« Système militaire et culture de la citoyenneté », tel est le thème d'une conférence nationale tenue, hier matin, au Centre national de topographie et de télédétection, logé au sein de la caserne militaire d'El Aouina à Tunis. La manifestation, organisée à l'initiative de la Direction du patrimoine, de l'information et de la culture, s'achèvera, demain, et avec un ordre du jour bien chargé d'interventions sur diverses questions liées au rôle de l'armée dans la consécration de l'esprit de citoyenneté, de volontariat et de solidarité. Autant de valeurs qui composent avec la nouvelle identité de l'armée post- révolutionnaire. Et le lieutenant-colonel Abdelaziz Bouguezzi a mis cette philosophie de conscience dans une logique de pensée, d'actes et de comportements. L'idée, certes, est de revaloriser le principe de citoyenneté, à l'aune de la transfiguration qu'a connue la « Grande muette », depuis sa fondation, il y a, déjà, soixante ans. Cette somme d'acquis et d'expérience cumulative presque séculaire offre, aujourd'hui, un cadre idéal de réflexion sur la portée de la citoyenneté dans la politique de défense nationale afin de la traduire en culture citoyenne. Un véritable projet socioculturel qui devrait revêtir une dimension plus large, associant le civil au militaire et en se focalisant sur la conception d'un sens commun d'appartenance à la patrie. A l'ouverture des travaux, le ministre de la Défense, M, Farhat Horchani, a souligné d'emblée que ce débat s'inscrit au cœur des préoccupations de l'institution militaire, laquelle étant, toujours, déterminée à accompagner le nouveau processus de transition démocratique. Cela s'explique, selon lui, par la restructuration du ministère de la Défense sur la base de la bonne gouvernance, la diffusion de la culture des droits de l'Homme dans le milieu militaire. Et partant de ces références constitutionnelles consacrant le principe de citoyenneté, l'on tend à reconstruire une nouvelle culture moderniste commune, susceptible d'instaurer une citoyenneté à vocation cognitive, culturelle et institutionnelle. Ainsi, tout devra se concrétiser dans la pratique. Et puis, déduit-il, la citoyenneté demeure une culture sociétale, d'autant qu'elle revêt l'aspect d'une conscience collective qui se traduit en mode comportemental, dans les formes du pouvoir, des systèmes de production, les manières de conduite et de l'exercice politique, culturel, intellectuel et socioéconomique. Mais, à l'en croire, pour mieux comprendre cette approche citoyenne, il importe de se poser autant de questions : qu'entend-on par citoyenneté et quelles sont ses manifestations?, Sur quoi repose-t-elle ? Quel rôle incombe-t-il aux trois milieux de socialisation, en l'occurrence la famille, l'école et la société, en matière d'éducation sur la citoyenneté ? Comment faire pour l'ériger en besoin à la fois cognitif et opérationnel, émanant du devoir, de cohabitation et du respect de l'autre ? Citoyenneté-modernité, quel rapport ? L'accomplissement du service national comme exemple de citoyenneté ? Et bien d'autres questions qui incarnent l'importance qu'il y a de faire preuve de bons citoyens. Pour M. Horchani, la réponse à ces interrogations relève de ce qu'on devrait réaliser à cet effet. Tout d'abord, la continuité de l'édification de l'Etat de droit et des institutions, à même de réussir la transition démocratique, en mettant en place un modèle de développement économique juste et équitable. De même, la réforme éducative, en tant que processus créateur des valeurs de la modernité, dans le but de construire une société modérée et équilibrée. Il est, aussi, question d'associer la sécurité et la défense aux défis de développement et d'y faire participer les médias et la société civile, de par leur rôle de premier plan dans la conscientisation de la culture de la citoyenneté. Et là, le ministre a relevé que son département s'attache à tracer les contours d'une stratégie de défense démocratique, en réaction aux menaces terroristes non conventionnelles. Dans ce sens, il a passé en revue une série d'initiatives militaires réparties en dix axes majeurs : création d'un Livre blanc sur la politique défensive et sécuritaire dans le cadre d'une stratégie à long terme, la révision de la loi sur le service national, conformément à la constitution et en réponse au nouveau contexte socioéconomique et des jeunes. Il s'agit aussi d'ouvrir un centre de recherches militaires propres aux besoins des soldats, de s'ouvrir aux autres centres internationaux, de renforcer les relations de l'armée avec la société civile et de faire participer l'armée aux manifestations éducatives, culturelles et scientifiques. Il importe, ici, également, d'ouvrir les musées militaires au public pour préserver la mémoire nationale, d'organiser des formations à l'intention des rédacteurs en chefs des médias et de consolider l'habitude du salut du drapeau dans les écoles et les universités. Evoquant l'hydre terroriste, le ministre a tenu à souligner que la solution militaro-sécuritaire ne suffit pas à elle seule. A vrai dire, il demeure impératif d'adopter une approche de lutte multidimensionnelle, où le politique s'associe à l'économique et le social cadre avec le culturel. « C'est ainsi qu'on peut faire face à l'extrémisme, avec pour autant un esprit alternatif basé sur le dialogue et l'argumentaire », conclut-il.