Nida Tounès, mais également tous les autres groupes parlementaires, y compris celui de l'opposition, ont vu dans la présence de la présidente, en sa qualité d'ordonnateur du budget, une condition sine qua-non à la tenue de la séance budgétaire Malgré la tenue de réunions pour tenter de rapprocher les vues entre les blocs parlementaires de la majorité au pouvoir Nida Tounès-Ennahdha, le recours au vote s'est imposé lundi à l'Assemblée. Motif : l'absence de Sihem Ben Sedrine à la séance des débats budgétaires de l'Instance vérité et dignité qu'elle préside. Une esquive qui aurait mis à mal le consensus établi entre les deux alliés. A une écrasante majorité — 90 contre 50 — Nida Tounès a obtenu le report de la plénière à aujourd'hui, dans l'attente du retour de Mme Ben Sedrine au pays. Et ce, contre l'avis d'Ennahdha. Nida Tounès, mais également tous les autres groupes parlementaires, y compris celui de l'opposition, ont vu dans la présence de la présidente, en sa qualité d'ordonnateur du budget, une condition sine qua non à la tenue de la séance budgétaire. D'un autre côté, tout porte à croire que le parti Ennahdha joint par le bloc démocrate (12 sièges) a joué le tout pour le tout afin d'épargner à Mme Ben Sedrine une confrontation difficile avec l'hémicycle. Et pour cause, son audition en commission, il y a quelques semaines, a donné le tempo. Dans une ambiance survoltée, la présidente a dû affronter des critiques acerbes qui ont mis en cause à la fois une gestion des comptes qualifiée de ruineuse mais également sa conduite du processus de justice transitionnelle jugée partiale et injuste à l'égard de certaines parties. Informée à la dernière minute, faux disent les autres ! Deux élus ont expliqué à La Presse les positions de leurs formations respectives et les raisons qui ont motivé leur vote en faveur ou contre la convocation de Mme Ben Sedrine à l'Assemblée. Parce qu'au bout du compte, c'est de cela qu'il s'agit. Badreddine Abdelkéfi, du parti Ennahdha, argumente que tout en jugeant la présence de la présidente de l'IVD importante, il n'aurait pas fallu ajourner la plénière puisque, d'une part, c'est le ministère des Finances qui a présenté le budget, et d'autre part « nous sommes tenus par des délais constitutionnels », a-t-il détaillé. Ajoutant que la date de la plénière a été communiquée à l'instance seulement vingt-quatre heures avant. Pour ce qui est des répercussions, l'élu de Sfax estime que l'alliance avec Nida n'est pas tributaire de ce genre d'événements. C'est une évaluation différente, explique-t-il, d'une situation donnée, et ce n'est pas la première fois que nous adoptons des positions contraires. Si les observateurs y ont vu l'amorce d'un conflit, je les renvoie à tous les votes précédents de ce type ». Il ajoute à qui veut bien l'entendre, « de plus, il n'y a pas eu manifestation d'un rejet du budget de l'IVD ». Voilà qui est clair quant à la ligne rouge à ne pas dépasser ! Pendant ce temps, Mongi Harbaoui de Nida Tounès invoque, lui, d'autres raisons : « Nous avons considéré que l'absence de la présidente de l'IVD est en violation totale de tous les usages. Elle a prétendu qu'elle a été informée à la dernière minute de la tenue de la plénière, ce qui est faux, le calendrier de l'examen des articles du projet de loi de finances est publié depuis trois semaines, voire plus. De plus, la présidente a été auditionnée en commission. Donc elle savait que le rendez-vous en plénière n'allait pas tarder. Elle sait que suite au budget des ministères, vient le tour des instances. C'est pourquoi les raisons invoquées ne tiennent pas la route, a-t-il réagi fermement, battant en brèche tous les arguments présentés plus haut. En attendant la plénière Mme Ben Sedrine a préféré, selon lui, éviter la confrontation avec les députés. Ce qui pourrait prouver également, renchérit-il, qu'il y aurait des dépassements graves qu'elle préfère dissimuler ou ne pas assumer dans une séance publique ». L'élu du Kef estime également que la personne désignée pour représenter la présidente au parlement n'est pas juridiquement habilitée, « le vice-président Zouheir Makhlouf ( en désaccord avec Mme Ben Sedrine et limogé, Ndlr) bénéficiant d'un jugement prononcé en sa faveur par le Tribunal administratif, n'est pas présent, explique-t-il, même le vice-président qui a été désigné, à savoir Khaled Krichi, a démissionné de la vice-présidence. Nous aurons été amenés à discuter avec un interlocuteur devant remplacer Mme Ben Sédrine non habilité ». D'où le rejet. Malgré la polémique qui a enflé depuis lundi associant cette divergence à une fissuration du consensus arrangé entre les associés au pouvoir, les députés interrogés ont aussitôt minimisé les répercussions sur l'alliance «indéfectible» et l'Accord de Carthage. Ceci en attendant la plénière qui se tiendra aujourd'hui donc et qui promet.