Les syndicalistes pensent aujourd'hui et jusqu'à mercredi prochain l'avenir de l'Ugtt. Les hommes et les femmes postulant à la direction de la centrale ouvrière durant les cinq prochaines années se mobilisent pour gagner la confiance des 550 congressistes. Objectif commun : l'Ugtt doit rester une force de proposition, de régulation et d'équilibre Aujourd'hui, dimanche 22 janvier, sonneront à partir de 8h00, à la Coupole d'El Menzah, les trois coups annonçant le démarrage du 23e Congrès de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt) placé sous la devise : «Allégeance à la Tunisie, fidélité aux martyrs et loyauté envers les travailleurs». L'ouverture du congrès verra la présence de près de 120 invités parmi les représentants des organisations syndicales africaines, arabes et internationales, les organisations professionnelles, les anciens syndicalistes dont Mohamed Trabelsi et Abid Briki, les deux seuls ministres du gouvernement Youssef Chahed qui seront de la partie, les anciens membres de la commission nationale administrative et les anciens syndicalistes représentant les différents secteurs, outre les congressistes dont le nombre s'élève à 550 qui auront la lourde tâche d'élire les membres du futur bureau exécutif de l'Ugtt et de définir, à travers les motions du congrès, la nouvelle stratégie d'action syndicale au cours des cinq prochaines années 2017-2022. L'ouverture du 23e congrès ne verra la présence ni des trois présidents, Béji Caïd Essebsi, Youssef Chahed et Mohamed Ennaceur, ni des présidents ou secrétaires généraux des partis politiques au pouvoir ou dans l'opposition, les syndicalistes estimant qu'il s'agit d'une fête syndicale où les politiques n'ont rien à faire et les observateurs y voient une décision qui traduit l'attachement des syndicalistes à l'autonomie de l'Ugtt qui doit rester à l'écart de tous les partis politiques. Les travaux du congrès se poursuivront jusqu'au 25 janvier dans un hôtel à Gammarth sous la présidence du secrétaire général sortant Hassine Abassi. Et comme certains observateurs se sont demandé pourquoi Abassi va présider le congrès alors qu'il appartient à la direction sortante, les services d'information de l'Ugtt se sont trouvés dans l'obligation de rappeler qu'il ne s'agit pas d'une première dans la mesure où Abdessalem Jerad a lui aussi présidé les travaux du congrès de Tabarka en décembre 2011. C'est donc une tradition que les syndicalistes semblent respecter en signe peut-être de considération et de reconnaissance à leurs leaders syndicalistes quittant la scène syndicale nationale (mais pas la vie syndicale régionale ou internationale) du fait que l'article 10 du règlement intérieur de l'organisation interdit un troisième mandat consécutif au sein du bureau exécutif. D'ailleurs, la semaine qui vient de s'écouler a vu toutes les régions rendre un hommage «mérité à Hassine Abassi, Belgacem Ayari et Mouldi Jendoubi pour l'action qu'ils ont menée au profit des travailleurs durant les longues années passées dans plusieurs postes de direction au sein de l'Ugtt». Et pas plus tard qu'hier, samedi 21 janvier, Hassine Abassi révélait que sa plus grande œuvre à la tête de l'Ugtt est bien la réussite du Dialogue national couronné par le prix Nobel de la paix 2015, décerné à l'Ugtt en compagnie de l'Utica, de l'Ordre des avocats et de la Ligue des droits de l'Homme. «D'ailleurs, souligne-t-il, je compte rédiger un livre sur les secrets qui ont accompagné les négociations du Dialogue national». En attendant que les Tunisiens sachent comment Abassi a réussi à dompter Ennahdha et à la convaincre de quitter le pouvoir, les pronostics vont bon train sur le poste qui sera réservé au secrétaire général sortant de l'Ugtt. On parle d'un poste dans une organisation internationale (l'Organisation internationale du travail ou le Bureau international du travail) ou de la présidence du Conseil national du dialogue social! Dont on attend toujours la constitution officielle, programmée pour l'année en cours. Les candidats, les candidates et les enjeux Mais en attendant que le portrait de Hassine Abassi soit accroché sur les murs de la grande salle Ahmed-Tlili au siège de l'Ugtt aux côtés de ceux de Mohamed Ali, Farhat Hached, Ahmed Tlili et Habib Achour, l'attention est concentrée sur les candidats à sa succession, les candidates qui sont déterminées à ce que les femmes accèdent cette fois au bureau exécutif et rompent, définitivement, avec cette mauvaise tradition qui fait que les militantes syndicalistes représentant plus de 50% des effectifs syndicaux soient absentes du bureau exécutif et sur la nouvelle approche syndicale qui sera adoptée au cours des cinq années à venir : un syndicat de partenariat ou un syndicat militant et revendicatif comme au bon vieux temps. Quant aux candidats au bureau exécutif, ils sont plus de quarante à briguer un poste à la future direction nationale. En premier lieu, les dix membres du bureau exécutif sortant bénéficiant encore du droit à un nouveau mandat, neuf conduits par Noureddine Taboubi forment la liste dite du consensus et le dixième Kacem Afaya dirige une liste concurrente et menace de tout révéler lors du congrès, «plus particulièrement sur les syndicalistes qui ont participé à l'agression conduite le 4 décembre 2012 contre le siège de l'Ugtt et le secrétaire général Hassine Abassi et aussi sur ceux parmi les syndicalistes qui ont saboté la commission d'enquête interne chargée de dévoiler l'identité des syndicalistes compromis». Ensuite, les syndicalistes des régions, des secteurs et des fédérations et syndicats généraux. On y distingue ceux qui se sont créé ces dernières années une certaine notoriété comme Mastouri Gamoudi (enseignement de base), Lassaâd Yacoubi (enseignement secondaire), Mongi Ben M'barek, le légendaire SG de la Fédération des télécommunications. Quant aux femmes, on remarque les candidatures de Naïma Hammami (enseignement secondaire), Samia Ltaief (santé), Wassila Ayachi (SG adjointe à l'union générale de Ben Arous). Et cette fois, il est pratiquement acquis qu'au moins une femme accédera au bureau exécutif dans la mesure où il existe un engagement tacite entre les listes en compétition pour que la femme soit représentée dans la future direction centrale. Kacem Afaia, tête de liste, s'opposant à celle dirigée par Noureddine Taboubi, va jusqu'à proposer un accord entre les deux listes dans le but d'ouvrir la voie à l'élection d'une femme.