M. Mazin Abu Shanab a visité les deux dortoirs Abou-Hamed et Ibn-Khaldoun, situés dans cette région frontalière, reconnue comme une capitale des migrants et des demandeurs d'asile. Chiffres à l'appui, elle abrite, à elle seule, 340 réfugiés de diverses nationalités, soit la moitié ou presque de la totalité des inscrits sur le territoire national. Certains, identifiés, jouissent du statut de réfugié, d'autres sont encore qualifiés de demandeurs d'asile. Le projet de loi d'asile, en suspens depuis 2012, ne connaît toujours pas d'issue La délégation du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a débarqué, vendredi dernier à Médenine, dans le sud-est de la Tunisie, où elle s'est rendue auprès des migrants et réfugiés retenus dans des centres d'accueil qui leur sont réservés jusqu'à nouvel ordre. Accompagné de ses partenaires d'hier et d'aujourd'hui, son chef représentant, M. Mazin Abu Shanab, a fait le tour des deux dortoirs baptisés Abou-Hamed et Ibn-Khaldoun, situés dans cette région frontalière, reconnue comme une véritable capitale des migrants et demandeurs d'asile. Chiffres à l'appui, elle abrite à elle seule 340 réfugiés de diverses nationalités, soit la moitié ou presque de la totalité des inscrits sur notre territoire. Ainsi identifiés, ces ressortissants jouissent du statut de réfugié, d'autres sont encore qualifiés de demandeurs d'asile. Reconnus en tant que tels, ils peuvent, si besoin est, solliciter la protection et l'assistance du HCR. Leur droit aux prestations sociales et médicales est ainsi garanti. Juridiquement parlant, leur situation de résidence n'est pas tout à fait légale. Pourtant signataire de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, ainsi que du protocole la complétant en 1967, la Tunisie ne s'est dotée, jusqu'à nos jours, d'aucun cadre législatif réglementaire. Sauf un projet de loi d'asile, en suspens depuis 2012, dont la dernière mouture élaborée par des experts tunisiens n'est pas encore sortie des rouages de La Kasbah. L'asile non réglementé Et ce malgré la campagne du plaidoyer lancée, il y a une année, pour son adoption dans les délais. Initiative partagée par l'institut arabe des droits de l'homme (Iadh) et le HCR, avec l'appui des médias et de la société civile. Mais, l'ARP n'a pas encore tranché. Quitte à le renvoyer aux calendes grecques. « Si cette loi est adoptée en 2018, la Tunisie sera le premier pays arabe à réglementer l'asile dans la région », espère-t-il. Son objectif : renforcer les efforts des autorités tunisiennes, en particulier le ministère de la Justice. En tout cas, le HCR n'a pas lésiné sur les moyens pour arriver à ce but. De même pour ses alliés stratégiques (Croissant rouge tunisien, Agence de développement et de secours adventiste (Adra), le Conseil italien pour les réfugiés (CIR)). Cette coopération multilatérale a pour vocation purement humanitaire : venir en aide à cette catégorie vulnérable en lui favorisant un cadre de vie digne et décent, cela relève des objectifs du HCR en Tunisie. Dans sa tournée périodique, M. Abu Shanab ne manque pas, à chaque fois, d'insister sur le fait de veiller à leur bien-être et prise en charge psychosociale. Et les entrepôts de son organisation onusienne, à Médenine, semblent être bien fournis. Il y a eu des aides et contributions destinées aux mieux lotis. Sur les lieux, rien n'échappe au contrôle et suivi permanents. D'ailleurs, une donation d'ambulance du HCR a été faite au profit du gouvernorat de la région, au terme d'une cérémonie de signature d'accord ayant eu lieu à cet effet. Le gouverneur, M. Habib Chaouat, a voulu faire une mise au point, une fois pour toutes : « Le camp de Choucha n'est pas légal pour continuer ainsi à abriter un tel nombre de migrants, c'est pourquoi on l'a fermé en juin 2013 ». D'après lui, il n'était pas bon pour l'image du pays de laisser régner une telle anarchie à nos frontières. Cela ne peut, en aucun cas, remettre en question la volonté de l'Etat d'en prendre soin et son engagement, à l'époque, à apporter à ses pensionnaires l'appui nécessaire. « En 2011, plus de deux millions de migrants, dont 11 mille Egyptiens, ont pu trouver refuge dans nos foyers familiaux à Médenine », rappelle-t-il. Une forte charge sociale. L'élan de solidarité a été ressenti, partout ! Dortoir Abou-Hamed : 200 résidents, 11 nationalités Ce fut, alors, un geste d'hospitalité et de générosité qui a été fortement apprécié par le HCR et par tout le monde, ailleurs. Donc, la fermeture du camp en question n'est guère un signe de rejet. Car, dans l'esprit des conventions internationales, réfugiés et demandeurs d'asile, tous, bénéficient « du principe de non-refoulement ». Seulement, au centre d'accueil d'immigrants clandestins « Dortoir Abou-Hamed » à Médenine, les conditions de vie et d'hébergement ne sont pas assez favorables. Autonomes, plus de 200 résidents (11 nationalités) doivent, alors, gérer leur quotidien, sous les bons auspices du Croissant rouge tunisien (CRT), nous explique M. Issam Kebiri, chargé de l'enregistrement et de la protection des migrants au sein du centre. Cela s'inscrit dans le cadre du programme de partenariat CRT-coopération suisse. A ses dires, ce flux migratoire vient de nos frontières maritimes avec la Libye. Pas plus tard que jeudi dernier, 22 migrants clandestins ont été interceptés au large de Zarzis, avant d'être retenus dans ce centre, déjà ouvert depuis un an. «Le CRT les soutient dans leurs demandes d'asile ou pour le retour volontaire dans leurs pays d'origine », révèle-t-il, soulignant l'intérêt que porte l'OIM à ce sujet. Plusieurs parmi eux sont en train de chercher un travail à prix bas, d'autres se sont livrés à la mendicité. Quant au HCR, son mandat se limite aux réfugiés et demandeurs d'asile. A chacun son domaine d'intervention. Car, migrant et réfugié n'ont pas le même statut juridique. Selon la convention de 1951, un réfugié est une personne dont le retour à son pays d'origine peut exposer sa vie à tous risques et périls, pour des raisons d'ordre sécuritaire, ethnique ou raciale. Alors que la migration est due volontairement à des fins économiques. La différence est, ici, de taille. Pas si loin, l'autre centre d'accueil des réfugiés Ibn-Khaldoun offre des conditions d'hygiène et d'hébergement pour le moins acceptables. Avec des aides financières et en nature : couvertures, kits d'hygiène, des bons d'achat des produits alimentaires chaque semaine. « Mais, je reçois aussi une bourse mensuelle de 250 dinars, en guise d'assistance financière», ajoute Awatef, quadragénaire syrienne, pensionnaire du centre. Sa famille, elle aussi, avait déjà fui la guerre en Syrie pour d'autres pays d'Europe. En vertu dudit accord avec le gouvernorat, le HCR contribuera à hauteur de 100 mille dinars versés pour la remise en état de l'ancien camp de Choucha. Avant-hier, d'autres donations en équipements médicaux (literie, couvertures, savon) ont été faites au profit de l'hôpital régional de Médenine, d'une valeur de 160 mille dinars. Prochainement, il y aura également des aides similaires au profit de structures de jeunesse, d'enfance et d'écoles primaires à Ben Guerdane.