Le Stade avait commencé à pâlir depuis longtemps et personne ne voulait en convenir. Par peur? Par aveuglement? Le Stade en aura-t-il jamais fini avec cette fragilité et cette incohérence qui ne cessent de marquer le rendement de l'équipe d'une saison à l'autre? Devra-t-il éternellement remettre tous ses progrès en question? Si les craintes se confirmaient, il serait inutile, quand le glas retentira, de se demander comment en est-on arrivé là!... On ne se débarrassera pas certes du jour au lendemain de mauvaises habitudes, d'accumulation de tant de défaillances... Mais l'opacité des faits laisse en suspens une question majeure : n'avait-on pas contribué, aussi bien par maladresse que par malveillance, à l'installation de ce climat d'instabilité et de doute. Les éclats, que ce soit dans les coulisses, ou tout autour de l'équipe, compromettent de plus en plus l'image de marque du club. C'est le règne de l'énigme et de la confusion. L'impuissance fait la belle, drague les esprits, serre les cœurs et scelle les langues dans les bois. On entend et on voit de tout dans un étrange brouhaha. Si on parle, c'est comme sans savoir, et si on sait, c'est surtout sans parler. Laissant la place libre aux humeurs des uns et aux rumeurs des autres. Un club qui n'a pas de présent, ni d'avenir, n'a pas de légitimité et même si cela ne représente pas grand-chose, il finit toujours par prendre du recul. Envahis par le doute, rongés par l'épuisement, aussi bien physique que moral, les joueurs, par-delà leur rendement sur le terrain, leur comportement, ou autres gestes et attitudes, ont participé au développement d'un certain malaise. Nous sommes conscients de la pression qui pèse sur eux et qui a été en quelque sorte à l'origine d'une profonde déstabilisation. Mais une saison de championnat engendre forcément des heureux et des déçus, et la pression ne peut constituer une excuse à certains comportements. Les joueurs, porteurs d'images et de valeurs, ont des devoirs. Il faut qu'ils soient à la hauteur de la responsabilité placée en eux et se comportent en sportifs responsables et avertis. Ça fait mal ! Il faut dire que la confusion qui règne aujourd'hui au Stade Tunisien est la conséquence aussi d'un manque d'autorité. En effet, si les dispositions sont édictées par les acteurs eux-mêmes, il ne faut pas s'attendre à ce que le climat s'améliore. Reconnaissons cependant que les prémices de cette dégénérescence s'étaient manifestées de manière assez nette depuis belle lurette et que rien n'a été entrepris depuis pour y faire face. Le Stade avait commencé à pâlir et personne ne voulait en convenir. Par peur? Par aveuglement? Nous déplorons qu'il n'y ait eu personne pour l'avertir avant et pour le rappeler à l'ordre après. Le Stade est beaucoup plus grand que ses joueurs, ses entraîneurs, ses responsables. Autant que cette perte sèche, c'est l'enclenchement pernicieux d'un mécanisme incontrôlable qui semble de plus en plus inopportun: les faiblesses conjoncturelles s'ajoutent aux insuffisances congénitales, les mauvais choix se multiplient, les options fantaisistes s'accumulent, les excommunions s'enchaînent les unes aux autres, les principes se diluent, la cohérence s'évanouit. De façon générale, on a servi «la soupe» au football le plus dénaturé, le plus inconvenant, et introduit l'idée que le rapport de force sportive dépendrait automatiquement des personnes et des individualités plus que des programmes et des stratégies. On avait toujours l'habitude de faire payer les entraîneurs pour tout ce qui se passe, mais cela n'a jamais fait avancer les choses. Il y a un constat qui n'a pas évidemment de valeur de règle absolue, mais il y a des moments où il faut savoir vivre avec l'échec. Parfois la victoire est plus dure à gérer que l'échec. C'est ce qui s'est justement passé au ST du début de saison. Le club du Bardo a désormais un pied et demi au-dessus du vide. Comment pourrait-il en être autrement alors que l'équipe, pourtant renforcée et recomposée, ressemble à ses devancières. Finalement, le mythe stadiste va-t-il survivre à sa dure réalité? La volonté d'arranger les choses et de combler les défaillances est toujours là. Mais la civilisation du football n'est plus vraiment la sienne. Alors mythe éternel ou nouvelle incarnation? Difficile de trouver une réponse à autant d'interrogations. Une chose est cependant nécessaire : les responsables, s'il y en a toujours, ont aujourd'hui intérêt à y voir de près, pour faire le point, mais aussi et surtout les comptes...