Après la qualification laborieuse contre la Libye, l'équipe de Tunisie affrontera trois chantiers : l'amélioration de la qualité du jeu, les effets de ramener de nouveaux expatriés et les moyens de sortir un Mondial de qualité Disons que cette qualification au Mondial russe, autant elle nous procure une énorme satisfaction après 12 ans d'absence, autant elle laisse un goût d'inachevé, après ce petit match contre la Libye et ces frayeurs qu'on a eues vers la fin quand la RDC avait marqué son 3e but. On aurait aimé voir notre équipe gagner, jouer mieux et fêter nettement mieux le passage en Russie. Franchement, on n'avait pas d'excuses pour rater ce match qui pouvait marquer une date et un moment inoubliables pour tous les Tunisiens. Ni imagination, ni tempo, ni création, ni qualité qu'on avait vus contre la RDC, la sélection de N.Maâloul a fait l'essentiel, mais n'a pas su donner du bonheur à la fin. Ce qui reste dans les mémoires, c'est toujours la dernière impression. Et cela on l'a raté en bonne partie malgré toute la joie qui s'est créée au sein de la sélection. Le plus dur commence maintenant. Le Mondial, c'est pour très bientôt. Trois chantiers à gérer pour Wadï El Jarry et Nabil Maâloul, pour éviter d'arriver au Mondial avec peu d'arguments et sans ambition. Choix discutables et créateurs en moins Le premier chapitre (chantier), sur lequel vont s'atteler El Jarry, Maâloul et son staff (y compris Youssef Zouaoui, l'homme discret, mais fort présent dans la préparation des matches officiels), est sûrement l'amélioration de la qualité du jeu. Il faut avouer que ce match face à la Libye a été un ratage technique et tactique contre une équipe technique certainement, mais qui nous est inférieure. Sur l'ensemble des matches de groupe, celui de Guinée à Conakry a été le meilleur, même si l'adversaire avait déjà perdu ses chances. Avouons aussi que notre groupe a été le moins difficile comparé à celui du Nigeria ou du Maroc, et que la qualité du jeu qu'on a présenté, que ce soit avec Kasperczak ou Maâloul, pouvait être meilleure. Si en attaque, à part le match de la Libye, les choses ont bien tourné, sur le plan de la qualité, de l'animation et de la création, on a beaucoup à dire. Depuis l'arrivée de Maâloul, on est passé du 4-2-3-1 au 4-3-3, et un joueur comme Msakni a connu sa période faste. Il est le seul créateur de base, alors qu'un joueur comme Sliti, important avec Kasperczak, est relégué au rôle de réserviste. Peut-être bien que mettre plus de créateurs et se montrer plus souple dans les choix des joueurs permettrait à la sélection de jouer mieux. Au Mondial, on n'aura pas d'adversaires comme la RDC ou la Guinée. Seront-ils acceptés ? Le deuxième chantier va être le plus sensible et le plus délicat à gérer pour Maâloul et son staff. Il s'agit des nouveaux expatriés à ramener en sélection. Khedhira, Ben Yedder, Skhiri et d'autres «clients» peuvent créer, en cas d'arrivée, des polémiques s'ils sont mal intégrés. Pour le principe, est-il concevable que des joueurs qui ont déjà refusé de rallier la sélection au moment où les choses étaient serrées, veulent maintenant débarquer et jouer le Mondial? Cela ne va pas être une question technique seulement, mais humaine avant tout. Il y a un ordre dans les vestiaires et une ossature dure qui a passé toutes les épreuves pénibles de la qualification. Cette ossature va-t-elle peser lourd devant l'envie de Maâloul de s'ouvrir sur des joueurs expatriés de qualité? On risque de mettre du désordre, de l'animosité au sein du groupe si cette opération est forcée et mal gérée. Ces noms peuvent apporter une plus-value technique sur le papier, mais attention à ne pas transformer les vestiaires en bombe à retardement. Une chose est sûre, l'effectif va être révisé. Dans quel sens? Comment? Qui va en faire les frais? C'est à Al Jary et à Maâloul de répondre. Un joueur comme Abdennour est à lui seul un «cas» à gérer. Pistonné par les cadres de la sélection, le joueur de Marseille devrait faire son retour bientôt. Marquer l'histoire Pourquoi va-t-on jouer le Mondial? C'est la question la plus «stratégique» dans l'équipe de Tunisie. C'est-à-dire que l'on doit se fixer des buts précis derrière cette participation. Le plus important, c'est d'avoir les ambitions de sortir du cadre de la participation de décor comme ce fut le cas en 1998, 2002 ou 2006. Le second tour par exemple, une autre victoire ou deux pour faire oublier cette historique victoire face au Mexique, présenter un foot de qualité qui charme ceux qui vont nous suivre en Russie, voilà ce qu'on doit concevoir comme buts. Le Mondial doit marquer une rupture par rapport aux dernières participations. Notre football, où les bons joueurs se font rares, où les clubs souffrent et où la médiocrité règne partout, a besoin d'une participation honorable et scintillante qui devra le porter à un palier supérieur. On en a marre de ces mondiaux fort suivis par les Tunisiens, mais très décevants vers la fin et qui laissent à désirer. Les chantiers ne manquent pas, les coulisses de la sélection vont être agitées, et le bon sens doit être l'élément-clef pour réussir la campagne russe.