A un mois de l'expiration de son mandat, la commission parlementaire d'investigation sur les réseaux d'envoi des jeunes Tunisiens en Syrie et en Libye fait du surplace. Elle attend que les «pèlerins» de Damas lui fournissent les vérités glanées auprès de Bachar Al-Assad Quand la commission parlementaire d'investigation sur les réseaux d'envoi des jeunes Tunisiens dans les foyers de tension en Syrie et en Libye a été constituée en mars 2017 à l'initiative de la députée Leïla Chettaoui (nidaïste à l'époque et aujourd'hui membre du bloc Al Horra après avoir été expulsée de Nida Tounès puis démise de la présidence de la commission en question), rares étaient ceux qui croyaient à l'époque que le pèlerinage à Damas et les rencontres avec le président Bachar Al-Assad allaient devenir pratiquement l'activité n°1 aussi bien de certains membres de la commission que d'autres députés qui se sont portés volontaires pour aller en Syrie examiner la possibilité de rétablir les relations tuniso-syriennes et recueillir les informations que les Syriens étaient disposés à fournir sur les jihadistes tunisiens croupissant dans les prisons syriennes et aussi l'Ugtt qui a envoyé à Damas une délégation syndicaliste dans le but aussi de «réaffirmer le soutien du peuple tunisien au peuple syrien frère» et de glaner aussi — si possible — des données sur les jihadistes tunisiens, ceux emprisonnés et ceux encore traqués par l'armée de Bachar. Aujourd'hui et alors que le délai imparti à la commission pour rendre son rapport en septembre prochain (les six mois accordés à la commission pour investiguer et rédiger son rapport expirent en septembre), on se demande ce que les membres de la commission dirigée par la nidaïste Héla Omrane qui a remplacé Leïla Chettaoui ont fait de concret. La réponse n'est pas difficile à trouver : une rencontre-écoute avec le ministre de l'Intérieur qui a révélé que 800 parmi les jihadistes sont retournés au pays et qu'ils sont sous contrôle sécuritaire et malheureusement ils n'ont révélé aucun nom de ceux qui les ont envoyés en Syrie, un débat général avec le ministre des Affaires étrangères et enfin des discussions avec certaines associations de la société civile qui cherchent elles aussi des informations là où elles peuvent. La médiatisation, souci principal Qu'est-ce qu'on peut retenir de ce que Leïla Chettaoui et Hela Omrane ont réalisé en cinq mois et qu'est-ce que les allers-retours à Damas ont produit de concret, surtout pour les familles qui veulent que leurs enfants jihadistes retournent en Tunisie pour y purger leur peine. D'abord, les déclarations incendiaires répercutées par Leïla Chettaoui qui affirme détenir des preuves qui peuvent envoyer Mohamed Frikha, le P.-d.g. de Syphax Airlines, en prison pour avoir transporté les jihadistes en Turquie avant qu'ils ne regagnent la Syrie. Ensuite, les appels lancés à plusieurs reprises par Hela Omrane à Leïla Chettaoui lui demandant de remettre à la commission les preuves dont elle dit disposer. Malheureuement, Leïla Chettaoui fait toujours la sourde oreille et conserve les documents dont elle aura peut-être besoin le jour où la justice aura à examiner la plainte déposée par Mohamed Frikha contre elle et Sahbi Ben Frej. Enfin, les photos souvenirs prises par Bouali M'barki, M'barka Brahmi et Sahbi Ben Frej avec le président Bachar Al-Assad et la série d'articles publiés par Slah Bergaoui dans les colonnes du quotidien Achourouk où il relate les détails de la visite de la délégation parlementaire à Damas. Et ce n'est pas tout. Moncef Marzouki, le président intérimaire qui a décidé de rompre les relations diplomatiques avec la Syrie sans en informer l'ONU, s'est invité lui aussi à la kermesse générale en demandant à ce que l'Ugtt soit dépossédée du prix Nobel de la paix 2015 «pour connivence avec puissance étrangère et trahison de l'intérêt national» en établissant des rapports «avec un dictateur». De son côté, le président Béji Caïd Essebsi a, enfin, réagi dans son discours du 13 août en rappelant que c'est à lui de prendre la décision de renouer avec la Syrie et de choisir le moment qu'il faut pour annoncer cette décision. Demeurent les grands absents : les familles des jeunes envoyés en Syrie et en Libye. La commission d'investigation n'a pas cru utile de les écouter bien qu'elles répètent à longueur de journée qu'elles disposent de beaucoup d'informations utiles et vont jusqu'à affirmer connaître l'identité de ceux qui ont recruté leurs enfants. En tout état de cause, on attend l'expiration des vacances parlementaires et le retour des députés au palais du Bardo pour voir comment les membres de la commission d'investigation vont traiter les données glanées par les «pèlerins» de Damas, à condition qu'ils les livrent à Hela Omrane.