Une soirée poétique et rêveuse, hissant le drapeau de l'authenticité sur de nouveaux territoires Vendredi dernier, l'auditorium de l'Institut français de Tunisie a accueilli le premier concert d'une série dédiée à la mémoire de feu Hamadi Chérif, artiste et galeriste décédé en 2014. Ablaye Cissoko et l'ensemble Constantinople ont été les invités de ce premier événement qui sera suivi d'autres, dans le cadre des soirées «Musique du monde - Hamadi Chérif», organisées par l'assocation «la Sirène de Dar Chérif Djerba» et le ministère de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine, en partenariat avec l'Ift. Ablaye Cissoko à la kora, Kiya Tabassian au sitar et Keyvan Chemirani au zarb. Un trio enchanteur qui fait voyager la musique africaine sur un tapis persan. Le projet de leur rencontre musicale a commencé en 2012 et a été courroné par la sortie de leur album «Jardins migrateurs» en 2015. Sous le signe de l'ouverture et de la générosité, ils ont interprété des titres de cet album, qui évoque la mémoire des épopées mandingues et des cours persanes. Ils ont également salué l'âme de feu Hamadi Chérif par une composition qui lui est dédiée, et qu'ils ont jouée pour la première fois, vendredi. «Jardins migrateurs» est une ode à la tradition orale, que l'on retrouve dans les deux cultures d'origine des musiciens. «Entre le djéli malinké conseillant les rois-guerriers et narrant leur glorieuse généalogie, et le bakhshi du Khorasan, lettré, chamane et barbier, il ne semble y avoir qu'une corde de luth. C'est à croire que les mélodies et l'oralité viennent autant de la terre, de l'eau et de l'air, que du cœur des Hommes», expliquent les artistes dans la présentation de leur projet. Sur scène, c'est une conversation qui s'installe, entre amis de longue date, qui se connaissent et se redécouvrent à travers la traduction simultanée de leurs instruments. Dans chaque morceau, il y a de la place pour les paroles mandingues et persanes. La kora, le sitar et le zarb donnent, eux, une leçon d'humilité en partageant la scène et les notes dans une harmonie exemplaire, qui ne les empêche point, par moments, de partir seuls sur le solfège avant de retrouver le vol des jardins migrateurs. La soirée a été ainsi poétique et rêveuse, hissant le drapeau de l'authenticité sur de nouveaux territoires.