C'est un peu comme le croisement des courbes en politique. La cote du Stade Tunisien remonte, tandis que celle du Club Africain s'effondre. Etrange croisement de destins. Le premier se retrouve après s'être perdu, le second se perd après s'être trop bien trouvé. Furia au Bardo. Une marée de drapeaux et de banderoles n'ont pas fini de s'agiter dans les gradins du nouveau stade Hédi Enneïfer. En quelques secondes, c'est toute la ville qui s'est spontanément remplie pendant que les cœurs scandaient aux couleurs du club. Quand il est uni, le Stade est en mesure de gagner, de vaincre. Et quand il s'agit de faire la fête, il prend les devants. Oui, c'est bien, le ST l'assoupi, le menacé, le déstabilisé qui connaît une mue heureuse. Les stadistes demandent souvent à voir avant de parler. Les quatre buts mis dans les filets clubistes, on ne les voit pas tous les jours. C'est un grand plaisir de retrouver un collectif et d'évoluer dans une pareille ferveur. Ici, plus qu'ailleurs, on se sent proche de l'attraction, de la féerie, du jeu, du show... Bienvenue au Bardo, terre brûlante du foot et du spectacle. Toute la ville se retrouve aujourd'hui derrière les couleurs rouge et vert. Qui a dit que le ST avait enterré rapidement ses espoirs après une phase aller tellement compromettante, tellement frustrante dans le jeu et dans les résultats. Sur le tableau noir, des phrases chocs et Kanzari en a fait une liste de recommandations à ses joueurs : «Comment battre le CA?», «Comment gagner et s'épanouir?», «Comment connaître la gloire?». Autant de recommandations de la part d'un entraîneur qui travaille suffisamment, et parfois plus qu'il n'en faut, l'état d'esprit des joueurs. Donc, la solidarité, la combativité, le caractère. Donc, la conscience, l'intérieur, la personnalité... L'exemple le plus probant est la manière avec laquelle l'équipe stadiste s'est imposée dans son nouveau stade et face à un adversaire traditionnel. Il faut dire que le redressement est venu au bon moment. Au bon endroit aussi. Plus encore: il était tellement spectaculaire qu'il a toutes les chances de remettre rapidement l'équipe sur la voie de la réussite, du surpassement et de l'abondance. Un match peut-il suffire pour retrouver le haut niveau? Jusqu'à la fin de la phase aller, le ST était relégué au bas du tableau et menacé dans la foulée par le spectre de la relégation. Aujourd'hui, ses espoirs ne sont que plus grands. Il avait une mauvaise image qu'on est train de rectifier de la manière la plus significative et surtout la plus éloquente... Etrange croisement de destins La victoire sur le Club Africain et la manière avec laquelle elle a été obtenue devraient nécessairement engendrer une obligation d'exemplarité en prévision de ce qui reste à faire. Le plus difficile est encore à venir. Certainement aussi important que ce qui a été atteint. C'est un peu comme le croisement des courbes en politique. La cote du Stade remonte, tandis que celle du Club Africain s'effondre. Etrange croisement de destinées. Le premier se retrouve après s'être perdu, le second se perd après s'être trop bien trouvé. Si décriée, parfois même «moquée», l'équipe stadiste est entrée en phase de rédemption à l'heure où l'espérance clubiste est en passe de s'effriter. Pour un oui ou pour ou non, les détracteurs de l'équipe stadiste n'ont jamais manqué une occasion de la condamner et de mettre en cause tout ce qui est entrepris ici et là. Bon ou mauvais. A un certain moment, elle était devenue synonyme de l'échec accompli et des débâcles totales. Et tant pis pour le potentiel de certains joueurs aux qualités certaines. Il est vrai qu'il lui est arrivé souvent de trébucher, de marquer le pas, de faiblir et de chavirer. D'accumuler les défaillances. Mais ses éternelles insuffisances ont toujours été condamnées plus lourdement que celles du CA. Quand le ST perd, les critiques tombent et s'amplifient à une vitesse déraisonnable. A force de ne rien lui pardonner, mais aussi de revers et d'échecs, des hauts et des bas dont il assume en grande partie la responsabilité, on a fini par penser qu'il n'avait pas de limites en toute chose, que tous les travers sont possibles dans ce qu'il entreprend. Aujourd'hui, il n'est pas dit que l'équipe va arrêter de perdre, mais il nous semble que le Stade a fini par comprendre qu'il devait travailler, tirer les leçons de ses déboires. Sous la houlette d'un entraîneur érigé en bienveillant encadreur et commandeur, l'équipe paraît transfigurée. Ceux qui ne voient pas cela de bon œil prétendent que cela ne durera pas, que les mauvais démons ressurgiront, à un moment ou un autre. A ceux-là, on répondra gentiment qu'il est temps d'arrêter la fixation sur le Stade et qu'on ferait mieux de prodiguer les avisés conseils et les critiques, autrement et de manière plus constructive. Sans grands moyens, le ST a toujours su attirer de grandes stars du football tunisien. Quelque part, on ne peut rien contre la volonté d'une équipe quand elle sait tirer les leçons de ses échecs. Le Stade démontre que ses anciens démons ne sont pas vraiment une fatalité...