Par Jalel Mestiri Pire que la défiance et la guerre médiatique des différentes parties, c'est une stratégie de faiblesse, un aveu d'incompétence. C'est une affaire qui vit sa propre vie, faute de pouvoir (ou de vouloir) reposer sur une observation objective : les a priori semblent plus qu'évidents dans le bras de fer qui oppose la fédération à certains arbitres et la décision spectaculaire de ces derniers de démissionner de tout le corps arbitral. Une première en Tunisie, et peut-être bien aussi dans le monde du football... Qui a tort, qui a raison ? Il faut dire que la relation entre la fédération et les arbitres s'est sensiblement dégradée ces dernières années. On ne saurait suffisamment l'exprimer, mais les rapports qui les unissent sont entrés dans une phase de décomposition. Les différentes parties s'amusent à se renvoyer l'ascenseur et à fuir ainsi leurs responsabilités. Pire que le désaccord et la guerre médiatique, c'est une stratégie de faiblesse, un aveu d'incompétence. L'affaire de démission des arbitres suscite davantage de questions qu'elle n'apporte de réponses !... Une image brouillée s'est imposée progressivement quand celle de la majorité des concernés est entachée d'un dérapage évident. Mais l'opacité des faits laisse en suspens une question majeure: n'avait-on pas contribué, aussi bien par maladresse que par malveillance, à l'installation de ce climat de doute et d'accusations réciproques ? Les éclats, que ce soit dans les coulisses, ou tout autour de la fédération et des arbitres compromettent de plus en plus l'image de marque du football tunisien. C'est le règne de l'énigme et de la confusion. La controverse et la défiance font la belle, draguent les esprits, serrent les cœurs et scellent les langues dans les bois. On entend et on voit de tout dans un étrange brouhaha. Si on parle, c'est comme sans savoir, et si on sait, c'est surtout sans parler. Laissant la place libre aux humeurs des uns et aux rumeurs des autres. La politique d'enfermement dans laquelle s'est réfugiée la fédération et la fuite en avant de certains arbitres renvoient l'image d'un football coupé du reste du monde. On ne fait plus honneur à une institution qu'on semble de plus en plus gâcher sans y prendre garde. Ils sont tous allés trop loin. Mais ce n'est malheureusement pas une surprise. Le football tunisien s'est ainsi entraîné dans une spirale à multiples facettes: sportive, morale, éthique, humaine. C'est dans les coulisses ouvertes à tous les vents auto-protecteurs que cela se passe. Reconnaissons cependant que les prémices de cette dégénérescence s'étaient manifestées de manière assez nette depuis belle lurette et que rien n'a été entrepris depuis pour y faire face. Les principes, les valeurs sportives avaient commencé à pâlir et personne ne voulait en convenir. Par peur? Par aveuglément? Nous déplorons qu'il n'y ait eu personne pour tirer la sonnette d'alarme avant et pour rappeler à l'ordre après. Le football est beaucoup plus grand qu'aucun de ses responsables, qu'aucun de ses arbitres. D'un côté comme de l'autre, on est resté bloqués au stade absurde d'une starification négative et une jubilation inépuisable. Autant que cette perte sèche, c'est l'enclenchement pernicieux d'un mécanisme incontrôlable qui semble de plus en plus inopportun. Sans faire de parallèle, on peut tout de même penser que les instances concernées devraient se montrer un peu plus sévères dans certains cas et renforcer la crédibilité du football tunisien. Le problème est grave et entraîne de lourdes répercussions sur l'environnement général. Il y a tout un travail de répression et de prévention à mener. Mais encore faudrait-il se donner les moyens d'agir... Ainsi, le football est-il loin d'être toujours moral ? Il héberge, voire chérit, des parties emblématiques. Certaines injustices, aussi cruelles soient-elles, participent aussi à lui donner une certaine insipidité. À faillir sans péril, on vole sans gloire.