Entre cinéma, musique et théâtre, le Rio est une scène de rencontre avec le public, autour de projets socialement et artistiquement engagés. La salle de cinéma le Rio a entamé 2016 avec l'annonce d'une programmation alléchante. Films, concerts, théâtre et rencontres sont au menu de cet espace qui se donne une portée multiculturelle. Installé en plein centre-ville de Tunis, il établit un lien entre les arts et leurs publics, pluriels, divers, dans la richesse de la rencontre et du débat. L'esprit du lieu a été pensé ainsi par son exploitant, le producteur de théâtre et de cinéma Habib Belhedi, qui commente pour nous les principaux rendez-vous de ce début d'année. Il y a tout d'abord l'espace, porteur d'une vision que traduit la programmation. Le Rio, c'est le CinémAfriArt qui pose ses bagages ailleurs, avec toujours la même formule. Ouverte en 2007 par la société «Arts distributions», la salle a permis à de nombreux films tunisiens et à des films d'auteur internationaux de rencontrer des cinéphiles, fidèles à son écran et à son fameux ciné-club. Fermée en 2011 après l'incident survenu pendant la projection de «Laïcité Inch'Allah», le projet de la salle migre vers le Rio, avec des nouveautés, mais aussi des constantes, dont justement le ciné-club. «Au CinémAfricArt, le ciné-club était le cœur de la salle. Nous tenons à ce rendez-vous privilégié de notre public, où ils peuvent débattre du film», nous explique Habib Belhedi. Il nous a livré cette réponse à la sortie de la première séance de ciné-club de ce janvier 2016, mercredi dernier, consacrée à l'adaptation de «Macbeth» de Shakespeare, réalisée en 2015 par Justin Kurzel. Suivront le 13 janvier «Much Loved» de Nabil Ayouch, «Nous les enfants du XXe siècle» le 20 janvier, — un documentaire de Vitali Kanevski que propose au public l'association «Les yeux de l'ouïe» dans le cadre du projet «Réfléchir les images de la prison» — et, le 27 janvier, «A peine j'ouvre les yeux» de Leyla Bouzid. Ce dernier film sortira au Rio quelques jours plus tôt, le 13 janvier, une sortie qui s'accompagnera, le 15 janvier, par un concert de Ghalia Ben Ali, qui incarne le rôle de Hayet dans le film. Sa musique, portée par ses quatre albums, dont «Romeo and Leila» et «Ghalia Benali signs Om Kalthoum», se nourrit de diverses influences, qu'elle fusionne, revisite et chamboule afin de créer son univers sonore. Le Rio a inauguré l'année 2016 en musique, avec le concert «Bargou 08» le 2 janvier, un projet du «front musical populaire» qui revisite le patrimoine de la région de Siliana. Le lendemain, c'est «Al Bahth al mouciki», groupe musical militant fondé à Gabès à la fin des années 70, qui est monté sur scène afin de rendre hommage à Fadhel Sassi, «martyr du pain et de la liberté», assassiné le 3 janvier 1984 à Tunis lors de «la révolte du pain». Les événements de commémoration vont se multiplier cette année au Rio. «Nous faisons partie de cette Histoire commune et nous voulons marquer la mémoire de ces événements par l'art», déclare Habib Belhedi. Il nous annonce d'autres dates : la commémoration des événements du 26 janvier 1978 avec le groupe «Ouyoun el Kalam», la commémoration du décès de Chokri Belaid le 6 février, un concert avec «Les Colombes» le 20 mars ainsi que la célébration du 1er mai, journée internationale des travailleurs. Dans la catégorie musique également, un rendez-vous attendu, aujourd'hui à 20h00, celui de «Théosophie» (philosophie des religions), un projet musical aux influences mystiques, élaboré par le percussionniste Jihed Khmiri et sa formation. Une scène pluridisciplinaire Au Rio, musique et théâtre gravitent autour du cinéma. Ce dernier reste privilégié, assure Habib Belhedi, qui confectionne la programmation de telle sorte que les projections ne s'arrêtent pas. «Dès le départ, la salle a été conçue comme un espace pluridisciplinaire, dans l'aménagement de la scène par exemple», confirme notre interlocuteur. «Elle faisait 6 mètres/ 12 mètres et nous l'avons agrandie à 15 mètres/ 12 mètres de dimensions, ce qui en fait le 2e plus grand plateau des salles de Tunis», ajoute-t-il. La scène du Rio est ainsi favorable à des représentations théâtrales, dont regorge le programme de janvier et février, avec un mini-cycle de «Tounes» de Ahmed Amine Ben Saâd les 29 et 30 janvier, les pièces quasi inédites «L'autre et moi» de Souad Ben Slimane et Alia Sellami et «Khazz» de Noureddine Ouerghi, en plus de «Corps à corps» de Zina Hallak et Zied Touati et deux monodrames de la comédienne syrienne Darina Al Joundi : «Le jour où Nina Simone a arrêté de chanter» et «Ma Marseillaise». Le choix de programmer ces œuvres d'artistes syriennes n'est pas anodin. «Nous voulons rendre hommage à la femme dans le théâtre avec ces pièces qui portent des points de vue différents. Zina Hallak est une syrienne installée à Tunis et Darina Al Joundi est une syrienne qui vit à Paris», nous décrit Habib Belhedi. Le Rio va également inviter des intellectuels tunisiens à s'exprimer sur sa scène, dans ses rendez-vous du «Café culturel», avec le poète Kamel Bouagila le 8 janvier et l'auteur Chokri Mabkhout le 29 janvier. De retour au cinéma, rappelons que l'écran du Rio accueille en ce moment et jusqu'au 12 janvier un cycle de projections du film d'animation «Le prophète», une adaptation de l'œuvre de Khalil Jibran produite par Salma Hayek et réalisée par Roger Allers. Les dimanches 24 et 31 janvier seront consacrés aux enfants avec la projection de «Le voyage d'Arlo» et de «Snoopy-Le film». Le mois de février sera entamé par l'événement «Premiers gestes», une semaine de films méditerranéens tenue du 9 au 10 à Tunis et à Menzel Bourguiba, organisée par le collectif Nachaz-Dissonances en collaboration avec Archipels images afin de faire connaître les œuvres de jeunes réalisateurs du pourtour méditerranéen. Nous reviendrons plus en détail sur cet événement.