L'ancien membre fédéral estime que les pouvoirs publics tunisiens ont accepté que le monde du sport ne soit pas assujetti aux mêmes règles qui régissent les autres secteurs d'activité «A mon avis, il faut scinder le problème en deux. Mettons-nous d'accord sur le principe qu'à l'instar de toutes les personnes actives dans les autres secteurs, un footballeur doit supporter un impôt à concurrence de son revenu. En d'autres termes, la loi doit s'appliquer à tous. Malheureusement, le football et le sport d'une façon générale ont échappé à cette règle. A titre d'exemple, un instituteur qui touche 700 dinars par mois est obligé de soustraire de ses revenus ses impôts et sa couverture sociale et vit avec ce qu'il lui reste. Or, le footballeur qui gagne 100 fois plus, n'est malheureusement pas assujetti aux mêmes règles, ce qui constitue une grande disparité fiscale. Chez nous, l'exception s'est érigée en principe. Depuis 1994, année où notre football est devenu non-amateur et jusqu'à nos jours, l'Etat n'a jamais imposé aux footballeurs le payement de leurs impôts, et ce, malgré l'existence des lois et des textes en vigueur et qui sont donc exécutoires. Cela veut dit qu'il y avait une tolérance voulue. Les pouvoirs publics tunisiens ont accepté que le monde du sport ne soit pas assujetti aux mêmes règles qui régissent les autres secteurs d'activité. Cette tolérance a duré de longues années sans qu'il n'y ait aucune réaction. La question qui se pose: est-il possible aujourd'hui après 22 ans d'inertie fiscale de demander aux clubs d'honorer toutes leurs dettes fiscales, à défaut d'être privés de subventions de l'Etat? Je pense que la problématique n'a pas été bien posée. Maintenant le mal est fait et l'Etat y a largement contribué. Quand les pouvoirs publics ont voulu traiter le dossier de Roger Lemerre, ils y sont arrivés. La FTF en a payé le prix fort, car Lemerre a encaissé les montants de ses salaires bruts. La Fédération a été mise devant ses responsabilités et a versé près de deux millions de dinars, le montant qui devait être retenu à la source sur les salaires de Roger Lemerre. Aujourd'hui si on veut faire le suivi fiscal, on ne peut tenir que les clubs pour responsables. Or, nos associations sportives sont déficitaires. Chaque intersaison, la plupart d'entre-elles attendent qu'on leur verse les subventions pour pouvoir commencer la préparation. Les clubs n'ont pas les moyens de payer leurs arriérés fiscaux. A mon avis, la solution sera de faire table rase du passé et commencer à comptabiliser les retenues fiscales à partir du 1er juillet 2015, vu que les clubs ont été avertis qu'à partir de cette date-là, ils devaient appliquer le principe de la retenue à la source. Ils n'ont donc pas de prétexte pour échapper aux impôts. Les arriérés précédant la date du 1er juillet 2015 doivent être balayés dans le cadre d'une amnistie fiscale. Il faut regarder la réalité en face. Les clubs sont dans une situation financière désastreuse. Ils sont dans l'incapacité de faire face à leurs engagements actuels. Que dire de prendre à leurs charges un impact fiscal qui est inhérent à une gestion ancienne. Et cerise sur le gâteau : ils sont privés d'aide publique. Il faut savoir que nous avons tous un objectif commun : qualifier l'équipe de Tunisie à la phase finale de la Coupe du monde de 2018. Pour ce faire, il faut doter les clubs d'une certaine assise financière, car ce sont eux qui forment les joueurs. Il faut s'asseoir autour d'une table, signer un protocole d'accord qui stipule que les clubs bénéficient d'une amnistie fiscale, mais doivent honorer leurs engagements fiscaux à partir de la date du 1er juillet 2015, que tout le monde applique et qu'on n'en parle plus. Sinon, on continuera à tourner dans un cercle vicieux dont on ne sortira plus».