900.000 baguettes seraient jetées chaque jour par les professionnels du pain et 300 MD de pertes financières annuelles. Un gâchis inquiétant ! Mercredi 29 novembre, au petit matin, les boulangeries réputées de la capitale vendent du pain comme à l'accoutumée. La veille, ils avaient promis qu'elles fonctionneraient, comme si de rien n'était, malgré le préavis de grève du syndicat officiel des boulangeries. L'un de ces boulangers, non gréviste, martèle à qui veut bien l'entendre : « Je n'ai pas l'intention d'interrompre mon travail, je conteste les motifs de la grève ! » Les gens s'approvisionnent en pain en toute sérénité. Une scène qui contraste, avec le décor de la veille fait de panique et de ruée sur le précieux sésame, la baguette à 190 millimes. Des files d'attente interminables composées de vingt, trente personnes se sont constituées progressivement en fin d'après-midi devant les boulangeries..., chacun voulant faire sa provision de pains en prévision de la grève ouverte annoncée par les boulangers. Les clients ont acheté compulsivement trois, quatre à cinq baguettes car ils ignorent la durée de cette déclarée « grève ouverte » qui pourrait se poursuivre jusqu'à vendredi prochain. Le pain brûle Une boulangère au niveau du passage, interrogée sur les problèmes du secteur, nous donne son avis sur le sujet. « Il y a le problème lié à l'octroi de la carte professionnelle en cas de décès du titulaire ou du propriétaire. Les boulangeries, qui ne la possèdent pas, sont obligées de s'approvisionner en farine non subventionnée». Ensuite, elle fait part de ses appréhensions, concernant les gains illicites que s'adjugent les épiciers « qui se sucrent » sur le dos des boulangers. « Ils peuvent même vendre la baguette à un coût inférieur à son prix de revient surtout si elle est n'est pas fraîche», précise cette dernière. Elle rappelle, également, la loi cadre qui date de 1956 qui stipule que celui qui vend le fonds de commerce doit restituer sa carte professionnelle. « Une fois que le propriétaire décède, la famille du défunt doit rendre la carte professionnelle qui ne peut être léguée à la femme ou au fils du boulanger décédé». La Presse a alors contacté M Mohamed Bouannene, président du syndicat de la chambre des boulangers relevant de l'Utica, pour connaître les dessous d'un secteur mal en point, fragilisé et complètement bouleversé depuis l'avènement de la révolution à cause de l'ouverture d'un grand nombre de boulangeries, non réglementées mais aussi de dérives et des torts causés par des secteurs associés comme la pâtisserie. Dérives du secteur M.Bouannène pointe du doigt les pâtisseries-boulangeries qui profitent de l'absence de contrôle pour fabriquer des pains et des gâteaux à base de farine subventionnée alors que leur activité principale doit se résumer à la fabrication de gâteaux. « Normalement, ce sont les boulangeries qui peuvent se permettre de proposer quelques produits sucrés, comme les cakes ou biscuits afin de relever leur marge bénéficiaire et non pas l'inverse. De nombreuses pâtisseries offrent du pain sur leurs étalages, ce qui est illégal». Il a également pointé du doigt les nombreuses supercheries des boulangeries anarchiques qui fabriquent des pains dont le poids et la taille sont inférieurs aux standards fixés par la loi. A la proposition d'enlever tout court toute subvention sur le prix de la farine, il répond par la négative. « Le prix de la baguette passerait au bas mot à 300 millimes, ce qui reviendra cher au pauvre citoyen».