunion de Hammamet-Sud visant un retrait de confiance du bureau en place. D'ailleurs, de retrait de confiance, le bureau fédéral actuel en a vu et entendu à la pelle. Une fois, c'était le Club Sfaxien, une autre l'Etoile du Sahel, une troisième fois, l'Espérance de Tunis. Actuellement, c'est le Club Africain. A chaque série de fautes arbitrales à ses dépens, un club remue ciel et terre, crie au vol et exprime une volonté de «réformer le football tunisien et de lutter contre la corruption». Diviser pour mieux régner Forcément, des voix vont paraître dissonantes et se perdre dans la nature dans cet unanimisme digne des régimes totalitaires des pays de l'Est du temps de la Guerre froide. Le cas de Mahmoud Baroudi, vendredi dernier à Gammarth lorsqu'il qualifia de «miliciens» les partisans forcenés d'Al Jari qui lui déniaient le droit de critiquer quoi que ce soit. Al Jari a manœuvré finement, manipulant les grands clubs un à un, jouant sur l'incroyable animosité qui oppose les uns aux autres parmi les quatre grands et sur leur incapacité à s'unir un jour autour d'un même projet, divisant pour mieux régner. A sept mois des prochaines élections, la posture dans laquelle il se trouve, avec son bureau, est inquiétante à plus d'un titre. D'abord, parce qu'elle s'appuie sur le thème de la souveraineté du mouvement footballistique et de son indépendance par rapport aux tentatives de mainmise de la part du Comité national olympique tunisien. Un thème sur lequel joue à l'envi le président fédéral pour ameuter les troupes, déclarant une sorte de «guerre de libération» ou de «lutte pour la dignité» que doit mener le football face aux élans hégémoniques du CNOT et même du ministère. Avec pour but de mettre les clubs dans sa poche. D'ailleurs, le conflit actuel avec le CNOT tombe du ciel pour lui servir d'alibi pour mieux chauffer ses troupes. Cette posture triomphaliste est inquiétante, également, parce qu'elle sert de cache-misère. En effet, elle élude les carences d'une gestion fédérale nettement déficitaire au niveau de la sélection nationale, de l'atmosphère de la compétition nationale, du rôle joué par l'arbitrage, de la désaffection du public sportif et de la détérioration de l'image de notre football. D'ailleurs, en brandissant régulièrement la menace du courroux de la fédération internationale, sorte d'épouvantail pour faire évacuer les brebis galeuses, le pouvoir fédéral suggère d'une certaine manière que les clubs n'ont qu'à se tenir sages, obéissants. Les subventions, la FTF les leur apportera autant que cela se peut. Pour le reste, ne crachez pas sur la main bienfaitrice. Elle promet des lendemains qui chantent à tous ceux qui savent le mériter. Et qui, bien entendu, sauront voter pour la bonne liste au mois de mai prochain. Au nez et à la barde d'un CNOT qui vient jouer maladroitement les empêcheurs de tourner en rond...