C'est au niveau de la stratégie du jeu et de la préparation mentale du match qu'il y a eu un grand écart et qu'a été faite la grande différence. Encore une fois, Houssem El Bedri a donné une leçon et a eu le dernier mot. Après avoir écarté de son chemin l'Espérance et joué un mauvais tour à Faouzi Benzarti à Radès dans les quarts de finale de la Ligue des champions, l'entraîneur d'Al Ahly Houssem El Bedri a eu raison de l'Etoile et de son coach Hubert Velud en demi-finale à Bordj El Arab. Deux succès incontestables, remportés à la sueur du front et avec un grand mérite, qui le mènent à la finale et qui lui donnent le droit d'espérer pouvoir décrocher un 9e titre africain. S'il a réussi à avoir le dernier mot et à prendre le dessus au terme des quatre confrontations avec l'EST et l'ESS, malgré un potentiel humain et technique qui n'est pas supérieur à celui de nos deux meilleurs clubs à l'heure actuelle, c'est qu'il a été meilleur tacticien, grand stratège, fin psychologue et réel meneur d'hommes que les coaches «sang et or» et étoilé. Derrière chacun de ces deux succès, il y a son empreinte, sa petite touche tactique, sa bonne lecture du jeu adverse qui ont fait la différence. Dimanche, il a su pallier les défaillances de poids dans sa formation, l'absence des plus gros piliers de son édifice, Ahmed Fethi, le tout puissant et infatigable arrière droit, et Houssem Achour, la pierre angulaire de son milieu de terrain. Il a osé laisser sur le banc deux autres poumons de son compartiment offensif Abdallah Saïd et Oualid Soliman, préférant les ménager plutôt que de prendre le risque de les mettre dans le bain alors qu'ils revenaient à peine de blessure et n'étaient pas au top physiquement. Les solutions de rechange n'étaient pas nombreuses mais il s'est creusé les méninges et il a beaucoup écouté pour trouver le bon truc afin de mettre sur pied une formation équilibrée dans ses trois compartiments et déjouer le plan de jeu et les prévisions tactiques du staff technique étoilé. Et sa trouvaille, la principale nouveauté qu'il a apportée à son onze rentrant, a été une réussite totale. Il a fait sortir de son plan de jeu un défenseur axial, Rami Rabiâa, pour l'avancer d'un cran sur son échiquier et le titulariser comme pivot sentinelle à la place de Houssem Achour. Une sorte de libéro inversé qui colle devant la défense et pas derrière de telle sorte qu'il évolue avec trois défenseurs centraux en cas de repli, en phase défensive et sur les balles arrêtées. Ayant ainsi barricadé sa charnière centrale et le chemin de son but, Houssem El Bedri a donné consigne à ses deux arrières latéraux volants Mohamed Heni qui a suppléé Ahmed Fethi et Ali Maâloul de s'en donner à cœur joie sur les flancs et de prendre le monopole et le contrôle des couloirs, surtout que la couverture de leurs montées offensives était bien assurée. Entre-temps, fidèle à son 4-2-3-1 qui se transforme et se convertit en 4-1-4-1 en phase de construction et d'attaque, le rusé coach ahlaoui a fait une permutation entre Junior Ajayi et Moêmen Zakaria, plaçant le premier côté droit en écran devant Mohamed Heni et le deuxième en soutien, côté gauche devant Ali Maâloul. Salah Gomaâ puis Oualid Soliman ont été les joueurs de liaison dans le rôle de régisseur et play-maker entre les deux flancs. Avec ainsi un seul attaquant de pointe et fer de lance, le Marocain Oualid Azaro en qui Houssem El Bedri avait pleine confiance malgré les critiques de tous bords. Il a passé avant la rencontre plus de 72 heures à parler au joueur, à le préparer psychologiquement pour l'aider à retrouver le déclic et son sens du but. Résultat : 4 buts dont deux grâce à deux coups de tête foudroyants. Une mi-temps tactique a suffi pour déboussoler les joueurs étoilés sur le terrain et leur coach Hubert Velud et son adjoint Ridha Jeddi sur la ligne de touche qui n'ont pas su réagir à temps, pour parer au terrible étau qui étouffait leur plan de jeu et éviter le plus amer et le plus douloureux des naufrages africains dans l'histoire de l'Etoile. La leçon tactique donnée par Houssem El Bedri et couronnée d'un succès spectaculaire montre bien que nos grands clubs, bien que structurés et disposant de joueurs de valeur, ne possèdent pas de grands entraîneurs à la hauteur des gros enjeux, bon tacticiens, excellents stratèges, fins psychologues et véritables meneurs d'hommes. C'est le petit plus qui leur manque pour ne pas sombrer en cours de route ou même à quelques mètres de la ligne d'arrivée comme l'ont fait de triste manière l'ESS et le CA dimanche.