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A quand le grand saut?
Recherche scientifique en Tunisie
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 08 - 2017

Le faible budget alloué à la recherche en Tunisie encourage la fuite des cerveaux. Les grandes compétences universitaires sont en train de quitter le pays pour s'installer avec leurs familles dans les pays du Golfe. Ils perçoivent des salaires nettement plus élevés et sont rémunérés pour leurs recherches
Chaque été, l'université tunisienne se vide de ses étudiants, mais pas de ses chercheurs et de ses enseignants-chercheurs. A l'Université Tunis El Manar, plus précisément à l'Ecole nationale d'ingénieurs de Tunis, (ENIT) une dizaine de très jeunes chercheurs ont presque perdu la notion du temps. Ils sont groupés dans les salles du laboratoire de modélisation mathématique et numérique dans les sciences de l'ingénieur (Lamsin) à des fins de recherche scientifique .Un domaine qui fait couler beaucoup d'encre ces derniers jours et qui sera au centre des débats de la prochaine conférence nationale sur la réforme de l'enseignement supérieur.
Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, M.Slim Khalbous, a, dans une conférence de presse tenue en mai dernier à Tunis, planché sur les grandes lignes des nouvelles orientations dans le domaine de la recherche scientifique qui prévoient, entre autres, l'augmentation de 50% du budget destiné aux laboratoires et unités de recherche (il est actuellement de 30%).
Cependant, l'état des lieux affiché par les chercheurs et les maîtres assistants rencontrés au Lamsin à l'Enit n'est guère reluisant .Il révèle au grand jour les grandes défaillances d'un domaine hautement stratégique pour le développement du pays .
Classement des universités tunisiennes
Toutes les parties rencontrées à l'Enit qui regroupe 12 Laboratoires de recherche et 6 unités de recherche affirment, par contre, que l'université tunisienne se porte plutôt bien. Un léger recul entre 2011 à et 2014 a été enregsitré en raison de la situation de confusion qui a régné dans le pays et de l'adhésion de plusieurs universitaires à la vie politique, mais l'université tunisienne a finalement réussi à rattraper son retard, a déclaré d'emblée Nabil Gmati, professeur universitaire en mathématiques appliquées et ancien directeur du Lamsin.
Il cite en exemple l'Université de Tunis El Manar classée 1085e, celle de Monastir 1213e et celle de Sfax 1218e, pour l'année 2016 .Mais il reste, toutefois, persuadé que ces classements ne reflètent pas la valeur réelle de l'université en Tunisie. «C'est la façon de compter qui nous a pénalisés. L'Université El Manar a fait un travail colossal ses dernières années pour s'assurer si toutes les recherches émanant de ses différentes institutions ont été publiées en son nom ou pas. Il s'est avéré qu'un grand nombre de ces recherches n'a pas été tenu en compte par le Scopus qui est le nom de la base de données transdisciplinaire lancée par l'éditeur scientifique Elsevier, l'un des plus grands éditeurs internationaux de recherche scientifique en raison d'une nouvelle règle au niveau de la procédure des publications», a souligné M. Gmati.
Baisse du budget alloué à la recherche
C'est notamment le financement de la recherche scientifique en Tunisie qui pose problème, explique le professeur Gmati.Le laboratoire de modélisation mathématique et numérique dans les sciences de l'ingénieur (Lamsin) qui bénéficiait en moyenne d'environ 130.000 dinars par an comme budget alloué par l'Etat, ne dispose plus que de 69.000 dinars. «Cette baisse a eu lieu après la révolution en raison de la situation économique difficile par laquelle le pays est passé, mais on doit chercher d'autres sources de financement. Ce facteur pénalise beaucoup les chercheurs tunisiens», constate le professeur en question qui cite en exemple les pays qui se sont engagés dans une politique efficace de valorisation des résultats de la recherche en y consacrant un budget conséquent, comme la Suède (3,95%), la Corée (2,85%) ou l'Allemagne (2,49%).
Moncef Mahjoub est maître-assistant à l'Enit, il enseigne les mathématiques et les mathématiques appliquées. Il nous explique qu'il réalise des travaux de recherche dans le domaine des mathématiques appliquées dans les domaines industriel et médical (électrophysiologie cardiaques). Il nous a confirmé que les autorités de tutelle ne donnent pas d'importance au domaine de la recherche scientifique et que son objectif se limite à assurer le volet de l'enseignement et rien d'autre, comme en témoigne la réduction de deux tiers du budget des laboratoires depuis 2011.
Etablir le contact avec les industriels et frapper à leurs portes
Le fait que la Tunisie ne soit pas un pays industriel pousse l'Etat à ne pas accorder trop d'importance au domaine de la recherche scientifique, selon Dr Moncef Mahjoub qui ajoute, par ailleurs, qu'il travaille avec une équipe de chercheurs bordelais en France et que des réunions hebdomadaires sont organisées entre les deux parties pour fixer et cerner les besoins et apporter les solutions adéquates aux problèmes rencontrés. La bonne santé des entreprises passe par la création de label, ce qui n'est pas le cas chez nous, révèle-t-il.
La recherche scientifique et l'industrie sont deux domaines étroitement liés, fait-il encore remarquer. Et d'ajouter qu'il faut impliquer les industriels du secteur privé, surtout, dans la recherche, sur le plan du financement et de la réalisation des projets, préconise le chercheur. Mais cette implication nécessite, selon lui et selon le docteur Ridha Mdimegh (maître-assistant travaillant actuellement en Arabie Saoudite), l'établissement d'un contact entre les chercheurs et ces industriels. «Il faut aller frapper à leurs portes et ne pas opter pour une attitude attentiste», a-t-il relevé à ce propos.
Ceux qui investissent dans les entreprises en Tunisie et les usines, ne pensent jamais au label. Pour stimuler la recherche, il faut que les industriels parrainent les thèses des chercheurs, mais il est aussi impératif que ces derniers frappent aux portes des industriels pour établir la communication et assurer l'interaction entre les deux parties, insiste Dr Moncef Mahjoub. «Autre problème qui contrecarre l'évolution de ce secteur, c'est cette tendance à travailler en solo au niveau de certains centres de recherches existant dans le pays. C'est le chacun-pour-soi», souligne-t-il.
Augmentation du nombre de doctorants et fuite des cerveaux
La coordination des doctorants et docteurs de l'Université El Manar avait indiqué, lors d'un débat tenu en avril dernier, que 69% des titulaires de doctorat dont le nombre s'élève à 3292 docteurs, sont au chômage. Le nombre de doctorants s'élève à 11171 étudiants, et le nombre des titulaires de doctorat a atteint 4775 personnes. Ceci a été l'un des facteurs déterminants qui ont contribué à la fuite de nos docteurs vers les pays d'Europe et les pays du Golfe principalement.
Les docteurs Ridha Mdimegh et Mourad Chamekh ont déclaré, par ailleurs, qu'ils ont préféré aller travailler à Jeddah en Arabie Saoudite dans le cadre de la coopération technique pour des raisons purement financières. Pour le premier, ça fait plus de quatre ans qu'il a opté pour cette voie. « On forme les enseignants juste pour qu'ils se cantonnent dans le rôle de l'enseignement, rien de plus, ajoute-t-il. Le second critique la situation des maîtres assistants en Tunisie en comparant le domaine de la recherche scientifique à un exercice de «musculation scientifique». A son tour, il critique le faible budget alloué à la recherche en Tunisie et confirme que les chercheurs sont obligés d'aller à l'étranger.
La fuite de nos compétences universitaires est due à des raisons financières note, par aileurs. Le Dr Ridha Mdimegh explique que les grandes compétences universitaires sont en train de quitter le pays pour s'installer avec leurs familles dans les pays du Golfe. Ils perçoivent des salaires nettement plus élevés et sont rémunérés pour leur recherche.
Quant à l'augmentation du nombre de doctorants, le professeur Gmati explique que c'est un phénomène récent dans notre pays dû essentiellement à deux facteurs. Le premier est le fait que le diplôm,e d'ingénieur permet à son titulaire de postuler à un doctorat, sans passer par une formation de mastère. Si cette nouvelle mesure a du sens pour certaines disciplines, elle est difficilement généralisable. Par ailleurs le passage par une année de mastère permet d'évaluer la capacité des candidats à mener à bien un travail de recherche lors du stage couronnant ce diplôme. Le second facteur est l'attribution quasi automatique de la bourse de thèse qui aurait dû être un moyen de sélectionner les candidats, fait-il remarquer.
S'agissant du chômage des doctorants, on nous explique que plusieurs spécialités n'ont plus la cote, telle la biologie, la chimie. La raison avancée est l'absence de demande pour ces spécialités au niveau du marché de l'emploi. «En 2004, nous raconte Moncef Mahjoub, il y avait 40 postes pour 13 candidats en mathématiques. Actuellement la situation n'est plus la même, elle est alarmante, 10 postes pour 40 ou 60 candidats», fait-il observer, ce qui dénote une absence de stratégie nationale ». «Tant qu'on n'a pas fixé nos besoins et nos ressources et nos objectifs, on n'ira pas très loin.La France est en rain de reformer son système éducatif, de supprimer certaines filières», conclut-il.
«Toutefois, le grand problème de l'enseignement supérieur et de la recherche est essentiellement un problème de gouvernance, confirme, par ailleurs, le professeur Gmati. Il existe plusieurs institutions universitaires et laboratoires de recherche de très haut niveau dont il suffirait de dupliquer les bons usages, la bonne gestion et le bonnes pratiques de recherche. malheureusement on a l'impression qu'à chaque nouvelle création de structures, on essaie de réinventer la roue. Régler ces problèmes, aiderait à résoudre l'un des problèmes les plus importants de l'enseignement supérieur, qui est le problème du chômage des diplômés».
Il faudrait envisager, selon le Pr. Gmati, de fermer certaines institutions qui fonctionnent en dessous de leur capacité et qui reviennent très cher au contribuable. Il s'agit également de réduire les effectifs de certaines formations connues qui alimentent en masse la cohorte de diplômés chômeurs, et améliorer la qualité de la formation dans les premiers cycles universitaires en y affectant des enseignants dédiés à l'enseignement et la pédagogie. A ce titre, il est urgent, déclare-t-il, d'améliorer le statut du corps des professeurs agrégés qui n'enseignent aujourd'hui qu'en classe préparatoire, et dont le nombre très insuffisant doit être augmenté».
Les jeunes assistants, en cours d'élaboration de leur thèse de doctorat ne devraient plus se voir affecter aux classes préparatoires, où l'enseignement est très exigeant, ajoute-t-il .Il faut aussi conférer plus de souplesse aux institutions universitaires afin de pouvoir modifier les contenus de leurs enseignements et mieux s'adapter à l'évolution des sciences et des technologies, a, en outre, souligné le professeur universitaire qui a aussi mis l'accent sur l'importance de valoriser la formation par alternance en partenariat avec des entreprises locales.
«Ainsi les étudiants seront-ils confrontés et habitués très tôt aux enjeux de l'entreprise. Il serait urgent également de créer le statut d'ingénieur de recherche essentiel à une activité de recherche de qualité, et indispensable si on souhaite articuler notre recherche sur l'activité socio-économique».


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