S'il dit avoir répondu à l'appel du devoir, il avoue avoir été lâché par les siens. L'ancien joueur et entraîneur du club du Bardo revient sur la relégation de son club et ses rapports avec la grande famille stadiste Pour l'histoire, votre nom sera associé à la relégation du Stade Tunisien, pour la première fois de son histoire, en Ligue 2. Quel sentiment en gardez-vous? Pour être honnête, c'est un triste événement qui me restera, pour toujours, en travers de la gorge. Mais la vie d'un entraîneur est faite de succès et d'échecs. Tout technicien qui exerce dans notre championnat met ses valises devant la porte avant même de commencer. La tension dans notre football est telle que responsables et supporters n'ont pas suffisamment de patience pour attendre qu'un projet sportif aboutisse. Le Stade Tunisien que j'ai retrouvé ces derniers mois a beaucoup changé. L'ambiance n'est plus la même. Il y a beaucoup de tension et on travaille constamment sous la pression. Or, travailler sous pression au quotidien n'a jamais été par le passé le cas au Stade Tunisien. Aujourd'hui, il y a de l'agitation dans le sillage du club même quand l'équipe gagne. J'ai tout laissé derrière moi pour venir sauver mon club. Je n'y suis pas arrivé. Et cela m'attriste énormément. Mais n'avez-vous pas pris un gros risque en voulant sauver le Stade en seulement quatre matches? Si j'ai tout laissé derrière moi au Qatar pour venir sauver mon club, c'est que cela me paraissait comme une évidence. Je n'ai pas hésité une seconde. Au fait, on ne prend pas le temps de la réflexion quand on est un enfant du club. Mais il faut bien clarifier les choses aux yeux du grand public. Je n'ai dirigé le Stade Tunisien que le temps d'un match. J'étais sur le banc face à l'AS Marsa. J'avais fait match nul. J'ai donc obtenu un point dans un court mais difficile déplacement. Puis, il y a eu la suspension. Aucun entraîneur ne peut réussir quelque chose dans de telles conditions. Réellement, je ne suis pas un acteur principal dans la relégation du Stade Tunisien en Ligue 2 puisque je n'ai dirigé l'équipe que le temps d'un match. Je suis venu pour quatre matches, j'en ai dirigé un seul. L'impossible n'est pas du domaine du football Mais en dehors de la suspension et si elle n'avait pas eu lieu, vous avez pris quand même un gros risque pour votre carrière d'entraîneur... Je ne fuis pas mes responsabilités. Loin de moi cette idée. Quand je suis revenu du Qatar pour prendre en main l'équipe, je tablais sur quatre rencontres. Je ne suis pas dupe : sauver le Stade Tunisien de la relégation n'était pas chose évidente. Oui, j'ai pris un gros risque, comme vous dites. Mais à mes yeux, il y avait une lueur d'espoir pour sauver les meubles en toute dernière minute. Au fait, je crois à une chose : l'impossible n'est pas du domaine du football. Tant qu'on joue, on a la possibilité de gagner son match et, par conséquent, engranger les trois points. Je ne vous cache pas mon ambition à la fin de la saison écoulée, celle d'être l'entraîneur qui aurait sauvé le Stade Tunisien de la relégation. Je savais que je prenais des risques, mais cela valait la peine sur le double volet sportif et émotionnel. Car quoi qu'il arrive et quoi que je fasse de ma carrière d'entraîneur, le Stade Tunisien restera mon club de cœur. Je crois que malgré la relégation, j'ai eu le mérite d'avoir pris en main l'équipe au moment où d'autres techniciens, enfants du club, ont fui leurs responsabilités. Être l'entraîneur qui sous sa houlette le Stade a été relégué : voilà une idée qui effrayait beaucoup. J'ai eu le courage de le faire à mes risque et périls. Il y a même des entraîneurs qui ont exigé des sommes colossales pour entraîner l'équipe. J'ai fait le choix du cœur. Un choix que je ne regrette pas malgré tout ce qui s'est passé. Aucun regret, même si, sur le plan sportif, c'était un choix suicidaire... Oui, je n'ai pas de regrets. C'est un choix que j'assumerai toute ma vie. Et le gros salaire que vous avez laissé au Qatar, vous ne le regrettez pas, surtout avec la manière par laquelle vous venez de quitter le club? Je ne comprends pas pourquoi il y a tant de tension depuis que l'équipe a été reléguée en Ligue 2. Je pense avoir fait une bonne entame de saison ponctuée d'une victoire et deux matches nuls. Il n'y a donc pas le feu à la maison. D'autres clubs ont perdu les trois premiers matches et gardent quand même leurs entraîneurs. Oui, j'ai laissé un contrat en béton derrière moi au Qatar, mais je ne regrette pas d'avoir essayé de sauver les meubles au Stade Tunisien. Franchement, si c'était à refaire, le referiez-vous? Pour être franc, mon dernier passage au ST était pour moi une grande leçon de vie. Si je devais le refaire, je suivrais la voie de la raison avant celle du cœur. Trop de pression dans l'air Vous êtes quand même sorti par la petite porte. Avez-vous le sentiment d'avoir été trahi par votre propre famille? Avant tout, je tiens à mettre les choses au clair : on ne m'a pas viré, mais j'ai démissionné de mon poste. Comme je vous l'ai dit, l'ambiance a beaucoup changé au club. Il y a trop de tension dans l'air au point que le simple fait de diriger une séance d'entraînement est devenu un calvaire. Il y a toujours sur les gradins une frange de supporters qui critique mes choix et même ma façon de diriger les entraînements. Au fait, d'anciens joueurs stadistes m'ont mis les bâtons dans les roues avant même que je ne commence la saison. En voulez-vous à des personnes en particulier? Ce n'est pas dans ma nature de dire du mal des gens. Au contraire, je tiens à remercier Jalel Ben Aïssa et Raouf Guiga pour la confiance qu'ils m'ont accordée. Quel message voulez-vous passer au public stadiste? Un supporter n'est pas un technicien. Le malheur au Stade est que le public met son nez dans les affaires techniques qui sont du domaine de l'entraîneur. Du coup, quand on est entraîneur du ST, on n'arrive pas à diriger normalement une séance d'entraînement. Au fait, ce n'est pas au supporter de dicter ses choix au technicien. A chacun sa tâche. Le supporter encourage l'équipe sur les gradins et l'entraîneur la dirige sur le terrain. Il faut que les règles soient respectées pour que notre équipe retrouve son élan. Tout ce que je souhaite, c'est qu'on laisse travailler le nouveau staff technique dans la sérénité pour le bien de l'équipe. Pour finir, quels sont vos projets sportifs? J'ai des contacts en Tunisie et au Qatar aussi où je garde de bons rapports. Je prendrai le temps de réfléchir avant d'entamer une nouvelle aventure que ce soit ici ou ailleurs. Mais avant de signer pour un autre club, je pèserai le pour et le contre. Car j'ai beaucoup appris de ma dernière mésaventure.