Une visite protocolaire ponctuée par l'inauguration de la maison de l'arbitre. Wadii El Jery marque son territoire en Afrique et choisit de se positionner derrière Ahmed Ahmed. L'arrivée de Ahmed Ahmed à la tête de la CAF est encore un événement d'actualité. C'est une surprise pour plusieurs observateurs qui croyaient beaucoup en la domination de Issa Hayatou. Ce dernier, solide au poste depuis 30 ans et malgré les soupçons de corruption et de malversations autour de lui, était imperturbable. Mais ce n'est que lorsque Blatter et Platini se sont effondrés sur le coup d'affaires de transparence, que l'on a compris que l'ordre mondial en football a changé. Qui aurait cru que Blatter et Platini allaient sortir si petits et si humiliés? Issa Hayatou, qui a fait ce qu'il a voulu dans le foot africain, qui a spolié l'image de la CAF par ses agissements mafieux, par son art de gérer les alliances (surtout vis-à-vis de l'Egypte : le ténor classique), a fini par craquer. Certainement qu'on aurait aimé le voir passer en justice pour tout ce qu'il a fait, mais sa défaite cuisante face à l'inconnu Ahmed Ahmed était aussi un moment inoubliable dans l'histoire de la CAF. Ce fut «une humiliation» pour le Camerounais qui a vu tous ses alliés classiques le laisser tomber. Ahmed Ahmed débarque pour mettre de l'ordre dans la CAF, pour appliquer la politique d'Infantino, nouveau patron de la Fifa. Un nouveau système est en train de naître en Afrique, mais ne vous y trompez pas, ce ne sera pas une CAF complètement transparente où tout sera en mode réglementaire. Nous sommes encore loin et les réformes qui vont commencer pourraient enlever un peu de noirceur de l'image terne et triste de la CAF. Si Infantino a déjà commencé à «nettoyer» devant sa maison en imposant de nouvelles règles de gouvernance, notamment le nombre de mandats maximum (fixés à trois pour le président et les membres du conseil de la Fifa), à la CAF, on attend encore la fin de la «dictature» par les urnes des présidents qui n'ont pas l'air de laisser la possibilité à d'autres pour diriger. Entre la Fifa et la CAF, il y a encore deux vitesses : la CAF, même après l'arrivée de Ahmed Ahmed, n'a pas l'air d'entamer le processus de réformes qui doit mettre fin à de longues années de corruption et d'alliances douteuses qui n'avaient rien à voir avec le développement du football africain. Gains politiques... La visite de Ahmed Ahmed en Tunisie est une bonne opération de relations publiques pour Wadii El Jery et pour l'homme fort des coulisses, son «ami» Tarak Bouchamaoui. Ce dernier, qui a changé complètement de camp en sacrifiant son ancien ami Issa Hayatou pour soutenir Ahmed Ahmed dans les dernières élections, reste un homme clef à la CAF. Il a bien senti le coup pour aider, avec d'autres pays mécontents de la politique de Hayatou, à changer les règles du jeu. T.Bouchamaoui a réussi au passé à dénouer l'affaire tendue entre Hayatou et El Jery à la CAN 2015 et c'est encore lui qui maintenant se met derrière Ahmed Ahmed pour le soutenir (financièrement et sportivement). La CAF a changé d'orientation, le duo Bouchamaoui-El Jery l'a bien compris. Ce duo plus que complice (et qui était en désaccord jusqu'au match de la sélection contre la Guinée Equatoriale à la CAN 2015) gagne beaucoup de points en accueillant le nouveau patron de la CAF. Ce positionnement donnera à la FTF et à son président beaucoup de crédit et une position beaucoup plus confortable que celle du passé. Si ce nouveau positionnement est meilleur, il faut que cela soit concrétisé par des aides financières, par plus de poids à notre sélection et nos clubs dans les compétitions continentales, par des programmes de formation et d'instruction à nos arbitres et entraîneurs. Pour le moment, ce sont des «gains» personnels, mais aussi des gains en termes d'image de notre football. Recevoir le président de la CAF parmi nous est un message codé mais simple à déchiffrer. Cela veut dire que Ahmed Ahmed a confiance dans la FTF et qu'il est prêt à collaborer avec la Tunisie dans la limite du possible. Une visite protocolaire oui, une visite où certains arbitres tunisiens ont été empêchés de rencontrer le patron de la CAF, oui, mais c'est aussi une nouvelle page pour le football tunisien. En attendant les vraies réformes qui touchent la gouvernance des fédérations locales et la transparence financière, Wadii El Jery et la FTF marquent des points. Une chose est sûre, nous sommes mieux qu'auparavant au sein de la CAF. Il faut bien saisir cette chance pour aider le football tunisien et non pour obtenir des gains personnels.