Fermée sous la pression des habitants et rouverte, récemment, sur décision du ministère de l'Environnement, la décharge contrôlée d'El Guenna dans la région demeure, a priori, une solution d'urgence, mais non définitive. La nuit de lundi à mardi — où les affrontements police-manifestants survenus suite à la réouverture, sans solution, de la décharge de Agareb à Sfax, se soldant par la mort d'un homme —, fut cruciale pour attiser les tensions. La ville, qui, pendant plus de 40 jours, croule sous les déchets, est entrée, hier, dans une grève générale. En réponse à l'appel de l'Urtt dans la délégation sinistrée, tous les secteurs public et privé ont débrayé toute une journée. Et la crise écologique semble revenir à la case départ. Pourquoi la situation a-t-elle ainsi dégénéré ? Fermée sous la pression des habitants et rouverte, récemment, sur décision du ministère de l'Environnement, la décharge contrôlée d'El Guenna dans la région demeure, a priori, une solution d'urgence. Cela dit, elle continue, jusqu'à nouvel ordre, à accueillir les tonnes des ordures ménagères et assimilées qui jonchent, depuis août dernier, les artères de Sfax et ses environs. La reprise de son activité ne serait que pour un délai imparti. Soit, d'ici avant la fin de 2022, date d'expiration de la concession de son exploitation. Quitte à renouer avec le provisoire qui dure, avec en toile de fond le maintien d'un statu quo devenu intenable. Alors que la persistance d'un tel environnement de pollution était, principalement, la goûtte d'eau qui a fait déborder le vase. Cap sur la valorisation Et même la dernière visite de la ministre de tutelle, Mme Leïla Chikhaoui Mahdaoui, n'a pas, semble-t-il, mis du baume au cœur. Sauf que, aux dires de Mme Zouhour El Methammem, responsable au ministère, une rencontre a eu lieu avec la société civile de la région ayant débouché sur des propositions aussi stériles qu'inapplicables. Ironie du sort ! A Agareb, le problème est si complexe qu'on le traite à la légère, sans vision perspicace ni plan d'action efficace. « Pour ce faire, notre stratégie de gestion vise à mettre le cap sur la valorisation des déchets », révèle-t-elle sur un plateau télévisé sur la Nationale 1. Tout en insistant sur l'implication de toutes les parties intervenantes, société civile et médias compris, afin de venir à bout de toute forme de pollution. Suite aux derniers événements nocturnes, le ministère de l'Intérieur a annoncé des mesures urgentes au profit de la région: nettoyage immédiat et élimination des déchets accumulés dans les quartiers de la ville, opérations de contrôle de l'air et du niveau de la pollution industrielle générée, ainsi que le lancement des travaux de réhabilitation du site d'Agareb. Cela va-t-il apaiser les tensions ? Certains partis politiques, Ettayar et Al Joumhouri en l'occurrence, ont imputé la responsabilité au Président de la République. Ces partis, faut-il le noter, se sont déclarés opposants aux décisions du 25 juillet dernier. Des partis derrière la crise Quant à Sarhane Nasri, président du parti «Alliance pour la Tunisie», il voit les choses autrement. Natif de Agareb, il a abordé la genèse de la crise, sur fond de mécontentement et de sympathie. Evoquant les interventions musclées des forces de l'ordre face aux manifestants, Nasri soutient fermement le droit inaliénable des habitants à un environnement sain et propre. « La décharge d'El Guenna, origine de la crise, aurait dû être fermée depuis 2013 pour qu'un plan de traitement et de recyclage des déchets soit, alors, mis en place », estime-t-il. Ce qui est de nature à rétablir la situation. Et maintenant que les dés sont jetés, l'homme a opté pour le dialogue, comme voie de solution. Car, à l'en croire, la crise écologique que vit sa région natale revêt, en quelque sorte, une dimension politique, alimentée par des règlements de comptes désavoués. Surtout que, poursuit-il, les partis représentés à la municipalité de Sfax, dont notamment Ennahdha, sont connus pour être anti-Saïed et hostiles à son mode de gouvernance post-25 juillet. «D'autres parties, telles que Ettakattol, Attayar, Al Joumhouri, Citoyens anti-coup d'Etat, sont aussi accusées d'avoir jeté de l'huile sur le feu et fait monter les habitants contre les autorités», indique Nasri, précisant qu'il n'est pas pro-Saïed, mais pour sa volonté de rectifier le tir et sauver le pays. Ces dernières, il les a qualifiées de partie du problème et non de solution. Quelles alternatives ? Que propose «l'Alliance pour la Tunisie», comme alternative? Son président n'a pas hésité à émettre une série de recommandations en guise de solution : suspension des activités de l'Anged, réactivation du mécanisme du partenariat public-privé et encouragement des jeunes à la création de projets de collecte, de recyclage et de valorisation des déchets. Des projets censés générateurs des postes d'emploi verts et amis de l'environnement (énergies renouvelables...). A cet effet, conclut-il, les banques devraient, elles aussi, s'y impliquer davantage, afin de leur faciliter les financements nécessaires à l'investissement.