Le moment est venu pour leur donner une autonomie financière. C'est fou ce que les temps ont changé, et les mentalités aussi. Jadis, à l'ère de l'amateurisme, les clubs se portaient bien, grâce notamment aux subventions de la tutelle, particulièrement le ministère de la Jeunesse et des Sports, et les municipalités. Sans compter les dons des sociétés industrielles et des particuliers. Chaque année, et à la fin de chaque exercice, les clubs tenaient leur assemblée générale où étaient présentés à l'audience les rapports financiers. Rares étaient les déficits à cette époque. Et même s'il y en avait, ils étaient aussitôt épongés par la tutelle. Aujourd'hui, le scénario est tout à fait différent. Depuis 1995 exactement, date de l'année où le professionnalisme a vu le jour en Tunisie. Un cahier des charges a été émis et les clubs ont franchi depuis une nouvelle étape. Des contrats sont proposés aux joueurs avec des salaires fixes, sans compter les primes de victoire, de signature et de rendement. L'Eldorado en somme pour les footballeurs. Du coup, les clubs se sont mis à recruter à droite et à gauche, sur le marché local et à l'étranger, en Afrique notamment. Notre championnat national a pris de l'ampleur, mais à quel prix, il faut l'avouer ! La concurrence entre les grosses cylindrées de la compétition a été la locomotive pour les clubs du bas de l'échelle. Sans coup férir, ces derniers ont été gagnés par la maladie des recrutements onéreux. Résultat : petits et grands clubs sont arrivés quelquefois au point de non-retour. Ils n'avaient plus les moyens d'honorer leurs engagements financiers envers leurs joueurs. La grève pour revendiquer D'un coup, patatras! Victimes de quelques mois d'impayés, les principaux acteurs ont commencé à déclencher des mouvements de grève. C'est pratiquement une mode lancée par nos footballeurs pour protester. Cette manière de voir les choses n'est pas courante en Europe, et il y a une raison à cela. Dans le Vieux continent, les clubs sont mieux gérés. Ils disposent de rentrées d'argent fixes et de différentes sources financières qui leur permettent de s'autofinancer. Ce qui n'est pas le cas chez nous. Nos clubs dépendent malheureusement encore des subventions de l'Etat et autres dons. Le mal de notre football est que nous sommes passés à une étape supérieure, le professionnalisme, sans donner un moyen de subsistance aux clubs. Notre professionnalisme est erroné. Il est régi par des lois de 1950, donc révolues. Nos clubs vivotent pour ne pas en dire plus. Ils jonglent pour pouvoir disposer de ressources financières fixes. Ceux qui ont les moyens ont opté pour les boutiques où se vendent les maillots et des gadgets à l'effigie du club. Ce qui est aux yeux de la loi strictement interdit. Mais la tutelle laisse faire et ne réagit pas. Toutefois, créer une boutique n'est pas à la portée de tous les clubs. A ce jour, seuls les quatre grands ont eu l'opportunité de le faire, dans l'illégalité, comme nous l'avons souligné. Le moment est venu pour que les choses changent. Les clubs doivent passer au palier supérieur et se transformer en sociétés anonymes ou à responsabilité limitée. L'Etat aura beaucoup à gagner. Les joueurs seront désormais couverts socialement et sur le plan financier. Il faut des ressources fixes pour une gestion saine. Nous ne parlerons pas des clubs européens. En Egypte par exemple, Al Ahly et Ezzamalek sont des modèles. Ils disposent de conseils d'administration et de gros moyens financiers. Ils ont des placements qui leur rapportent énormément. Nous avons rarement entendu parler d'un mouvement de grève au pays des Pharaons. L'exemple est à suivre. En Tunisie, nous avons perdu beaucoup de temps. Il est grand temps que les mentalités changent et qu'on opte pour le vrai professionnalisme.