Par Jalel Mestiri Dans le cadre de la diversification économique, le football peut constituer un moteur de croissance évident. Dans la littérature sportive et dans les pays qui ont de grandes traditions de football, les clubs sont très souvent valorisés en fonction de leurs effectifs. Une valeur de marché est ainsi accordée à chaque joueur faisant partie de l'effectif et le club acquiert alors la valeur sommée de l'ensemble de ses joueurs. La valeur des actifs des clubs est cependant incertaine. Quoi de plus imprévisible qu'une blessure, tout autant qu'un résultat de match. Et la sanction est immédiate : les joueurs ne sont plus là, les résultats ne suivent plus et riment avec baisse de la billetterie et des revenus liés au sponsoring. S'il est difficile de lui attribuer une valeur, ou encore des actifs évalués, la popularité grandissante du football ne laisse pas indifférent. Elle est susceptible aujourd'hui d'amener les entreprises et les hommes d'affaires à y consentir des investissements importants. Dans le cadre de la diversification économique, le football peut aussi constituer un moteur de croissance évident. Les clubs tunisiens ont la valeur de ce qu'ils possèdent. Celle des joueurs fluctue selon leurs performances, leur compétitivité et leur persévérance. Comment valoriser financièrement le football? Que vaut un club ? Le football, et derrière lui la vente et l'achat de joueurs, peut-il être une activité rentable et un produit d'investissement? Comme souvent, les réponses à apporter dépassent en complexité la simplicité des questions. Un avis qu'il faut nuancer : le football tunisien, qui ne s'est jamais réconcilié avec l'argent, serait une activité non rentable. Le statut des clubs oscille entre amateurisme et professionnalisme dit «non-amateurisme». Les clubs sont considérés par les textes en vigueur comme des associations qui ne doivent pas se faire de l'argent. Mais tout cela ne doit en aucun cas imposer une restriction. On peut évoquer le thème et l'approche de rationalisation, mais jamais ceux d'interdiction et d'isolement. Le ministère de tutelle et la Banque centrale lancent l'initiative d'interdire le recrutement des joueurs et des entraîneurs étrangers. L'objectif n'est autre que celui d'assurer l'équilibre budgétaire et monétaire du pays. Le constat ne laisse pas indifférent : la Tunisie ne peut plus se permettre un saignement financier, rien que pour payer les salaires des entraîneurs et des joueurs étrangers. On peut d'ailleurs comprendre le désarroi et le malaise de la Banque centrale face aux sommes astronomiques en devises qui vont à l'étranger. Mais un championnat de football ne saura jamais évoluer et se développer s'il se renferme sur lui-même. Fermer la porte aux étrangers, cela équivaut inéluctablement à ne plus exporter nos joueurs. La politique adoptée par certains clubs en matière de vente de joueurs a au contraire permis d'assurer au pays des rentrées d'argent considérables en devises. Certains clubs sont même devenus spécialistes en la matière et n'investissent jamais à fonds perdus. Le cas de l'Etoile dont la cession de Bounedjeh à Al Sadd du Qatar a valu la rentrée en devises de la somme colossale de 4,5 millions d'euros. Le CSS, mais aussi l'Espérance ont connu aussi des réussites pareilles dans la vente de joueurs pourtant achetés des fois à des sommes presque dérisoires. Le football remue les passions. Il attire les investisseurs. Mais les indicateurs les plus importants devraient aussi se situer au niveau des lignes comptables des clubs. Le niveau d'endettement, le résultat net sur les saisons ou encore les liquidités disponibles et les actifs devraient être observés scrupuleusement. En matière de placement, on sait souvent ce que cela coûte, ce que cela génère, mais on ne connaît pas bien ce que cela vaut. Alors, il ne s'agit pas seulement de savoir ce que vaut un joueur, mais de déterminer ce que vaut un investissement. Au lieu de passer directement à l'interdiction des recrutements des joueurs et des entraîneurs étrangers, il serait préférable de rationaliser tout le secteur et en particulier les dépenses des clubs. L'autorité de tutelle et la fédération pourraient exiger par exemple des clubs une balance excédentaire sur un nombre d'années, ériger et définir des règles sur le plan juridique. Les transferts devraient ainsi se faire conformément à la réglementation mise en place et les joueurs étrangers seraient appelés à payer leurs impôts. Une limite pourrait aussi être imposée aux salaires qui, comme indiqué dans notre dossier, ne devraient pas dépasser 5 % du budget alloué à la section de football. Rentable ou pas, la valeur d'un joueur n'est qu'estimation.