Par Abdelhamid Gmati Les élections municipales ont été reportées une nouvelle fois, l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) proposant le 25 mars 2018 comme nouvelle date du scrutin. Et les citoyens qui n'ont pas pu le faire entre juin et août derniers peuvent s'inscrire sur les listes électorales depuis lundi dernier. Il s'agira d'élire les candidats aux 7.182 sièges répartis sur 350 municipalités. En août dernier, le vice-président de l'Isie, Anouar Belhassan, annonçait que le nombre d'électeurs pour ces municipales était de 5.740.291, dont 535.784 nouveaux inscrits. Et c'est au niveau de la participation que le bât blesse. Selon les derniers sondages de Sigma Conseil, le taux d'abstention aux municipales atteindrait les 70%, seuls 30% des sondés ont annoncé leur participation. A comparer avec les taux de participation aux législatives (43%) et à la présidentielle (55,7%). On estime que pour la majorité des Tunisiens, le changement ne peut venir que « du haut de l'échelle », c'est-à-dire de la Présidence. Les nids de poule, les trous dans la chaussée, une ampoule grillée d'un lampadaire, tout cela est imputé à l'Etat, alors qu'ils relèvent de la responsabilité municipale. Mais on note une désaffection des électeurs tunisiens pour les élections de façon générale et plus grande encore pour les municipales. Il est vrai que, particulièrement depuis 2011, les « délégations spéciales » n'ont pas assumé leurs responsabilités, notamment dans le ramassage des ordures. D'où la déception et la désaffection des citoyens. Cette abstention serait grave car les municipalités sont appelées à assumer d'importantes responsabilités. D'abord, et comme l'a affirmé le chef du gouvernement, Youssef Chahed, le 14 mars dernier, « ces premières élections municipales depuis la révolution, qui concernent près de 350 municipalités, devront aussi amorcer les premières politiques de décentralisation ». Jusqu'ici, chaque problème qui se pose dans une région, une localité ou une municipalité, attend sa solution de Tunis. Au point que des ministres se plaignent de devoir intervenir « dans des dossiers qui relèvent, au mieux, d'un sous-directeur régional », selon le ministre de l'Emploi. Le développement régional, une des revendications de la Révolution, est une priorité du gouvernement. Et les mairies ont un rôle important à assumer. En somme, les municipalités ne sont pas là, uniquement, pour collecter les ordures mais elles auront des budgets pour participer au développement. Les problématiques liées à l'emploi, au logement, au transport, à l'approvisionnement quotidien de la population, aux infrastructures de base seront du ressort des municipalités. La municipalité est appelée à devenir le « moteur du développement local ». Grâce à la promotion d'activités économiques, industrielles et socioculturelles, soit directement, soit en partenariat avec des privés, les municipalités peuvent et doivent se créer des ressources financières élevées et régulières afin de financer ne serait-ce que partiellement leurs budgets. Rien n'empêche une municipalité de créer une zone industrielle ou un abattoir moderne, de construire un stade, un hôtel ou une usine. On rappelle aussi que « le maire est titulaire de pouvoirs propres: en matière de police administrative, il est chargé d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Il s'agit également de polices spéciales (baignade, circulation...). Le maire est aussi le chef de l'administration communale. Il est le supérieur hiérarchique des agents de la commune et dispose d'un pouvoir d'organisation des services ». Il est donc important d'intéresser le Tunisien en lui faisant comprendre l'importance du rôle des municipalités et donc de sa participation à ces élections. Jusqu'ici, les partis politiques ne se sont pas impliqués dans ce processus. L'Isie non plus, étant encore occupée à se choisir un président. Seules quelques associations de la société civile en ont conscience. La municipalité aura la responsabilité de la gestion des problèmes quotidiens. Et c'est avec la participation du Tunisien que l'on pourra parler de « démocratie de proximité ».